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Passer au contenu Câest sur ce thĂšme quâont planchĂ© les candidats au baccalaurĂ©at scientifique 2012 hier matin. La question vous inspire-t-elle ? Quâauriez-vous rĂ©pondu Ă leur place ? Philosopher est tout un art⊠qui sâapprend ! Pour briller en sociĂ©tĂ©, se coucher un peu plus savant que la veille, ou encore Ă©clairer les enfants dans leurs questionnements quotidiens, voici une sĂ©lection de collections Milan prĂȘte Ă penser » Pour les adultes, la collection CarrĂ© philo » suggĂšre 80 citations, pensĂ©es ou maximes sur des thĂšmes spĂ©cifiques la libertĂ© avec Les Mots pour ĂȘtre libre par exemple, lâamour, le voyage,âŠ. Utile pour embellir une dissertation ou enrichir une conversation ! La collection BoĂźte Ă outils philo » rĂ©unit quant Ă elle des ouvrages Ă©crits par des philosophes spĂ©cialistes dâune question, tout en apportant un Ă©clairage loin de toute pensĂ©e unique. Enfin, Pause philo » applique la philosophie Ă des sujets contemporains Petite philosophie de lâamateur de cuisine, Petite philosophie du jardinier,âŠ. Citons ainsi Petite philosophie du rugby qui cherche Ă concilier deux disciplines qui Ă priori ont peu en commun. Parce quâil nây a pas dâĂąge pour se poser des questions, les plus jeunes ont aussi leurs collections philosophiques. Ainsi, dĂšs 6 ans, les ouvrages de la collection Dis-moi filo » touchent aussi bien les parents que les enfants, en sâintĂ©ressant Ă des sujets qui intriguent les plus jeunes Et si on ne mourait jamais ? tout en ouvrant la discussion. On ne prĂ©sente plus Les GoĂ»ters Philo » Ă partir de 7 ans qui offrent des clefs aux enfants pour commencer Ă dĂ©battre en leur apportant de vrais arguments et en puisant les exemples de situations dans leur quotidien. DĂšs 10 ans, Les Grands Philosophes parlent aux petits philosophes permet Ă travers de petites histoires de donner tout leur sens Ă des citations cĂ©lĂšbres.
Quoide plus naturel quâun journal toujours au plus prĂšs de lâactualitĂ© comme le notre et cherchant Ă reproduire la vĂ©racitĂ© des faits se penche sur lâune des questions du bac de philosophie qui avait lieu lundi. Cette question, la voici : «Quel besoin avons- nous de chercher la vĂ©ritĂ© ?» Afin de rĂ©pondre Ă ce questionnement
Voici le texte intĂ©gral du document des Ă©vĂȘques du Conseil permanent. Nous vous invitons Ă lire la prĂ©face de Monseigneur Michel Aupetit, archevĂȘque de Paris, lâintroduction rĂ©digĂ©e par les membres du Conseil permanent, enfin la postface de Monseigneur Jean-Pierre Batut, Ă©vĂȘque de Blois. PrĂ©face de Mgr Aupetit LâĂglise a-t-elle quelque chose Ă dire aux hommes ? » Que faut-il dire aux hommes ? » Câest par le titre de Saint-ExupĂ©ry dans sa Lettre au gĂ©nĂ©ral X [1]que je voudrais ouvrir lâouvrage que les Ă©vĂȘques de France proposent Ă la rĂ©flexion de tous. La question en entraĂźne une autre Quâest-ce que lâhomme ? ». Le psalmiste oscille entre le sentiment de lâextrĂȘme fragilitĂ© de la vie de lâhomme et celui de lâĂ©merveillement devant lâinaliĂ©nable grandeur de sa vie Lâhomme nâest quâun souffle, les fils des hommes, un mensonge »[2] ; Tu lâas fait un peu moindre quâun dieu, le couronnant de gloire et dâhonneur »[3] Lâhomme est un mystĂšre de faiblesse et de splendeur, tour Ă tour misĂ©rable esclave et capable de la libertĂ© suprĂȘme, celle dâaimer jusquâau don total de sa vie. Adam nâest que terre, mais il a reçu le souffle de Dieu. En tout homme, fĂ»t-il le plus obscur, brille le don dâune Ăąme immortelle. Une autre question se pose lâĂglise a-t-elle quelque chose Ă dire aux hommes ? On accuse souvent les religions dâĂȘtre indistinctement facteur de violence. Toute lĂ©gitimation de la violence au nom de la foi chrĂ©tienne est en radicale contradiction avec lâĂvangile Nous proclamons un Messie crucifiĂ©, scandale pour les juifs et folie pour les paĂŻens, mais pour ceux que Dieu appelle ⊠il est puissance de Dieu et sagesse de Dieu »[4]. Le Seigneur a assumĂ© comme prĂȘtre et victime la puissance du Mal et de la mort pour tout vaincre dans la lumiĂšre de sa rĂ©surrection. Notre foi en JĂ©sus ressuscitĂ© est solide, attestĂ©e par les apĂŽtres qui ont vu, entendu et touchĂ© » le Verbe de Vie[5]. Elle est proclamĂ©e par le peuple immense des tĂ©moins qui ont engagĂ© leur vie par fidĂ©litĂ© au Christ, souvent jusquâĂ la mort. Pour qui en reste Ă un regard extĂ©rieur, lâĂglise apparaĂźt en Occident comme une institution vieillie et secouĂ©e de scandales, qui entrave le mythe dâun progrĂšs que lâon invoque sans trop savoir oĂč il mĂšne. Mais lâĂglise est belle pourtant dans le visage de ses saints, dans lâimmense manteau de tendresse quâelle Ă©tend sur le monde, particuliĂšrement sur les plus dĂ©laissĂ©s des hommes. Elle est experte en humanitĂ© »[6] car sa foi repose sur lâAlliance de Dieu avec son peuple, accomplie dans lâIncarnation du Christ et le Salut par la Croix, ouvert Ă la multitude des hommes de toute race, langue, peuple et nation ».[7] Lâoubli de Dieu, lâestompement de la conscience de lâĂ©ternitĂ© dans le cĆur de lâhomme entraĂźne lâeffacement de la dignitĂ© humaine. Le drame de lâhumanisme athĂ©e qui a ravagĂ© le XXe siĂšcle a vu, dans des proportions jusquâalors inĂ©galĂ©es dans lâhistoire, la mort de lâinnocent. La tentation promĂ©thĂ©enne demeure. Elle ne pourra exaucer les hommes dans leur dĂ©sir dâune vie Ă©ternelle. Elle sacrifie les plus fragiles sur lâautel dâune prĂ©tendue modernitĂ©. Nous proclamons, Ă temps et Ă contretemps, la dignitĂ© inaliĂ©nable de toute vie humaine en ce monde. JĂ©sus, le Fils de Dieu fait homme, est lâamour divin dĂ©ployĂ© dans la vulnĂ©rabilitĂ© de la chair. Une sociĂ©tĂ© est vraiment humaine quand elle se fait gardienne du plus petit des ĂȘtres. Il faut imaginer Sisyphe heureux »[8]. La parole de Camus sur lâhomme condamnĂ© Ă rouler Ă©ternellement son rocher est celle de lâacceptation de lâabsurde. Avec saint Ignace dâAntioche, nous voulons dire une autre parole Il y a en moi une eau vive et qui murmure viens vers le PĂšre »[9]. Laissez-moi simplement vous poser la question quelle est votre espĂ©rance ? Puisse cet ouvrage vous donner de devenir davantage ce que vous ĂȘtes en vous ouvrant Ă Celui qui est », le Dieu dâAbraham, dâIsaac et de Jacob, dont la gloire resplendit sur la Face du Christ. [1] A de SAINT-EXUPERY, Que faut-il dire aux hommes, Lettre inĂ©dite au gĂ©nĂ©ral X, Imprimerie gĂ©nĂ©rale du sud-ouest, Bergerac, 1949. [2] Ps 39. [3] Ps 8. [4] I Co 23-24. [5] Cf. I Jn 1, 1. [6] Bx PAUL VI, Lettre encyclique Populorum progressio, 1967, I, 13. [7] Ap 5, 9. [8] Albert CAMUS, Le Mythe de Sisyphe, NRF, Gallimard, 1965, p. 198. [9] S. IGNACE DâANTIOCHE, Lettre aux Romains, 7. Introduction au document quâil est exaltant dâĂȘtre humain face aux dĂ©fis ! » LâĂglise catholique tient Ă proclamer un grand oui Ă la vie humaine » CongrĂ©gation pour la Doctrine de la Foi, instruction Dignitas Personae, 1. Elle dĂ©fend le dĂ©veloppement de la personne humaine dans toutes ses dimensions. LâĂglise voudrait redire combien il est exaltant dâĂȘtre humain face Ă ces dĂ©fis. LâEcriture le chante Quâest-ce que lâhomme pour que tu penses Ă lui, le fils dâun homme, que tu en prennes souci ? Tu lâas voulu un peu moindre quâun dieu, le couronnant de gloire et dâhonneur, tu lâĂ©tablis sur les Ćuvres de tes mains, tu mets toute chose Ă ses pieds » Ps 8, 5-7. Aujourdâhui lâhomme fait face Ă de grands dĂ©fis et Ă de grandes tentations. Le progrĂšs donne Ă lâhomme des potentialitĂ©s exaltantes mais crĂ©e aussi des menaces inquiĂ©tantes. Dâune part, il est menacĂ© par la catastrophe Ă©cologique, dâautre part certains parlent de le remplacer par un homme augmentĂ© ou mĂȘme un post-humain ». Nous nous interrogeons sur sa dignitĂ©, sa vocation, son destin dans lâunivers. Nous nous effrayons de ses crimes. Beaucoup rĂ©clament sans cesse de nouveaux droits qui posent des problĂšmes redoutables. Câest pourquoi il a Ă©tĂ© jugĂ© utile de proposer quelques pistes de rĂ©flexion sans doute partielles[1] sur ces interrogations concernant la personne humaine, sa beautĂ©, sa dignitĂ©, son droit de sâaccomplir pleinement. Tu nous as fait pour Toi, Seigneur, et notre cĆur est sans repos tant quâil ne repose en Toi » Saint Augustin, Confessions I, i, 1. Dieu a créé lâhomme Ă son image et Ă sa ressemblance pour lâunir Ă lui dans lâAmour qui est la vie Ă©ternelle. Lâhomme nâest pas fait pour se contenter de cette vie-ci, il est appelĂ© Ă plus grand, en vivant dĂšs maintenant lâamour. Plus radicalement encore, lâhomme ne trouve pas sa fin en lui-mĂȘme, il est appelĂ© Ă se donner aux autres et Ă Dieu pour sâaccomplir. En lâappelant Ă lâexistence par amour, il lâa appelĂ© en mĂȘme temps Ă lâamour Jean-Paul II, Familiaris consortio, 11. Par cet appel, lâhomme est une personne, Ă la fois intĂ©rioritĂ© et relation, il se reçoit toujours dâun autre, Ă commencer par lâAutre par excellence quâest le CrĂ©ateur. [1] Par souci de mĂ©thode, les questions Ă©conomiques et sociales seront trĂšs peu abordĂ©es ici. Partie I LâĂtre humain est une personne Créé et appelĂ© par DieuCréé et appelĂ© par Dieu, chacun de nous est une personne. Cette affirmation comporte une part de mystĂšre. La personne ne peut pas ĂȘtre dĂ©finie comme un crayon ou une table parce quâelle est créée Ă lâimage et ressemblance de Dieu et porte quelque chose de son mystĂšre. Mais il est possible de montrer ce que la personne possĂšde en propre qui la rend supĂ©rieure Ă toute autre chose. La personne est appelĂ©e par Dieu Ă se donner librement Ă lui. Sa libertĂ© se dĂ©termine par sa raison. Lâexercice libre de la raison rend la personne responsable, apte Ă Ă©couter sa conscience pour y Ă©couter Dieu, ce qui lâouvre Ă la transcendance. La personne est appelĂ©e tout entiĂšre, corps, Ăąme et esprit. Voir les Ă©clairages du PĂšre Emmanuel Coquet AppelĂ© Ă la libertĂ©Souverainement libre et aimant, Dieu ne peut appeler Ă sâunir Ă lui que dans la libertĂ©. Il a donc crĂ©e lâhomme libre. Cette libertĂ© sâaccomplit par lâamour qui tient dans le don de soi. Cette libertĂ© comporte une insatisfaction qui pousse lâhomme Ă chercher plus grand que ce monde-ci. La personne est libre. Ses actes ne peuvent sâexpliquer complĂštement par des causes extĂ©rieures telles que la gĂ©nĂ©tique, son histoire, le milieu ou la configuration du cerveau. Chacun de nous sent bien que ses dĂ©cisions lui appartiennent en propre. Chacun est vraiment maĂźtre de sa vie. Cette libertĂ© permet en particulier Ă lâhomme de choisir le Bien pour le Bien et non par instinct ou calcul stratĂ©gique. Cette libertĂ© innĂ©e, nommĂ©e libre arbitre, pousse lâhomme Ă chercher la libertĂ© sociale et politique. Il se rĂ©volte contre toute forme dâoppression contraire Ă sa dignitĂ©. Mais le libre arbitre nâest pas capacitĂ© indiffĂ©rente de faire nâimporte quoi. Il nâest pas non plus autorisation de faire tout ce quâon veut comme si nos actes ne concernaient que nous. Le libre arbitre deÂŽ sire le Bien total. Il est appelĂ© par Dieu Ă sâunir Ă Lui dans lâamour. Il se rĂ©alise donc pleinement par cet amour. La science a souvent tendance Ă nier ce libre arbitre en appliquant Ă lâhomme des modĂšles qui sont valables pour lâunivers inanimĂ©. Câest ainsi quâĂ notre Ă©poque, les neurosciences se font fortes de percer les mystĂšres de lâesprit humain et de dĂ©montrer que lâhomme est dĂ©terminĂ© par la structure de son cerveau. Sans rien nier des formidables dĂ©couvertes apportĂ©es par ces sciences, nous ne pouvons souscrire Ă cette affirmation. Mon cerveau ne me dĂ©termine pas. Quelle que soit leur importance, les biens limitĂ©s de ce monde ne peuvent apaiser notre soif. Tous, nous cherchons un Bien suprĂȘme qui nous procure le bonheur. Notre libertĂ© porte en elle une insatisfaction qui la pousse Ă chercher autre chose que ce monde-ci et ses biens relatifs. La libertĂ© de la personne ne sâaccomplit jamais seule. Elle a besoin de sâallier Ă la libertĂ© des autres pour atteindre sa fin vĂ©ritable qui est le bonheur. Ce libre arbitre est Ă©galement besoin de se donner. Il nây a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux quâon aime » Jn 15, 13. La personne nâest pas faite pour poursuivre son intĂ©rĂȘt de maniĂšre Ă©goĂŻste. Elle est destinĂ©e Ă sâouvrir aux autres. Câest ainsi que les rĂ©gimes dâoppression ont vu se lever des hommes et des femmes prĂȘts au sacrifice suprĂȘme pour rĂ©tablir la justice. La libertĂ© comporte donc le devoir de respecter la libertĂ© dâautrui. La libertĂ© de lâhomme ne flotte pas en lâair, elle est situĂ©e. Elle apparaĂźt dans un lieu et une eÂŽpoque, une culture, des conditions de vie. Elle est par lĂ mĂȘme limitĂ©e. LimitĂ©e parce quâelle est finie, limitĂ©e par les Ă©lĂ©ments qui lâenvironnent, limitĂ©e par la libertĂ© dâautrui. En rĂȘvant orgueilleusement de sâaffranchir de ses limites, lâhomme se dĂ©truit et blesse la fraternitĂ©. En les accueillant humblement comme un chemin de vĂ©ritĂ© , il sâaccomplit. Qui sâĂ©lĂšve sera abaissĂ©, qui sâabaisse sera Ă©levĂ© » Lc 14, 11. La libertĂ© ainsi comprise appartient Ă la beautĂ© de lâhomme capable de surmonter les obstacles et dâouvrir de nouvelles routes de progrĂšs humain. Si bien du travail reste Ă faire, la fin du XXe siĂšcle a vu sâeffondrer plus dâun rĂ©gime oppressif qui se croyait dĂ©finitif. Osons croire en cette libertĂ©. Lâhomme sent bien quâil est divisĂ© intĂ©rieurement. Sâil se regarde avec honnĂȘtetĂ©, chacun de nous avouera des complicitĂ©s avec le mal en lui-mĂȘme. Car je ne fais pas le bien que je veux, et je fais le mal que je ne veux pas » Rm 7, 19 dit saint Paul. La libertĂ© de lâhomme a Ă©tĂ© blessĂ©e par le pĂ©chĂ©. Le pĂ©chĂ© vient dresser la volontĂ© contre elle-mĂȘme. Cette situation se rĂ©vĂšle spĂ©cialement dans les diffĂ©rentes addictions comme la toxicomanie ou la pornographie. Mais avec lâaide de JĂ©sus-Christ, lâhomme peut surmonter cette division et trouver la paix. Je peux tout en celui qui me rend fort » Ph 4, 13 dit le meËme saint AppelĂ© Ă la vĂ©ritĂ©La libertĂ© nâest pas aveugle, elle se dĂ©termine par la raison que Dieu a dĂ©posĂ©e en lâhomme. Par sa raison, la personne est faite pour la vĂ©ritĂ©. Elle est capable de trouver la vĂ©ritĂ© parce quâelle est intĂ©rioritĂ©. Nous avons tous besoin de la vĂ©ritĂ©. Lâhomme ne se satisfait pas des apparences, il veut connaĂźtre la nature profonde des choses. Il dĂ©sire possĂ©der la vĂ©ritĂ© pour elle-mĂȘme. Il y a quelque chose dâexaltant dans la dĂ©couverte de la vĂ©ritĂ©, dans le progrĂšs des connaissances humaines, portĂ© si loin ces derniers siĂšcles. La vĂ©ritĂ© est universelle. Elle est faite pour lâhumanitĂ© entiĂšre. Le besoin de vĂ©ritĂ© est la source de tout dialogue. Lâamour de la vĂ©ritĂ© permet le dialogue et en mĂȘme temps le dialogue suppose lâamour de lâautre. Dans lâamour commun de la vĂ©ritĂ© et de lâhomme, le dialogue permet Ă chacun dâavancer librement. De mĂȘme, tout homme a droit Ă la vĂ©ritĂ©. Les programmes dâaide sociale envers les plus dĂ©favorisĂ©s doivent comporter lâĂ©ducation pour respecter ce droit Ă la vĂ©ritĂ© de tous. La recherche de la vĂ©ritĂ© suppose aussi lâhumilitĂ©. Celui qui sâenferre dans ses certitudes, son idĂ©ologie, se voue Ă lâillusion. La vĂ©ritĂ© se trouve en acceptant de grandir et pour cela dâavoir besoin des autres. La parole des plus petits est prĂ©cieuse, en particulier quand elle crie leurs dĂ©tresses et leurs espĂ©rances, car elle aussi porte la vĂ©ritĂ©. Câest pourquoi le mensonge est contraire Ă la dignitĂ© de lâhomme. AprĂšs des siĂšcles trĂšs rationalistes, notre Ă©poque est traversĂ©e de doutes sur les capacitĂ©s de la raison humaine. Les Ă©checs du progrĂšs, les menaces nouvelles, le choc des cultures, tendent Ă provoquer un relativisme ou un scepticisme. Cet excĂšs est aussi mortifĂšre que le prĂ©cĂ©dent. Nous en arrivons Ă une Ăšre de la post-vĂ©ritĂ© » oĂč de soi-disant faits alternatifs » viendraient remplacer le besoin de vĂ©ritĂ©, Ăšre Ă laquelle nous ne pouvons pas nous rĂ©signer. Maintenue dans ses justes limites, Ă©clairĂ©e par lâamour, la raison humaine est vraiment capable de connaĂźtre lâunivers et de proposer de nouvelles solutions. Elle nâa pas fini de nous Ă©merveiller. Si la raison peut ĂȘtre Ă©clairĂ©e par la RĂ©vĂ©lation, la vĂ©ritĂ© ultime que cherche lâhomme, sur Dieu, sur lui-mĂȘme, est inaccessible Ă la raison, aussi puissante que puisse ĂȘtre celle-ci. Elle a Ă©tĂ© rĂ©vĂ©lĂ©e par le Christ, qui est Ă la fois le chemin, la vĂ©ritĂ©, la vie » Jn 14, 6. AppelĂ© Ă la responsabilitĂ©Lâhomme est appeleÂŽ a` reÂŽpondre selon sa liberteÂŽ eÂŽ claireÂŽ e par sa raison a` lâappel de Dieu. Il est donc responsable. Sâassumer comme personne libre suppose dâexercer cette responsabiliteÂŽ . LâeÂŽducation doit veiller a` faire naıËtre chez les jeunes ce sens de la responsabilite ÂŽ . Lâhomme est responsable de luime Ëme, des autres et de lâunivers. La catastrophe eÂŽ cologique qui nous menace deÂŽmontre ce point lâhomme a un devoir de bonne geÂŽrance sur la creÂŽation qui lui a eÂŽ teÂŽ confieÂŽ e par Dieu. Sâil nâassume pas ce devoir, il creÂŽe des drames dont il est la premie` re victime. Cet exemple de la responsabilite ÂŽ eÂŽcologique deÂŽmontre aussi que sâassumer libre ne peut pas signifier suivre ses deÂŽ sirs sans frein, faire comme si lâon eÂŽ tait seul au monde. Les actes de chacun ont des reÂŽpercussions sur tous. Les actes ont aussi valeur dâexemples. Par exemple, le groupe des eÂŽveËques chargeÂŽ de la bioeÂŽthique a signaleÂŽ que le suicide assisteÂŽ ne peut pas eË tre preÂŽsenteÂŽ comme un choix individuel sans conseÂŽquence pour les autres. En choisissant le suicide assisteÂŽ en raison de leur aË ge ou de leur maladie, les personnes font peser sur les autres malades et personnes aË geÂŽes le soupcžon dâeË tre en trop, encombrantes ou trop couË teuses. Nous sommes responsables les uns des autres. En particulier, nous sommes responsables de ceux qui parmi nous souffrent le plus ou sont blesseÂŽs dans leur humaniteÂŽ . Nous ne pouvons pas regarder ailleurs et faire comme si cela ne nous concernait pas. Mais lâaide indispensable que nous leur devons doit aussi respecter leur liberteÂŽ et les aider a` exercer leur propre responsabiliteÂŽ . Notre eÂŽpoque a des proble`mes avec la responsabilite ÂŽ . Elle oscille entre la tentation de deÂŽresponsabiliser lâhomme, de le laisser a` sa liberteÂŽ abaisseÂŽe au rang de caprice, et celle de deÂŽ signer des boucs eÂŽ missaires. Dâun coË teÂŽ , lâideÂŽe dâune liberteÂŽ laisseÂŽe seule a` elle-meËme sans loi induit la fin de toute responsabiliteÂŽ devant les autres et Dieu. De lâautre, les drames qui font la une des journaux imposent quâil y ait un responsable et comme lâeÂŽpoque ne sait plus exercer cette responsabilite ÂŽ , elle revient sous des formes folles en lynchant un individu pris presque au hasard pendant que les autres se lavent les mains de proble`mes qui souvent rele`vent de lâensemble de la communauteÂŽ. En reÂŽ aliteÂŽ , la responsabilite ÂŽ est lâexercice pleÂŽnier de la liberteÂŽ . Dieu a laisseÂŽ lâhomme a` son propre conseil, non pour quâil suive aveugleÂŽment ses instincts qui ne suffisent pas a` eÂŽ clairer entie`rement ses choix, mais pour quâil puisse se donner aux autres et a` Lui-meËme en toute liberteÂŽ . Câest pourquoi chacun de nous reÂŽpondra de ses actes devant Dieu. LâEÂŽ vangile manifeste que ce jugement dernier portera sur la conduite envers les plus petits Ce que vous faites au plus petit dâentre mes fre` res, câest a` moi que vous le faites » Mt 25, 40. Nous ne serons pas jugeÂŽs sur des performances extraordinaires mais sur notre solidariteÂŽ avec les plus Conscience et Loi naturelleLa responsabilitĂ© de lâhomme est sa rĂ©ponse Ă lâappel de Dieu. Câest pourquoi lâhomme est dotĂ© dâune conscience morale, un sanctuaire intĂ©rieur oĂč Dieu lui parle, oĂč il juge ses propres actes, se louant quand il fait le bien, se condamnant quand il fait le mal. Dans cette conscience, Dieu y a dĂ©posĂ© la loi morale. Cette loi morale, qui est appelĂ©e loi naturelle, nâest pas la loi de la nature au sens des animaux. Du point de vue de lâhomme, il est sans intĂ©rĂȘt de savoir si la monogamie ou lâhomosexualitĂ© existent chez les animaux dâailleurs, les animaux ne connaissent pas lâinterdit de lâinceste. La loi naturelle est la loi de la nature humaine, qui dit ce quâil est bon que lâhomme fasse pour trouver le bonheur. Cette nature humaine ne sâoppose pas Ă la culture, car il est de la nature de lâhomme de gĂ©nĂ©rer des cultures. Lâhomme a le devoir de toujours suivre sa conscience. Il ne doit pas en ĂȘtre empĂȘchĂ© par les autres tant que cela ne nuit pas Ă lâordre public juste. TrĂšs spĂ©cialement, lâhomme doit ĂȘtre laissĂ© libre de suivre sa conscience en matiĂšre religieuse, car se donner par contrainte Ă Dieu est indigne et de lâhomme et de Dieu. Mais la conscience est marquĂ©e par le pĂ©chĂ©. Elle peut ĂȘtre obscurcie par des habitudes malsaines du groupe ou par lâaccumulation des pĂ©chĂ©s personnels. Un enfant qui grandit dans un milieu oĂč le vol est habituel trouvera normal de voler. Un individu qui sâest habituĂ© Ă mentir nây verra plus de difficultĂ©s. Il faut Ă©clairer la conscience par la voix de la sagesse et lâĂ©coute de la Parole de Dieu. Câest particuliĂšrement la responsabilitĂ© des Ă©ducateurs, Ă commencer par les parents. Mais la voix de la conscience ne sâĂ©teint jamais complĂštement, car elle est la voix mĂȘme de Dieu. Ne desesperons jamais de personne ! Toute personne humaine est capable dâĂ nouveau Ă©couter sa conscience pour revenir au Ouverture Ă la transcendanceParce quâelle est dotĂ©e dâune conscience oĂč Dieu lui parle, la personne est ouverte Ă la question religieuse. Depuis les origines, les civilisations humaines rĂ©flĂ©chissent Ă la signiïŹcation de lâunivers, Ă la destinĂ©e ïŹnale de lâhomme, et Ă lâexistence de Dieu. Ces recherches ont Ă©tĂ© marquĂ©es de bien des maniĂšres par le pĂ©chĂ© mais elles prouvent que lâhomme est tournĂ© vers le transcendant. Cette ouverture Ă la transcendance nâest pas lâapanage dâune Ă©lite. Tout au long de sa vie terrestre, JĂ©sus a manifestĂ© combien les petits, les pauvres sont Ă©galement habitĂ©s du dĂ©sir de rencontrer Dieu et que justice leur soit rendue. Lâouverture Ă la transcendance appartient Ă tout homme. Voir les Ă©clairages du PĂšre Emmanuel Coquet Corps, Ăąme et espritLâhomme est appelĂ© tout entier, il nây a rien en lui que Dieu voudrait laisser de cĂŽtĂ©. La personne humaine a Ă©tĂ© créée comme une rĂ©alitĂ© corps-Ăąme-esprit Ă la fois, indissociable et formant un tout. Elle a Ă©tĂ© créée ainsi par Dieu, et elle est appelĂ©e Ă le rejoindre avec tout ce quâelle est. Elle ne se rĂ©duit pas Ă son corps. Elle ne se rĂ©duit par consĂ©quent pas non plus Ă cette vie-ci. Les activitĂ©s de cette vie ont leur bontĂ© propre mais elles nâapaisent pas la soif de lâhomme. Au travers de ses activitĂ©s dans ce monde, en particulier la recherche de la vĂ©ritĂ© et de la justice, lâhomme dĂ©montre quâil aspire Ă une autre existence libĂ©rĂ©e de la souffrance et du pĂ©chĂ©. Lâhomme porte en lui une Ăąme par laquelle il est rationnel et libre et un esprit par lequel il est en relation avec lâEsprit de Dieu. LâĂąme est immortelle, elle est appelĂ©e Ă vivre avec Dieu en attendant la rĂ©surrection des corps. Par consĂ©quent, le service que nous devons Ă nos frĂšres nâest jamais seulement matĂ©riel. Lâhomme ne vit pas seulement de pain, mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu » Mt 4, 4. Les pauvres ont besoin dâĂȘtre scolarisĂ©s, dâavoir accĂšs aux biens culturels, dâĂȘtre respectĂ©s dans leur croyance autant quâils ont besoin de pain et de toit. Par son esprit, qui lâouvre Ă la transcendance, lâhomme est apte Ă communiquer avec Dieu, Ă recevoir le Saint-Esprit et Ă vivre de la vie divine. Câest la pointe de son intĂ©rioritĂ©, oĂč il peut dialoguer secrĂštement avec Dieu. Mais le corps de lâhomme lui aussi appartient pleinement a` sa digniteÂŽ . Lui aussi a eÂŽteÂŽ creÂŽeÂŽ par lâamour et pour lâamour. Par nos corps, nous sommes en relation avec les autres et avec lâunivers. Nous en sommes solidaires. Le corps de lâhomme est sexueÂŽ . Par ce fait meËme, il est tourneÂŽ vers lâautre et feÂŽcond. Câest par le corps que la personne peut sâunir intimement a` une autre personne. Câest la` une de ses graË ces majeures. La recherche de la veÂŽ riteÂŽ passe par le corps, car elle commence par lâusage droit des cinq sens. La responsabiliteÂŽ passe par le corps. La personne humaine est responsable des autres parce quâelle en est solidaire par son corps. Les actes de chariteÂŽ que le Christ nous presse de poser concernent le corps nourrir, veË tir, loger Mt 25, 35 s.. JeÂŽ sus lui-meËme a tre` s souvent gueÂŽ ri les corps, montrant par la` le soin que nous lui devons. Le corps est donc le premier instrument de la chariteÂŽ . Le corps offre a` la personne de multiples potentialiteÂŽ s que le sport met en valeur. Les philosophes se sont tre`s toËt eÂŽmerveilleÂŽ s des mains, ces outils a` tout faire. Le corps impose aussi a` la personne des limites. Lâhomme nâest pas capable de tout. Il est fragile. Il doit veiller sur sa santeÂŽ . Ces limites le rappellent a` lâhumiliteÂŽ et le prote`gent de la deÂŽmesure. Ces limites rappellent aussi que tout homme a ses propres pauvreteÂŽ s nous avons tous commenceÂŽ par eË tre un embryon vulneÂŽrable et cacheÂŽ, et a` part ceux qui connaıËtront le drame de mourir jeunes, nous vivrons tous la vieillesse et ses fragiliteÂŽ s. Respecter lâhomme dans son corps, ce nâest pas lâeÂŽcraser sous des exigences inaccessibles, mais respecter sa pauvreteÂŽ, ses limites en soi et en lâautre. Le souci que nous prenons des corps les plus affaiblis est le signe de notre veÂŽritable amour du corps tel quâil est. Le corps nâest pas un outil que chacun utiliserait a` sa guise. Câest un don de Dieu, qui nous ouvre a` la communion avec les autres. Nous devons donc le recevoir avec respect et lâutiliser de manie`re droite. Depuis lâAntiquiteÂŽ , lâhomme veille a` cultiver son corps par lâasce`se, la meÂŽdecine et le sport pour en tirer le meilleur. ConserveÂŽe dans des proportions raisonnables, cette habitude est excellente. Les progre` s techniques de notre eÂŽpoque promettent de nouvelles reÂŽalisations dans ce domaine. Nombre dâentre elles seront excellentes et a` accueillir dans la joie. Mais aujourdâhui, certains veulent augmenter » le corps humain, voir le remplacer par un post-humain ». Câest excessif. Le corps humain tel que facžonneÂŽ par la nature porte en lui-meËme la digniteÂŽ de la personne et le moyen de sâaccomplir librement dans lâamour. Lâhomme nâest pas fait pour accumuler les performances, mais pour se donner dans lâamour. Le corps quâil a aujourdâhui y est apte malgreÂŽ sa faiblesse. Câest en apprenant a` vivre avec nos limites que nous nous accomplirons. Le corps permet a` lâhomme de travailler. Câest un eÂŽ leÂŽment essentiel de sa digniteÂŽ , qui le fait participer a` lâoeuvre creÂŽ atrice de Dieu. Encore faut-il que les conditions de ce travail soient humaines, ce qui nâest pas toujours le cas. Quand la santeÂŽ et la seÂŽcuriteÂŽ du travailleur ne sont pas assureÂŽ es, loin dâeÂŽ tablir la digniteÂŽ du corps, le travail lâabıËme. Le travail des enfants en particulier est un scandale. Le corps appartient pleinement a` lâimage de Dieu. La Gene` se montre poeÂŽ tiquement Dieu occupeÂŽ a` le facžonner de ses mains et y a insuffler son esprit Gn 2, 7. Le premier commandement quâil a donneÂŽ a` lâhomme est de croıËtre et se multiplier Gn 1, 28. Dieu se reÂŽjouit gratuitement de voir lâhomme vivre avant quâil lui ait rendu le moindre culte. Adam sâest eÂŽmerveilleÂŽ de voir E` ve, lâaide qui lui eÂŽ tait accordeÂŽ e, et ce avant quâE` ve ait fait quoi que ce soit pour lui Gn 2, 23. Le salut offert a` lâhomme concerne aussi son corps, promis a` la reÂŽ surrection. JeÂŽ sus ressusciteÂŽ montre a` Thomas ses stigmates Jn 20, 27. Ce signe abyssal manifeste entre autres que la reÂŽsurrection ne nie pas nos fragiliteÂŽ s mais les assume pour les transfigurer. Le corps humain est splendide. A ` condition quâil soit regardeÂŽ selon sa veÂŽ riteÂŽ, une expression contingente de la vie. Ce respect duË au corps nâest pas une idolaË â trie. Les soins porteÂŽ s au corps ne peuvent avoir pour finaliteÂŽ que de maintenir son eÂŽquilibre et son existence, de manie`re raisonneÂŽ e, sans lui donner une importance Scandale du malLe scandale du mal ne frappe pas seulement la volonteÂŽ humaine. Plus mysteÂŽ rieusement, il frappe lâhomme tout entier. Certains accumulent les eÂŽpreuves douloureuses et deÂŽ stabilisantes, ou sont frappeÂŽs subitement par la maladie physique ou mentale. Dâautres, de`s la conception, ou par des accidents de la vie, sont marqueÂŽ s par le handicap. Câest pour eux et leur entourage un fardeau lourd a` porter. Il est leÂŽgitime de se tourner vers Dieu et de lui crier pourquoi ? » Comme JeÂŽsus luime Ëme lâa fait. Hors de la ReÂŽsurrection, il nây a pas de reÂŽponse deÂŽfinitive au scandale du mal. Mais par sa vie et surtout sa Passion, JeÂŽsus nous a rejoints dans ce myste`re et nous aide a` lâaffronter dans lâespeÂŽrance. Il lâa vaincu par sa reÂŽsurrection et il nous promet de le vaincre totalement un jour. Il est possible aussi de manifester sa compassion envers ceux qui sont particulie`rement frappeÂŽ s par ce scandale. Il arrive des situations ou` il nây a plus rien de techniquement efficace a` faire contre le scandale du mal. Ce sont des moments speÂŽ cialement difficiles pour notre eÂŽpoque habitueÂŽ e aux prouesses de la technique. Dans ces situations, une parole, un geste, une simple preÂŽ â sence peuvent manifester une profonde compassion et soulager la personne. JeÂŽsus a souvent exerceÂŽ ce ministe`re de compassion et nous a demandeÂŽ de faire de meËme. Les personnes frappeÂŽ es par lâeÂŽpreuve du mal conservent toute leur digniteÂŽ. Les gens qui se vouent au service des personnes handicape ÂŽes teÂŽmoignent particulie`rement des treÂŽsors dâhumaniteÂŽ quâils deÂŽcouvrent par la` . Le coeur, la capaciteÂŽ dâaimer de la personne demeure toujours intact sous les handicaps. Câest pourquoi il est important de travailler a` un meilleur accueil des personnes handicapeÂŽ La MortLa mort est lâeÂŽnigme par excellence. Depuis la plus haute AntiquiteÂŽ , lâhumaniteÂŽ meÂŽ dite sur ce myste` re, sa signification, les moyens de le surmonter. Les diverses religions proposent toutes leur reÂŽponse a` ce myste` re. Lâhomme porte en lui le deÂŽ sir de vivre, et la mort scandalise, en particulier quand elle frappe trop toËt ou de manie` re aveugle. Il est naturel dâen avoir peur et la foi ne nous invite pas a` une inhumaine indiffe ÂŽrence. Encore une fois, il est leÂŽgitime de porter ce cri devant Dieu, comme Job. JeÂŽsus lui-meËme a eu peur face a` sa propre mort, nous rejoignant par-la` dans toute notre faibless. La mort est aussi la limite fondamentale de lâhomme. Elle se dessine derrie`re toutes les autres limites de lâhomme. Lâhomme ne peut pas tout se permettre parce quâil mettrait sa vie en danger. Elle lui rappelle quâil est un eË tre fini, quâil ne sâest pas donneÂŽ la vie et que sa vie lui est confieÂŽe sans eË tre sa proprieÂŽ teÂŽ .Mais lâhomme sait aussi deÂŽpasser le scandale de la mort par le sacrifice, la mort affronteÂŽe librement pour deÂŽfendre la justice et la veÂŽ riteÂŽ . Toutes les civilisations, toutes les religions, ont connu ces cas de sacrifice, dont la mort de Socrate est sans doute lâexemple occidental le plus parlant. La France est resteÂŽe marqueÂŽe par le sacrifice du colonel Beltrame contre la folie terroriste. Par ces sacrifices, lâhomme deÂŽmontre quâil se sent appeleÂŽ a` un au-dela` de la mort, vers un Bien parfait. Notre eÂŽpoque est contradictoire vis-a` -vis de la mort. Dâun coË teÂŽ , elle est eÂŽvacueÂŽe du deÂŽ bat, on nâose plus en parler ; de lâautre, nos fictions et jeux videÂŽo sont plus morbides que jamais. Nous avons besoin de reÂŽ apprendre a` regarder la mort en face, sans complaisance mais lucidement. Par la reÂŽsurrection du Christ, la mort est devenue un passage vers la vie en Dieu si lâhomme se laisse rejoindre par lui. Elle nâest pas la fin de tout. Il est urgent de rappeler lâespeÂŽ rance. Lâhomme nâest pas fait seulement pour cette vie-ci, il aspire au Bien supreËme, Dieu. Il aspire a` la victoire de la chariteÂŽ divine jusque dans les corps. JeÂŽsus reviendra a` la fin des temps, et ressuscitera les morts pour que tous ceux qui se seront laisseÂŽs rejoindre par lui vivent de sa Gloire. Ceux qui nous promettent la mort de la mort » ne nous promettent pas le bonheur mais nous vouent a` une mise`re sans Accepter sa finitudeDieu nâappelle pas des surhommes aux performances invincibles. Il aime les hommes et les femmes que nous sommes, avec nos limites. Dans lâĂvangile, câest devant JĂ©sus outragĂ© et ïŹagellĂ© quâest prononcĂ©e la parole Voici lâhomme» Jn 19, 5. La dignitĂ© inamissible de lâhomme nâest pas afïŹrmĂ©e au sujet dâun hĂ©ros performant au sommet de son succĂšs, mais devant un homme affaibli. JĂ©sus nous rejoint ainsi au cĆur de toutes nos limites pour les porter avec nous dans la foi et la charitĂ©. Câest en acceptant notre ïŹnitude Ă la suite de JĂ©sus Christ que nous nous accomplirons pleinement. En particulier, en manifestant notre solidaritĂ© envers ceux qui ont Ă©tĂ© blessĂ©s par la vie. Notre Ă©poque voit prolifĂ©rer un culte de la performance, de la jeunesse Ă©ternelle, qui nous Ă©crase. Câest Ă la fois inutile et blessant. Les faiblesses de lâhomme ne sâopposent pas Ă sa dignitĂ©. Nier nos limites, câest nous blesser en nous imposant un destin qui nâest pas le nĂŽtre. Câest aussi rendre impossible la fraternitĂ©, ou la rĂ©server Ă une Ă©lite de chanceux. Portons nos limites avec conïŹance pour nous ouvrir Ă une vraie rĂ©alisation de soi qui fera des merveilles. Voir les Ă©clairages du PĂšre Emmanuel Coquet Tout ĂȘtre humain est une personneTout en lâhomme est humain. Nous ne sommes pas des animaux auxquels aurait Ă©tĂ© ajoutĂ©e une couche de spiritualitĂ© comme on ajoute un logiciel Ă un ordinateur. Les caractĂšres les plus basiques de lâhomme sont dĂ©jĂ humains. Le corps de lâhomme manifeste dĂ©jĂ sa dignitĂ©, par sa station debout, ses mains prĂ©hensiles, la taille de son crĂąne et la taille de son bassin. Lâhomme ne manifeste pas seulement sa supĂ©rioritĂ© par la petite partie en lui qui est capable de raisonnement et de calcul. Le plaisir et la souffrance sont dĂ©jĂ spĂ©cifiques en lâhomme. Ils sâaccompagnent dâun pourquoi ? » dans le double sens dâen vue de quoi et a` cause de quoi ? Par exemple, lâalimentation nâest pas chez lâhomme un besoin seulement biologique. Elle sâaccompagne de rites sociaux et de symboles. Le drame de la personne anorexique tient autant Ă sa difficultĂ© Ă se tenir Ă table avec les autres quâĂ sa difficultĂ© Ă manger. Sâil faut respecter la sensibilitĂ© animale, il est capital de voir quâelle nâest pas la meËme que celle de lâhomme. En consĂ©quence, tout ĂȘtre humain est une personne. Il nâest pas nĂ©cessaire de faire montre de capacitĂ©s intellectuelles brillantes ou dâune vie morale dĂ©velopĂ©es pour ĂȘtre une personne. Il est excellent que des mĂ©thodes toujours plus affinĂ©es permettent aux hommes de dĂ©velopper leur rationalitĂ© ou leur capacitĂ© de mĂ©ditation, mais cela ne constitue pas des conditions pour ĂȘtre compte comme personne. Respectons tout ĂȘtre humain comme une personne, de sa conception jusquâĂ sa mort naturelle. En particulier, respectons la vie de tout ĂȘtre humain car elle est dĂšs lâorigine porteuse de ces valeurs de la personne. Voir les Ă©clairages du PĂšre Emmanuel Coquet Seul l'ĂȘtre humain est une personneCreÂŽeÂŽ par Dieu dans lâamour et appeleÂŽ a` se donner par amour, lâeËtre humain est une personne, tout eË tre humain est une personne et dans la creÂŽation visible seul lâeËtre humain est une personne. Tout en lâhomme est humain, lâhomme est splendide y compris par son corps. Il est ainsi capable de merveilles. La creÂŽ ation de lâhomme constitue ainsi le sommet de la creÂŽation, et en lâhomme toute la creÂŽation trouve sa finaliteÂŽ veÂŽ ritable. Elle aspire elle aussi a` eËtre libeÂŽreÂŽe du mal qui la frappe Rm 8, en eÂŽtant unie au salut de lâhumanite ÂŽ . Mais cela ne lâautorise pas a` nier ses limites. lâanimal nâest pas une personne et ne peut eË tre eÂŽ galeÂŽ a` lâhomme. Il ne partage ni sa raison, ni sa liberteÂŽ . Lâanimal ne porte pas cette insatisfaction qui pousse a` rechercher une transcendance. LâantispeÂŽcisme, qui nie la digniteÂŽ supeÂŽrieure de lâhomme sur lâanimal, lance des cris dâalerte quâil est bon dâentendre pour prendre nos responsabiliteÂŽs face a` la souffrance animale, mais se trompe dans ses conclusions. Lâhomme est la seule creÂŽature sur terre que Dieu a voulue pour elle-meËme » Gaudium et Spes, 24. LâarriveÂŽe des robots doteÂŽ s dâintelligence artificielle va reÂŽvolutionner nos modes de vie. Ce progre`s ouvrira des possibiliteÂŽs fabuleuses. Mais il pose aussi des proble`mes eÂŽ thiques redoutables. En particulier, il nâest pas acceptable de doter le robot dâune personnalite ÂŽ juridique. Le robot reste toujours sous la responsabiliteÂŽ de ses concepteurs et utilisateurs. Il nâest pas doteÂŽ dâun libre arbitre, il ne sâinteÂŽresse pas a` la veÂŽ riteÂŽ pour elle-meËme mais seulement a` lâapplication de son programme. Il est speÂŽcialement inquieÂŽ tant de voir se deÂŽvelopper des robots sexuels qui preÂŽ â tendent remplacer lâintimiteÂŽ dâamour avec une autre personne Sommet de la CrĂ©ationCréé par Dieu dans lâamour et appelĂ© Ă se donner par amour, lâĂȘtre humain est une personne, tout ĂȘtre humain est une personne et dans la crĂ©ation visible seul lâĂȘtre humain est une personne. Tout en lâhomme est humain, lâhomme est splendide y compris par son corps. Il est ainsi capable de merveilles. La crĂ©ation de lâhomme constitue ainsi le sommet de la crĂ©ation , et en lâhomme toute la crĂ©ation trouve sa finalitĂ© vĂ©ritable. Elle aspire elle aussi Ă ĂȘtre libĂ©rĂ©e du mal qui la frappe Rm 8, en Ă©tant unie au salut de lâhumanitĂ©. Mais cela ne lâautorise pas Ă nier ses limites. Partie II Nous sommes une seule famille Dieu a créé une seule famille Dieu, qui veille paternellement sur tous, a voulu que tous les hommes constituent une seule famille et se traitent mutuellement comme des fre` res » Gaudium et Spes, 24. Dieu nâa pas creÂŽeÂŽ lâhomme seul, il a creÂŽeÂŽ lâhumanite ÂŽ comme une seule famille appeleÂŽe a` se construire dans la fraterniteÂŽ jusquâa` ce quâelle soit pleinement rassembleÂŽe dans le Christ ressuscite ÂŽ comme un seul corps sous sa teË te. Ce fait nous impose de reconnaıËtre notre interde ÂŽpendance et de vivre de` s aujourdâhui la solidariteÂŽ , speÂŽcialement envers les plus faibles qui sont aussi nos fre` res. Mais ce principe est nieÂŽ aujourdâhui par lâinvocation dâune autonomie absolue qui nous enferme dans une solitude invivable. Câest au nom de cette autonomie que sont sans cesse reÂŽ clameÂŽs de nouveaux droits qui deÂŽnaturent de plus en plus la transmission de la vie, comme la gestation pour autrui[1]. Lâhomme nâest pas fait pour cette solitude, nous avons besoin les uns des autres et nous nous influencžons les uns les autres. Tout est lieÂŽ », reÂŽpe` te le pape Francž ois Laudato Siâ. Nous faisons tous lâexpeÂŽ rience de notre interdeÂŽpendance mais lâindividualisme actuel la deÂŽnie et empeËche de la vivre sereinement. LâhumaniteÂŽ doit reconnaıËtre quâelle trouvera les solutions a` ces deÂŽfis par la fraterniteÂŽ et la coopeÂŽration. [1] Nous renvoyons ici au document des eÂŽveËques de France sur la bioeÂŽthique La DigniteÂŽ de la procreÂŽation, Paris, Bayard-Cerf-Mame, 2018. Nous sommes interdĂ©pendants Il nâest pas bon que lâhomme soit seul » Gn 2, 18. Dieu a creÂŽeÂŽ lâhomme pour vivre uni a` toute lâhumaniteÂŽ autant quâa` Lui. Nous ne sommes pas des atomes isoleÂŽ s qui choisiraient avec qui avoir ou non des relations. Nous sommes tous interdeÂŽpendants. Avant de choisir de vivre la solidariteÂŽ comme valeur et pour la vivre selon sa veÂŽ riteÂŽ , lâhomme doit consentir a` ce fait de lâinterdeÂŽ â pendance. La question eÂŽcologique, a` propos de laquelle le pape a poseÂŽ ce principe, lâillustre la deÂŽ fense de lâenvironnement a` lâeÂŽ chelle de la plane` te deÂŽpend des actes de chacun la` ou` il se trouve. Mener une vie sobre, trier, recycler, eÂŽ conomiser lâeau deÂŽpend de chacun et a des reÂŽpercussions sur tous. Câest notre commune responsabiliteÂŽ . Dans ce domaine tre` s particulie`rement, nul ne peut preÂŽtendre mener sa vie a` sa guise sans se preÂŽoccuper du prochain. Nous ne pouvons pas comprendre le remplissez la terre et soumettez-la » Gn 1, 28 de la Bible comme lâautorisation de la saccager. Il sâagit dâun devoir de bonne geÂŽ rance qui aura des comptes a` rendre au vrai maıËtre de la creÂŽation. LâinterdeÂŽpendance des hommes peut aussi se montrer par le cas de la maladie. Dans une famille, si un membre est malade, toute la famille est toucheÂŽ e. Toute la famille doit sâorganiser pour le soin du malade, pour mener les taË ches domestiques sans lui, eÂŽventuellement pour eÂŽ viter la contagion si le malade est affaibli dans son syste`me immunitaire. Sâil se trouvait dans une situation deÂŽja` preÂŽ â caire, celle-ci sâaggrave. La vie sociale de la famille est toucheÂŽ e. Mais le destin de cette famille deÂŽpend de la qualiteÂŽ et de la proximiteÂŽ des structures de soin. Il est des reÂŽ gions, meËme en France, ou` lâon est mieux soigneÂŽ que dâautres. Ces structures de soin a` leur tour deÂŽpendent de la politique de santeÂŽ de lâEÂŽ tat, qui est influenceÂŽe par la crise mondiale. Ainsi, la santeÂŽ dâune seule personne au sein dâune famille est relieÂŽe par cercles concentriques a` la situation de toute lâhumanite ÂŽ . De manie`re geÂŽneÂŽrale, les situations de pauvreteÂŽ manifestent mieux lâinterdeÂŽ pendance des humains. Lâindividu qui sâest enferreÂŽ dans une logique de performance peut se faire croire quâil est seul au monde. Le pauvre, lui, manifeste combien nos destins sont lieÂŽ s. Câest une de ses graË ces. Un reËve dâautonomie absolue ou` lâindividu ne rend de comptes quâa` lui-meËme viole la veÂŽ riteÂŽ de la nature humaine et engendre une cruelle solitude. Il fait peser sur les plus petits une exigence inaccessible et douloureuse. Lâhomme est un animal politique. Il a besoin dâinteragir avec ses semblables, de construire avec eux une socieÂŽ teÂŽ juste ou` chacun peut sâeÂŽpanouir. Chacun de nous a besoin dâeË tre reconnu par les autres comme personne libre. Il a besoin dâaimer et dâeË tre aimeÂŽ . Sa raison le pousse au dialogue indispensable a` la deÂŽcouverte dâune veÂŽ riteÂŽ universelle. Lâhomme est aussi un eËtre de langage. Il a besoin de communiquer avec les autres, de raconter son existence pour se forger une identiteÂŽ . Lâhomme a besoin dâune culture qui lui permet dâaffirmer ses valeurs et de chercher le vrai, le bon, le beau. Il est essentiel que les projets dâaide au deÂŽveloppement comportent aussi des volets de deÂŽfense de la culture des peuples consideÂŽ reÂŽ s. Chaque culture, meËme si elle a besoin de passer par un discernement pour eË tre libeÂŽreÂŽe de ses eÂŽ leÂŽ â ments de peÂŽcheÂŽ , est porteuse de treÂŽsors pour lâhumaniteÂŽ . LâeÂŽchange culturel, favoriseÂŽ par la mondialisation, est une taË che essentielle pourvu quâil ne se transforme pas en heÂŽgeÂŽ â monie dâune culture sur les autres. Ce besoin dâinteraction est speÂŽcialement sensible chez les plus petits, chez ceux que les drames de la vie privent de lâutilisation normale des moyens de la vie sociale. Câest toujours lâoccasion dâune joie pour tous chaque fois que nous associons les plus faibles a` nos cercles. Lâhomme est aussi un animal religieux. Ouvert a` la transcendance, il a besoin pour lâexprimer de symboles, de rites, de liturgie. Or il nâexiste pas de symbole ou de rite priveÂŽ . Le rite et le symbole supposent une communaute ÂŽ qui se rassemble en eux. Une des eÂŽ tymologies proposeÂŽes de religion » renvoie a` relier ». La religion est la` pour rassembler les hommes, leur donner conscience de leur interdeÂŽpendance et la vivre dans la fraterniteÂŽ . Mais il faut pour cela que les religions sâouvrent encore davantage au dialogue. Lâambition de la laıšciteÂŽ est de contribuer a` la paix sociale en respectant chaque religion dans sa croyance et dans son rite et en conduisant les religions ou courants de penseÂŽe a` cohabiter sereinement au sein de la socieÂŽteÂŽ . Ce besoin aussi est universel. La religion suppose une reÂŽflexion rationnelle, mais elle ne peut eË tre lâaffaire dâun cercle dâinitieÂŽ s. JeÂŽsus a aimeÂŽ parler aux exclus de la socieÂŽteÂŽ et deÂŽmontreÂŽ que ces hommes et ces femmes rejeteÂŽs eÂŽtaient aptes a` le suivre. Nos communaute ÂŽs auront a` coeur de devenir des lieux ou` le petit se sent chez AppelĂ©s Ă la fraternitĂ©LâinterdĂ©pendance est dâabord une chance. Elle donne Ă chacun la possibilitĂ© de sâappuyer sur tous les autres. Mais comme toute rĂ©alitĂ© humaine, elle est marquĂ©e par le pĂ©chĂ©. Cette interdĂ©pendance de fait demande Ă ĂȘtre amĂ©nagĂ©e par la libertĂ© de lâhomme. Il dĂ©pend de nous dâen faire une situation dâaliĂ©nation ou au contraire lâoccasion dâune fraternitĂ©. Notre Ă©poque nous donne dâextraordinaires outils pour construire cette fraternitĂ©. La mondialisation rend plus visibles et plus rapides les liens de dĂ©veloppement entre les rĂ©gions du monde. Les moyens de communication sociale permettent dâinteragir rapidement avec des personnes situĂ©es Ă lâautre bout du monde. Cela permet dâimmenses campagnes de mobilisation pour venir en aide Ă une rĂ©gion touchĂ©e par une catastrophe. Nous avons vu des chaĂźnes mondiales de solidaritĂ©, par exemple pour notre pays aprĂšs les attentats du 13 novembre 2015. La fraternitĂ© nâest pas un vain mot, elle se vit au quotidien de mille parce que lâhomme reste marqueÂŽ par le scandale du mal, notre eÂŽpoque voit aussi de formidables menaces contre la fraterniteÂŽ. Le progre`s est aussi heÂŽlas le progre`s du mal. La mondialisation concerne aussi le crime. Il faut citer dâabord la violence terroriste, qui est devenue internationale et qui se pare a` nouveau de lâexcuse de la religion, comme si Dieu pouvait eËtre un Dieu de mort et non de vie. Lâattentat suicide est un sommet de deÂŽviance de la religion, puisquâau meurtre il ajoute le suicide honteusement regardeÂŽ comme martyre. Il faut se reÂŽjouir de toutes les occasions qui sont veÂŽcues de rejeter cette idolaË trie de la violence. Il y a le fleÂŽau du crime organiseÂŽ , qui tue et exploite par la prostitution ou lâembrigadement dans les reÂŽseaux du crime, en particulier dans certaines reÂŽgions du monde. Il sâaccompagne du trafic mondial de drogue avec son corte`ge de mise` re et de violence. Au Mexique et ailleurs, plusieurs preËtres ont payeÂŽ de leur vie la deÂŽnonciation de ce scandale. Il y a le deÂŽveloppement industriel non controË leÂŽ qui pollue la plane`te et rend malade les populations, speÂŽcialement dans les pays eÂŽmergents. Les ineÂŽ galiteÂŽs se sont terriblement creuseÂŽ es, entre individus et entre reÂŽgions du monde. Nous continuons a` admettre en pratique que les uns se sentent plus humains que les autres, comme sâils eÂŽtaient neÂŽs avec de plus grands droits » Laudato Siâ, 90. Il y a les attentats contre la vie, avortement et euthanasie, preÂŽsenteÂŽs comme droits. Le sort reÂŽserveÂŽ aux femmes et aux enfants doit progresser encore partout dans le monde. Nous nous reÂŽjouissons des reÂŽcentes prises de conscience contre le harce`lement sexuel. Les femmes qui ont eÂŽteÂŽ pousseÂŽes a` lâavortement doivent beÂŽneÂŽ â ficier dâun accompagnement miseÂŽricordieux pour les aider a` surmonter la deÂŽ tresse qui accompagne souvent cet acte terrible. LâEÂŽ glise catholique sâest lanceÂŽ e, y compris en France, dans un chantier de peÂŽnitence et de reÂŽformes pour combattre les abus sexuels. Ces fleÂŽaux, dont la liste nâest pas exhaustive, nous appellent a` construire ensemble la fraterniteÂŽ . Mais la graviteÂŽ de ces drames ne doit pas conduire au deÂŽsespoir. Tout nâest pas perdu, parce que les eË tres humains, capables de se deÂŽgrader a` lâextreËme, peuvent aussi se surmonter, opter de nouveau pour le bien et se reÂŽgeÂŽneÂŽrer » Laudato Si, 205. Les chreÂŽ â tiens sauront eË tre exemplaires, la` ou` ils sont, avec les moyens qui sont les leurs, dans leur construction de cette fraterniteÂŽ . Elle commence par des gestes simples. Lâentraide en famille, les activiteÂŽ s de paroisse comme les maraudes ou les vestiaires solidaires, sont un vrai fondement de la solidariteÂŽ. MeËme sâils ne remplacent pas des politiques publiques responsables, ce sont ces petits moyens, multiplieÂŽ s partout, qui font reculer la mise` re. Ils ont aussi lâavantage de deÂŽmontrer que nul nâest trop faible ou trop petit pour participer a` lâeffort de fraterniteÂŽ . Seul un esprit de pauvrete ÂŽ permet de combattre la pauvreteÂŽ . Les reÂŽseaux sociaux manifestent lâambivalence de la situation. UtiliseÂŽ s raisonnablement, ils manifestent lâinterdeÂŽpendance et permettent des mobilisations rapides a` travers la plane` te. Mais laisseÂŽs a` eux-meËmes, veÂŽcus dans une sorte dâaddiction, ils enferment dans des relations virtuelles qui sont au fond la pire des solitudes et ils deÂŽtournent de veÂŽritables activiteÂŽ s fraternelles. Ils risquent aussi dâenfermer chacun dans des cercles qui pensent comme lui, rendant le dialogue La sexualitĂ©, lieu du don de soi Dieu crĂ©a lâhomme Ă son image, Ă lâimage de Dieu il le crĂ©a, il les crĂ©a homme et femme » Gn 1, 27. La diffĂ©rence sexuelle est la premiĂšre altĂ©ritĂ© de lâhumanitĂ©, celle qui fonde toutes les autres. La diffĂ©rence sexuelle nâest pas une convention sociale quâon pourrait réérire Ă son grĂ©, elle appartient Ă la nature humaine. Son respect est essentiel pour la construction dâun ordre social Ă©quilibrĂ©. Mais les deux sexes ont Ă©tĂ© créés pour vivre dans la communion, le respect et lâĂ©galitĂ©. Il faut que partout dans le monde se poursuivent les efforts de libĂ©ration de la femme, pour son accĂšs aux droits civiques, Ă la libertĂ© de mariage, Ă lâemploi avec un salaire Ă©gal. Toute forme de violence faite aux femmes est inacceptable, y compris lâexcision et les autres formes de mutilation. Lâaugmentation du nombre de femmes participant a` la vie publique sera une chance pour tous. La diffĂ©rence sexuelle ouvre Ă la sexualitĂ©. Chaque sexe est tournĂ© vers lâautre. VĂ©cue en vĂ©ritĂ©, la sexualitĂ© est un lieu spĂ©cial de don de soi, dâamour et de libertĂ©. Par nature ouverte Ă lâaccueil de la vie, elle est le lieu oĂč lâhomme et la femme vivent ensemble leur image de Dieu. Puisque Dieu est en mĂȘme temps le CrĂ©ateur, la fĂ©conditĂ© du couple humain est lâimageââ vivante et efficace, un signe visible de lâacte crĂ©ateur » Amoris Laetitia, 10. La sexualitĂ© chante aussi particuliĂšrement la beautĂ© du corps humain. Mais le pĂ©chĂ© originel a dĂ©formĂ© la sexualitĂ© en la transformant en lieu de dĂ©sir effrĂ©nĂ© et de domination Ton dĂ©sir te portera vers ton mari, et celui-ci dominera sur toi » Gn 3, 16. Cette dĂ©formation se manifeste aujourdâhui avec le rĂšgne de la pornographie prĂ©sentĂ©e comme une norme et promesse de bonheur qui dĂ©stabilise les plus jeunes. En rĂ©alitĂ©, toute personne humaine porte le dĂ©sir dâune relation stable avec un partenaire aimeÂŽ pour lui-meËme. Il existe dans la famille humaine une diversitĂ© dâinclinations sexuelles. Il ne faut pas discriminer les personnes violences physiques ou verbales contre elles sont intolĂ©rables. LâĂglise catholique invite Ă les accueillir et les accompagner dans leur chemin vers Dieu. Mais il nâest pas possible de mettre les relations homosexuelles sur le mĂȘme plan que la relation de lâhomme et de la FĂ©conditĂ© et familleLâenfant est comme lâincarnation de lâamour de ses parents. Il ouvre celui-ci Ă une nouvelle dimension et leur donne la joie dâĂȘtre Ă©ducateurs dâune libertĂ©. Il leur fournit lâoccasion de donner le meilleur dâeux-mĂȘmes dans lâensemble des soins quâils lui prodiguent. Il offre Ă leur libertĂ© un champ dâaction particuliĂšrement beau. Lâenfant est don de Dieu. Toute naissance est une occasion dâaction de grĂąces. Les couples qui ne peuvent pas avoir dâenfant ont besoin dâĂȘtre accompagnĂ©s pour quâils puissent dĂ©couvrir quâil existe dâautres fĂ©conditĂ©s. Mais lâenfant ne saurait ĂȘtre un droit ouvrant Ă des technologies toujours plus sophistiquĂ©es qui sâaccompagnent de destruction dâembryons. Lâannonce chrĂ©tienne qui concerne la famille est vraiment une bonne nouvelle. JĂ©sus est nĂ© dans une famille, câest lĂ dâabord quâil a vĂ©cu son incarnation, offrant Ă toutes les familles une grĂące spĂ©ciale. La fĂ©conditĂ© du couple fonde la famille. Celle-ci est le premier cercle de lâinterdĂ©pendance des hommes. Elle dĂ©ploie une intimitĂ© trĂšs particuliĂšre. Pour les enfants, elle est le premier lieu oĂč dĂ©couvrir la valeur de la solidaritĂ©. En particulier, les enfants se dĂ©couvrent en dette de la vie vis-Ă -vis de leurs parents et la fraternitĂ© de sang est la premiĂšre de toutes les fraternitĂ©s. Les parents ont une spĂ©ciale responsabilitĂ© dans lâĂ©ducation des enfants et doivent pour cela bĂ©nĂ©ficier dâune vraie libertĂ©, en particulier dans le choix de la scolaritĂ©. La sociĂ©tĂ© doit aider les parents mais nâa pas Ă se substituer Ă eux dans la mission dâĂ©ducation. Pendant des millĂ©naires, la pente de lâhumanitĂ© a Ă©tĂ© dâavoir des enfants pour se survivre. La foi en la RĂ©surrection nous a libĂ©rĂ©s de cette nĂ©cessitĂ©. JĂ©sus vient transformer les familles pour les faire devenir une communion de personnes unies dans le respect et dans lâamour. La famille est le premier cercle de la sociĂ©tĂ©. Il est essentiel Ă la bonne santĂ© des sociĂ©tĂ©s quâelles favorisent la famille. Les communautĂ©s catholiques sont invitĂ©es Ă devenir des lieux oĂč` les familles se sentent chez elles, accompagnĂ©es dans leurs joies, soutenues dans leurs difficultĂ©s. Il faut que les politiques publiques soutiennent les familles, que les infrastructures collectives les aident Ă vivre avec des places en crĂšche suffisantes par exemple, que les mĂšres au travail soient aidĂ©es. Notre Ă©poque voit un nombre grandissant de familles blessĂ©es. Les communautĂ©s catholiques auront Ă cĆur dâaccompagner ces situations, sans jugement, avec misĂ©ricorde, en voyant oĂč en sont les personnes et en rendant grĂące pour les trĂ©sors de charitĂ© qui se vivent souvent dans ces situations L'unique famille humaineCréée par Dieu pour ĂȘtre rassemblĂ©e dans la charitĂ© par le Christ, unie par des liens de sang autant que par des liens spirituels Ă©manant des cultures, lâhumanitĂ© est une seule famille appelĂ©e Ă vivre la fraternitĂ© et la solidaritĂ©. Elle en est capable malgrĂ© les dĂ©fis qui la menacent. Chacun, Ă sa place et avec les moyens qui sont les siens, par JĂ©sus-Christ, peut contribuer Ă cette tĂąche. Personne nâest en trop dans lâoeuvre de fraternitĂ©. Cela se vit dâabord dans les familles qui sont le premier lieu oĂč apprendre la solidaritĂ©. La famille doit donc ĂȘtre dĂ©fendue contre les attaques des idĂ©ologies. LâĂglise souhaite prendre sa part dans cette dĂ©fense et cet accompagnement des familles pour leur donner de vivre cette fraternitĂ©. Mais la famille est destinĂ©e Ă sâouvrir Ă plus grand quâelle. La solidaritĂ© doit atteindre les limites de lâhumanitĂ©. Ă lâheure de la mondialisation, il est plus mortifĂšre que jamais de rĂȘver que chaque nation se replie sur elle-mĂȘme en cherchant lâautarcie. Aucune nation ne peut plus trouver en elle les moyens de faire face aux dĂ©fis du temps. Les menaces contre lâhumanitĂ© appellent une rĂ©ponse commune. La voie du dialogue et de la coopĂ©ration internationale est la seule possible. A fortiori, les diverses discriminations qui divisent lâhumanitĂ© en dĂ©signant des sous-hommes sont intolĂ©rables. Chaque personne humaine a le droit de trouver sa place dans la famille humaine. Luttons pour que chaque homme soit reconnu comme un a créé lâhomme Ă son image et ressemblance pour se lâunir dans lâamour. Il en a fait une personne relationnelle comme Lui, il lâa créé beau, libre, apte Ă la vĂ©ritĂ©, constituant une seule famille interdĂ©pendante appelĂ©e Ă la fraternitĂ©. Il lâa appelĂ© Ă lâamour. Chacun dâentre nous, Ă©coutant sa conscience et aidĂ© par Dieu, se verra capable de dĂ©ployer cette fraternitĂ© envers tous. En particulier en pensant prĂ©fĂ©rentiellement aux plus petits. Câest le chemin du bonheur. JĂ©sus-Christ est mort et ressuscitĂ© pour bĂ©nir et fortifier cet effort et associer lâhomme au salut. Finalement, au dernier jour JĂ©sus vaincra la mort et rassemblera en lui toute la crĂ©ation et tous ceux qui lâauront acceptĂ© en le confessant ou en suivant leur conscience. Câest notre vocation ultime, qui porte toutes les autres. En aimant, [le chrĂ©tien] devient lui-mĂȘme un membre, et il est insĂ©rĂ© par lâamour dans lâunitĂ© du corps du Christ et il y aura un seul Christ sâaimant lui-mĂȘme » Saint Augustin, Commentaire de la premiĂšre ĂpĂźtre de saint Jean, X, 3. Postface de Mgr Batut Quâest-ce que lâhomme dans la nature ? » Quâest-ce que lâhomme dans la nature ? Un nĂ©ant Ă lâĂ©gard de lâinfini, un tout Ă lâĂ©gard du nĂ©ant, un milieu entre rien et tout. » La cĂ©lĂšbre rĂ©flexion de Pascal rejoint dans son dĂ©but lâinterrogation du psaume 8, mais elle la prolonge avec lâaccent dĂ©jĂ contemporain dâune humanitĂ© qui nâose plus croire que quelquâun pense Ă elle. Mesurant plus que jamais, grĂące aux progrĂšs des sciences, lâimmensitĂ© de lâunivers qui lâentoure, ce milieu entre rien et tout » sâapprĂ©hende lui-mĂȘme sur fond dâangoisse existentielle plutĂŽt comme un nĂ©ant que comme un tout â une poussiĂšre dâĂ©toiles » selon le mot dâHubert Reeves. Mais lorsque cette mĂȘme humanitĂ© regarde le microcosme oĂč elle vit, elle sâaperçoit que loin de grandir en humilitĂ© en rĂ©flĂ©chissant sur elle-mĂȘme, elle nâa cessĂ© dâagir avec dĂ©mesure au point dâĂ©puiser les ressources de la maison commune »[1] oĂč elle a Ă©tĂ© placĂ©e depuis la rĂ©volution industrielle, dans son dĂ©sir insatiable de profit et de confort, lâhomme est devenu un danger pour son environnement. DĂ©sorientĂ© et perdu Ă lâĂ©chelle de lâunivers, il doute de lui-mĂȘme Ă lâĂ©chelle de son milieu vital, jusquâĂ douter de lâopportunitĂ© de prolonger son existence. Quâest-ce que lâhomme ? Un prĂ©dateur et un meurtrier qui nâest pas digne de vivre, affirment certains aujourdâhui. Par avance pourtant, la Parole de Dieu a mis lâhomme en garde contre sa dĂ©mesure, tout en le rassurant devant sa petitesse. Le choix de Dieu, dans sa toute-puissance et son Ă©ternitĂ©, a Ă©tĂ© de crĂ©er lâunivers. Au sein de sa crĂ©ation, il a voulu entrer en alliance avec un ĂȘtre dans lequel est imprimĂ©e sa propre image. Et, pour parachever cette alliance, il a voulu connaĂźtre la vie de cet ĂȘtre de la naissance Ă la mort, afin de le racheter de la mort et de lui communiquer sa propre vie. La question du psaume quâest-ce que lâhomme pour que tu penses Ă lui ? » retrouve dans le Christ toute sa pertinence et dĂ©bouche sur un Ă©tonnement Ă©merveillĂ© Tu lâas voulu un peu moindre quâun dieu, le couronnant de gloire et dâhonneur ! Tu lâĂ©tablis sur les Ćuvres de tes mains, tu mets toutes choses Ă ses pieds ! » Le pouvoir de lâhomme sur la nature, envers de lâhumilitĂ© de sa condition, nâest pas un pouvoir discrĂ©tionnaire. Câest une gĂ©rance, une intendance â mieux une mission, celle de parachever lâĆuvre de Dieu. En comprenant cela, nous percevons la signification de lâunivers. Dans le Christ, rĂ©vĂ©lateur du PĂšre, nous dĂ©couvrons que le cosmos a Ă©tĂ© voulu paternellement et que son accomplissement ne peut ĂȘtre que filial. Lâalliance nouĂ©e avec lâhumanitĂ© nous apparaĂźt comme la transposition dans le temps de lâĂ©change Ă©ternel du PĂšre et du Fils. La vie terrestre de JĂ©sus devient le paradigme de cette vie filiale et fraternelle qui dĂ©ploie jusquâau bout en nous le goĂ»t de vivre, la joie dâhabiter cette terre et de contribuer, en y vivant la charitĂ©, Ă la faire passer en Dieu. Elle passe, certes, la figure de ce monde dĂ©formĂ©e par le pĂ©chĂ© ; mais, nous lâavons appris, Dieu nous prĂ©pare une nouvelle terre oĂč rĂ©gnera la justice et dont la bĂ©atitude comblera et dĂ©passera tous les dĂ©sirs de paix qui montent au cĆur de lâhomme. Alors, la mort vaincue, les fils de Dieu ressusciteront dans le Christ⊠La charitĂ© et ses Ćuvres demeureront et toute cette crĂ©ation que Dieu a faite pour lâhomme sera dĂ©livrĂ©e de lâesclavage[2]. » La foi chrĂ©tienne nâen est quâĂ ses dĂ©buts. Et pour dire lâamour de Dieu, lâĂ©ternitĂ© sera courte. [1] Pape François, encyclique Laudato sĂŹ sur lâĂ©cologie Notre maison commune est comme une sĆur, avec laquelle nous partageons lâexistence, et comme une mĂšre, belle, qui nous accueille Ă bras ouverts. » [2] Vatican II, Constitution Gaudium et Spes sur lâĂglise dans le monde de ce temps, 39.LavĂ©ritĂ© est une valeur de la connaissance, relevant du domaine de la science ; la notion de devoir est une valeur de lâexistence, relevant du domaine de la morale ou de lâĂ©thique. Donc lâidĂ©e dâun devoir de chercher la vĂ©ritĂ© peut paraĂźtre Ă©trange, dâautant quâon recherche la vĂ©ritĂ© en science et ailleurs. Il y a un RĂ©sumĂ© Index Plan Texte Bibliographie Notes Citation Auteur RĂ©sumĂ© La rĂ©flexion spinoziste sur la vĂ©ritĂ© dĂ©gage deux propriĂ©tĂ©s de lâidĂ©e vraie â lâadaequatio et la convenientia â dont lâarticulation exacte pose quelques difficultĂ©s dâinterprĂ©tation. Le problĂšme principal consiste Ă savoir si ces deux propriĂ©tĂ©s renvoient Ă deux thĂ©ories de la vĂ©ritĂ© qui sâopposent vĂ©ritĂ©-cohĂ©rence et vĂ©ritĂ©-correspondance ou Ă deux aspects qui se complĂštent dâune façon harmonieuse dans une seule conception de la vĂ©ritĂ©. Lâobjectif de cet article est de prĂ©senter quelques remarques qui soutiennent la seconde option et Ă©clairent lâoriginalitĂ© de la conception spinoziste de la vĂ©ritĂ©. Haut de page EntrĂ©es dâindex Haut de page Texte intĂ©gral 1Dans cet article, je voudrais prĂ©senter quelques remarques sur le problĂšme de la vĂ©ritĂ© chez Spinoza. NĂ©anmoins, il faut dâabord prĂ©ciser que sous la rubrique problĂšme de la vĂ©ritĂ© », il se trouve en rĂ©alitĂ© un ensemble de questions distinctes bien quâessentiellement liĂ©es entre elles. Par problĂšme de la vĂ©ritĂ© » on doit dâabord comprendre le problĂšme qui porte sur la dĂ©termination de la nature ou essence de la vĂ©ritĂ©. Il sâagit de rĂ©pondre Ă la question 1 sur la signification du terme vĂ©ritĂ© ». Ensuite, il sâagit de poser les questions qui portent sur les conditions de possibilitĂ© de la vĂ©ritĂ©, câest-Ă -dire de rĂ©pondre aux questions suivantes 2 Etant donnĂ©e la dĂ©finition de la vĂ©ritĂ©, quelles conditions gĂ©nĂ©rales, du point de vue de lâabsolu, doivent ĂȘtre remplies pour quâil y ait des idĂ©es vraies ? 3 Ensuite, quelles conditions particuliĂšres doivent ĂȘtre remplies pour que nous, du point de vue de lâĂąme humaine, ayons des idĂ©es vraies ? 4 Finalement, quelles conditions doivent ĂȘtre remplies pour que nous sachions que nous avons des idĂ©es vraies, câest-Ă -dire pour que nous puissions reconnaĂźtre les idĂ©es vraies et les distinguer de celles qui sont fausses ? Câest le problĂšme du critĂšre de vĂ©ritĂ©. 2Lâordre des ces questions nâest pas fortuit. En effet, il semble bien que pour rĂ©pondre aux questions 2, 3 et 4, il nous faut dâabord rĂ©pondre Ă celle qui porte sur la nature de la vĂ©ritĂ©, puisque câest cette rĂ©ponse qui nous permettra de dĂ©terminer le sens prĂ©cis Ă apporter aux mots vrai » et vĂ©ritĂ© » prĂ©sents dans ces questions. 3NĂ©anmoins, la liaison entre elles, surtout entre la premiĂšre et la derniĂšre, nâest pas dĂ©pourvue dâune certaine tension interne. Selon certains philosophes, par exemple Russell et Popper, nous devons distinguer soigneusement lâinvestigation qui porte sur la dĂ©finition de la vĂ©ritĂ© de celle qui concerne le critĂšre de vĂ©ritĂ©, et nous ne devons pas espĂ©rer que cette dĂ©finition nous apporte un critĂšre pour reconnaĂźtre la vĂ©ritĂ© dâun jugement donnĂ©. Selon eux, la premiĂšre question est complĂštement indĂ©pendante de la derniĂšre. Dâautres, par exemple les pragmatistes et Dummet, soutiennent que toute recherche sur le concept de vĂ©ritĂ© resterait vide si elle nâĂ©tait pas susceptible de nous montrer comment nous pouvons reconnaĂźtre la vĂ©ritĂ© dâun jugement donnĂ©. Pour eux, la rĂ©ponse Ă apporter Ă la premiĂšre question dĂ©pend de la prise en considĂ©ration de lâexigence exprimĂ©e par la derniĂšre. 1 Il [Cherbury] examine ce que câest que la vĂ©ritĂ© ; et pour moi, je nâen ai jamais doutĂ©, me sembl ... 4Mais que la question concernant la dĂ©termination de la nature de la vĂ©ritĂ© soit considĂ©rĂ©e comme un problĂšme », voilĂ qui a quelque chose de problĂ©matique ou de paradoxal en soi. En effet, si nous ne savions pas dâemblĂ©e ce quâest la vĂ©ritĂ©, comment pourrions-nous lâapprendre ? Quelles raisons aurions-nous dâaccepter une certaine dĂ©finition parmi les diverses dĂ©finitions possibles ? Bref, comment trouverions-nous la vraie dĂ©finition de la vĂ©ritĂ© ? Ce problĂšme a Ă©tĂ© posĂ© par Descartes dans une lettre bien connue adressĂ©e Ă Mersenne le 16 octobre 1639. Descartes y affirme que la notion de vĂ©ritĂ© est si transcendantalement claire, quâil est impossible de lâignorer »1. Sa solution pour ce problĂšme consiste Ă affirmer que nous avons une connaissance naturelle » de la notion de vĂ©ritĂ©, dĂ©finie nominalement par la conformitĂ© de la pensĂ©e avec lâobjet. Pour lui, donc, le problĂšme de la vĂ©ritĂ© » renvoie essentiellement au problĂšme qui consiste Ă trouver et Ă fonder un critĂšre de vĂ©ritĂ©, le sens du terme vĂ©ritĂ© », quant Ă lui, Ă©tant tout Ă fait clair et naturellement donnĂ© Ă lâesprit. 5On peut Ă©videmment accorder Ă Descartes que si nous nâavions pas une comprĂ©hension naturelle du sens de la vĂ©ritĂ©, comprĂ©hension Ă laquelle nous pouvons et devons faire appel pour nous guider dans notre investigation, nous resterions dans un vide conceptuel qui ne pourrait ĂȘtre rempli que par un choix arbitraire parmi les multiples dĂ©finitions possibles. NĂ©anmoins, on nâest pas forcĂ© de croire que cette connaissance naturelle soit aussi transcendantalement claire quâelle semble lâĂȘtre pour Descartes, ni non plus quâelle Ă©puise le contenu du concept de vĂ©ritĂ©. On peut trĂšs bien soutenir que ce que nous connaissons naturellement de la vĂ©ritĂ© et que nous expliquons quid nominis, câest-Ă -dire la dĂ©finition nominale de la vĂ©ritĂ©, ne porte que sur la propriĂ©tĂ© ou dĂ©nomination extrinsĂšque de lâidĂ©e vraie et que cette dĂ©finition, correspondant Ă un niveau encore superficiel de la rĂ©flexion sur lâidĂ©e vraie, ne fournit que le point de dĂ©part pour une recherche plus approfondie sur la nature de la vĂ©ritĂ©. 6Tout se passe comme si cette dĂ©finition nâĂ©tait quâun instrument naturel premier, encore partiel et imparfait, Ă lâaide duquel lâĂąme, par un mouvement rĂ©flexif, pourrait progresser dans le sens dâun approfondissement de la comprĂ©hension de la forme de lâidĂ©e vraie. Or, cet effort rĂ©flexif, ce questionnement qui porte sur le concept mĂȘme de vĂ©ritĂ©, soit pour prĂ©ciser Ă quoi il sâapplique, soit pour en dĂ©gager dâautres dĂ©terminations que celle apportĂ©e par la dĂ©finition nominale, nous semble sâaccorder avec la dĂ©marche effective de la pensĂ©e spinoziste. Tout au long de son Ćuvre, du Court TraitĂ© et du TraitĂ© de la RĂ©forme de lâEntendement Ă lâĂthique, Spinoza examine de façon critique la conception de la vĂ©ritĂ© comme correspondance, afin dâexpliciter non seulement ses conditions de possibilitĂ©, mais aussi et surtout, de la complĂ©ter avec une propriĂ©tĂ© ou dĂ©nomination intrinsĂšque qui permette, dâune part, dâexpliquer que nous puissions savoir avec certitude que nous avons des idĂ©es vraies, et, dâautre part, de fournir Ă la perspective Ă©thique un principe explicatif de la supĂ©rioritĂ© interne du sage sur lâignorant. 2 Cf. chap. XV, deuxiĂšme partie. GI/78 G » renverra toujours Ă Spinoza Opera, Ă©d. Carl Gebhardt, 5 ... 7En effet, la simple correspondance entre la pensĂ©e et son objet nâest pas capable dâapporter une rĂ©ponse satisfaisante aux trois questions qui fournissent le fil conducteur de lâinvestigation spinoziste sur la vĂ©ritĂ©, et qui sont formulĂ©es de la façon suivante aussi bien dans le Court TraitĂ©2 que dans lâĂthique 3 Ăthique II, Proposition XLIII, scolie. GII/124. Si une idĂ©e vraie, en tant quâelle est dite seulement sâaccorder avec ce dont elle est lâidĂ©e, se distingue dâune fausse, une idĂ©e vraie ne contient donc aucune rĂ©alitĂ© ou perfection de plus quâune fausse puisquâelles se distinguent seulement par une dĂ©nomination extrinsĂšque, et consĂ©quemment un homme qui a des idĂ©es vraies ne lâemporte en rien sur celui qui en a seulement des fausses ? Puis dâoĂč vient que les hommes ont des idĂ©es fausses ? Et enfin, dâoĂč quelquâun peut-il savoir avec certitude quâil a des idĂ©es qui conviennent avec leurs objets ?3 8Parmi ces trois questions, la premiĂšre, bien quâĂ©tant sĂ»rement celle oĂč se manifeste la fin ultime qui dirige la pensĂ©e de Spinoza, ne nous concernera pas directement ici. Cela signifie que nous nâallons pas examiner les effets de lâexigence Ă©thique sur la dĂ©termination du concept de vĂ©ritĂ© chez Spinoza. Parmi les deux autres questions, câest surtout celle concernant la possibilitĂ© de savoir avec certitude que nous avons des idĂ©es vraies qui doit retenir notre attention. En effet, celle-ci renvoie au problĂšme du critĂšre de vĂ©ritĂ© et câest elle qui, dans un rapport de tension avec la dĂ©termination prĂ©alablement donnĂ©e de la nature de la vĂ©ritĂ©, met en marche lâapprofondissement de la rĂ©flexion concernant la forme de lâidĂ©e vraie. 9La rĂ©ponse Ă ces questions repose sur lâintroduction de la dĂ©nomination intrinsĂšque de lâidĂ©e vraie, câest-Ă -dire sur la notion spinoziste dâadaequatio. Câest cette notion qui permet dâexpliquer que la vĂ©ritĂ© soit norme dâelle-mĂȘme et du faux, et qui exclut le recours Ă une marque ou Ă un signe extrinsĂšque qui serait nĂ©cessaire pour nous faire reconnaĂźtre cette vĂ©ritĂ© ; câest elle qui fonde lâidentification spinoziste entre lâidĂ©e vraie et la certitude et qui explique quâune idĂ©e vraie ait plus de rĂ©alitĂ© quâune fausse. 10Lâinvestigation de Spinoza nous met ainsi devant deux aspects de lâidĂ©e vraie, lâun intrinsĂšque et lâautre extrinsĂšque. Tout le problĂšme consiste Ă savoir si entre ces deux aspects il y a tension, contradiction ou complĂ©mentaritĂ© harmonieuse. Y a-t-il chez Spinoza deux thĂ©ories de la vĂ©ritĂ© qui sâopposent ou deux aspects qui se complĂštent dans une conception consistante de la vĂ©ritĂ© ? La rĂ©ponse Ă ces questions partage les interprĂštes du spinozisme. 11Certains soutiennent quâil y a dans lâĂthique une coexistence harmonieuse entre la conception de la vĂ©ritĂ© comme correspondance et celle de la vĂ©ritĂ© comme cohĂ©rence, liĂ©e Ă la notion spinoziste dâadaequatio. Ainsi, R. Landim affirme 4 R. Landim, La notion de vĂ©ritĂ© dans lâĂthique de Spinoza », in Groupe de recherches spinozistes n ... Ces questions posĂ©es par la dĂ©finition de la vĂ©ritĂ© trouvent dans lâĂthique de Spinoza une rĂ©ponse aussi subtile quâoriginale. Dans lâĂthique les deux thĂ©ories de la vĂ©ritĂ© coexistent. Si la vĂ©ritĂ© est en premier lieu correspondance, câest par une sorte de cohĂ©rence que la vĂ©ritĂ© sâimpose Ă lâhomme comme correspondance4. 12Dâautres, comme F. AlquiĂ©, ont insistĂ© sur le caractĂšre conflictuel de cette coexistence. Il parle dâune certaine tension inhĂ©rente au concept spinoziste de la vĂ©ritĂ© », tension qui renvoie Ă la difficultĂ© de concilier les trois affirmations suivantes 5 F. AlquiĂ©, Le Rationalisme de Spinoza, PUF, coll. ĂpimĂ©thĂ©e, Paris, 1981, p. 212. [1] La vĂ©ritĂ© est intĂ©rieure Ă la pensĂ©e, et se dĂ©finit, non par son rapport avec la chose, mais par une dĂ©nomination intrinsĂšque ; [2] la vĂ©ritĂ© est sa propre marque, son propre signe, et celui qui possĂšde une idĂ©e vraie ne peut douter de sa vĂ©ritĂ© ; [3] la vĂ©ritĂ©, malgrĂ© les deux caractĂšres prĂ©cĂ©dents, est accord de lâidĂ©e et de la chose5. 6 Ce sont ceux, comme S. Hampshire ou H. Joachim, qui considĂšrent que Spinoza soutient exclusivement ... 7 Ce sont ceux, comme E. Curley ou J. Bennett, pour lesquels Spinoza adopte exclusivement la concepti ... 13Dâautres encore, face Ă cette tension et dĂ©sespĂ©rant de la rĂ©soudre, ont choisi de la supprimer en privilĂ©giant exclusivement soit les passages de Spinoza qui vont dans le sens de deux premiĂšres affirmations, interprĂ©tĂ©es comme exprimant une certaine version de la thĂ©orie de la vĂ©ritĂ© comme cohĂ©rence6, soit les passages qui vont dans le sens de la derniĂšre affirmation, assimilĂ©e Ă la thĂ©orie de la vĂ©ritĂ© comme correspondance7. 14Bien entendu, le procĂ©dĂ© qui consiste Ă supprimer la tension par lâĂ©limination dâun de ses termes nâest pas lĂ©gitime ici. Il le serait si lâon pouvait montrer que ces affirmations renvoient Ă des moments diffĂ©rents de la pensĂ©e de lâauteur, câest-Ă -dire si lâon pouvait dissoudre la tension dans la considĂ©ration de lâĂ©volution de la pensĂ©e de Spinoza. Mais tel nâest pas le cas puisque cette tension est prĂ©sente aussi bien dans le Court TraitĂ©, que dans le TraitĂ© de la rĂ©forme de lâentendement et dans lâĂthique. Ainsi, ou bien il est possible de rĂ©soudre conceptuellement cette tension, ou bien il faut avouer quâelle renvoie Ă une conception incohĂ©rente de la vĂ©ritĂ©. 8 En particulier, il nâest pas possible de dĂ©velopper ici lâanalyse dĂ©taillĂ©e de la notion dâidĂ©e adĂ© ... 15Dans cette Ă©tude, mon objectif est de prĂ©senter quelques remarques qui permettent de soutenir la premiĂšre de ces deux options. Il me semble quâil nây a pas nĂ©cessairement dâexclusion mutuelle entre la thĂ©orie de la vĂ©ritĂ© comme cohĂ©rence et celle de la vĂ©ritĂ© comme correspondance, mais plutĂŽt un rapport de complĂ©mentaritĂ©. Jâessaierai de montrer que lâoriginalitĂ© de Spinoza consiste prĂ©cisĂ©ment Ă supprimer cette fausse opposition et Ă faire de lâadaequatio et de la convenientia deux aspects complĂ©mentaires du concept de vĂ©ritĂ©. LâidĂ©e vraie, pour ĂȘtre pleinement vraie, doit satisfaire Ă une double condition ĂȘtre adĂ©quate cohĂ©rente et sâaccorder avec son objet. Sans pouvoir examiner ici la totalitĂ© des aspects enveloppĂ©s dans cette question8, je prĂ©tends seulement indiquer quelques Ă©lĂ©ments qui, permettant dâĂ©liminer la tension signalĂ©e par F. AlquiĂ©, rendent possible cette complĂ©mentaritĂ© et illuminent lâoriginalitĂ© de la rĂ©flexion spinoziste sur la nature de la vĂ©ritĂ©. Quâil y a un rapport de complĂ©mentaritĂ© entre adaequatio et convenientia 9 Ăthique I, axiome VI. 16Il faut remarquer avant tout que Spinoza ne prĂ©sente pas dans lâĂthique, ni dans le TraitĂ© de la rĂ©forme de lâentendement, une dĂ©finition en bonne et due forme et explicite de la vĂ©ritĂ©. Dans lâĂthique, la traditionnelle dĂ©finition nominale de la vĂ©ritĂ© nâest pas prĂ©sentĂ©e sous forme de dĂ©finition, mais sous forme dâaxiome lâidĂ©e vraie doit debet sâaccorder convenire avec son idĂ©at »9. On ne doit pas penser que la substitution de lâĂ©noncĂ© sous forme dâaxiome Ă lâĂ©noncĂ© dĂ©finitionnel soit gratuite. En effet, les dĂ©finitions portent sur lâessence des choses et sur leurs affections, tandis que les axiomes concernent surtout les relations entre les choses. Ainsi, la mise en forme axiomatique de la dĂ©finition nominale vise Ă indiquer que celle-ci ne porte que sur la relation extrinsĂšque de lâidĂ©e vraie Ă lâobjet, sans nous renseigner en quoi consiste lâidĂ©e vraie prise en elle-mĂȘme. 10 Je ne reconnais aucune diffĂ©rence entre lâidĂ©e vraie et lâidĂ©e adĂ©quate, sinon que le mot âvraieâ ... 17Câest dans lâĂthique II, dĂ©finition IV, que Spinoza considĂšre lâidĂ©e vraie par sa propriĂ©tĂ© intrinsĂšque, câest-Ă -dire par son adĂ©quation Jâentends par idĂ©e adĂ©quate une idĂ©e qui, en tant quâon la considĂšre en elle-mĂȘme, sans relation Ă lâobjet, a toutes les propriĂ©tĂ©s ou dĂ©nominations intrinsĂšques dâune idĂ©e vraie. Explication Je dis intrinsĂšques pour exclure celle qui est extrinsĂšque, Ă savoir, lâaccord de lâidĂ©e avec lâobjet dont elle est lâidĂ©e ». Que lâadaequatio et la convenientia soient deux propriĂ©tĂ©s distinctes et complĂ©mentaires dâune seule et mĂȘme idĂ©e, câest ce que Spinoza affirme clairement dans la lettre 60 Ă Tchirnhaus10. IdĂ©e adĂ©quate » et idĂ©e vraie » sont deux dĂ©nominations distinctes pour dĂ©signer une seule et mĂȘme idĂ©e, selon que nous considĂ©rons cette idĂ©e unique soit dans sa nature, abstraction faite de son rapport Ă lâobjet, soit dans son rapport Ă lâobjet. Voyons donc ce qui rend possible cette complĂ©mentaritĂ©. 18Je prendrai comme fil conducteur de mon analyse le § 69 du TraitĂ© de la rĂ©forme de lâentendement Quant Ă ce qui constitue la forme du vrai, il est certain que la pensĂ©e vraie ne se distingue pas seulement de la fausse par une dĂ©nomination extrinsĂšque, mais surtout par une dĂ©nomination intrinsĂšque. 19Lâemploi de lâadverbe surtout » dans ce passage marque nettement la primautĂ© de la dĂ©nomination intrinsĂšque par rapport Ă lâextrinsĂšque, mais lâaffirmation de la subordination de cette derniĂšre Ă la prĂ©cĂ©dente nâĂ©quivaut pas Ă lâaffirmation de son exclusion au profit de la premiĂšre. NĂ©anmoins, les exemples donnĂ©s ensuite par Spinoza semblent aller dans le sens dâune vĂ©ritable exclusion. En effet, il poursuit 11 GII/26. Si un ouvrier conçoit un ouvrage avec ordre, bien que cet ouvrage nâait jamais existĂ© et mĂȘme ne doive jamais exister, sa pensĂ©e est nĂ©anmoins vraie que lâouvrage existe ou non, cette pensĂ©e est la mĂȘme. Et au contraire, si quelquâun dit, par exemple, que Pierre existe, sans savoir cependant que Pierre existe, sa pensĂ©e, par rapport Ă lui, est fausse, ou, si lâon prĂ©fĂšre, nâest pas vraie, quoique Pierre existe effectivement. Et cette proposition Pierre existe, nâest vraie quâen ce qui concerne celui qui sait avec certitude que Pierre existe11. 20Le deuxiĂšme exemple affirme clairement que le simple accord entre une affirmation et lâĂ©tat de choses auquel elle renvoie nâest pas une condition suffisante pour quâelle soit vraie, tandis que le premier exemple semble aller plus loin et affirmer quâil nâest pas non plus une condition nĂ©cessaire de la vĂ©ritĂ©, puisque le plan conçu par lâouvrier est dit vrai » indĂ©pendamment de lâexistence de son objet. 12 Cf. Ăthique I, Proposition VIII, scolie 2 ; Ăthique II, Proposition VIII ; Ăthique V, Proposition X ... 13 Selon Spinoza, le contraste entre lâexistence Ă©ternelle et lâexistence temporelle nâest pas un cont ... 14 Cf. les § 41, § 42, § 85, § 91 et § 99. 15 Cf. Ăthique II, Propositions XXXII et XXXIV ; Proposition XLI, dĂ©monstration ; Proposition XLIII, d ... 21NĂ©anmoins, il est possible dâinterprĂ©ter le premier exemple, Ă la lumiĂšre de certaines thĂšses mĂ©taphysiques soutenues par Spinoza dans lâĂthique12, comme affirmant simplement que la vĂ©ritĂ© dâune pensĂ©e construite dâune façon ordonnĂ©e ne dĂ©pend pas de son accord avec quelque chose qui existe dans la durĂ©e, sans que cela signifie quâelle ne sâaccorde avec une essence Ă©ternelle contenue dans un attribut de Dieu. En effet, Ă©tant donnĂ© que le nĂ©cessitarisme de Spinoza entraĂźne que tout ce qui est concevable possĂšde un certain type dâactualitĂ© extra-mentale, il est lĂ©gitime dâaffirmer quâil nây a pas dâidĂ©e vraie qui ne sâaccorde avec un objet douĂ© dâactualitĂ©, que cette actualitĂ© soit lâexistence temporelle de la chose ou lâexistence Ă©ternelle de son essence13. Toute idĂ©e vraie a donc une portĂ©e existentielle et une dĂ©nomination extrinsĂšque. Cette lecture permet de maintenir la prĂ©sence constante de la dĂ©nomination extrinsĂšque de lâidĂ©e vraie indiquĂ©e au dĂ©but du § 69, affirmĂ©e dans dâautres paragraphes du TraitĂ© de la rĂ©forme de lâentendement14 et dans plusieurs passages de lâĂthique15. 16 Cf. ibid., Proposition XLIII, scolie. 22Parmi les deux dĂ©nominations de lâidĂ©e vraie, câest surtout lâintrinsĂšque qui constitue la forme du vrai. Câest elle, en effet, qui permet de considĂ©rer lâidĂ©e vraie comme ayant plus de rĂ©alitĂ© ou de perfection interne quâune idĂ©e fausse, et qui permet dâaffirmer quâil y a entre lâidĂ©e vraie et la fausse la mĂȘme relation quâentre lâĂȘtre et le non ĂȘtre16. Câest Ă elle que le § 70 du TraitĂ© de la rĂ©forme de lâentendement se rĂ©fĂšre quand il affirme quâil y a dans les idĂ©es quelque chose de rĂ©el par quoi les vraies se distinguent des fausses », ce quelque chose de rĂ©el » consistant dans la possession effective dâun savoir concernant ce quâon affirme. Cela lie indissolublement, comme nous le verrons par la suite, le concept spinoziste de vĂ©ritĂ© au concept de savoir. Comment ce rapport de complĂ©mentaritĂ© est-il possible ? 17 Bien que la substitution de lâĂ©noncĂ© dĂ©finitionnel par lâaxiomatique ne soit pas dĂ©pourvue dâimport ... 23Si la vĂ©ritĂ© de lâidĂ©e vraie Ă©tait rĂ©duite Ă la dimension extrinsĂšque, il semble bien que nous serions contraints dâadopter lâinterprĂ©tation rĂ©aliste de la dĂ©finition nominale de la vĂ©ritĂ©, selon laquelle une idĂ©e est vraie parce quâelle sâaccorde Ă son Dans ce cas, câest lâobjet qui rend lâidĂ©e vraie, câest la prĂ©sence dâune rĂ©alitĂ© extĂ©rieure qui est la norme de la vĂ©ritĂ© de lâidĂ©e. On voit bien que cela est tout Ă fait contraire Ă la thĂšse spinoziste selon laquelle la vĂ©ritĂ© est norme dâelle mĂȘme et du faux », et quâainsi, celle-ci ne pouvant pas ĂȘtre fondĂ©e sur la dĂ©nomination extrinsĂšque de lâidĂ©e vraie et la dĂ©finition de la vĂ©ritĂ© Ă elle attachĂ©e, elle devra ĂȘtre fondĂ©e sur la dĂ©nomination intrinsĂšque de lâidĂ©e vraie. Lâadaequatio devra fournir un aspect complĂ©mentaire Ă la dĂ©finition de la vĂ©ritĂ© qui fonctionne aussi comme norme de la vĂ©ritĂ©. 24Si je dis aspect complĂ©mentaire », câest pour souligner encore une fois que cela ne signifie pas quâil faille exclure la dĂ©finition nominale de la vĂ©ritĂ©. Celle-ci affirme simplement que lâidĂ©e vraie sâaccorde Ă son objet. Elle ne prĂ©cise pas en quoi consiste cet accord ni non plus quel est, parmi les termes en rapport, celui qui rend lâidĂ©e vraie. LâinterprĂ©tation rĂ©aliste de cette dĂ©finition va plus loin parce quâelle affirme que câest exclusivement Ă lâobjet quâil appartient la fonction de rendre lâidĂ©e vraie. On peut nĂ©anmoins maintenir cette dĂ©finition tout en excluant lâinterprĂ©tation rĂ©aliste. Dans ce cas, il faudra dire que lâidĂ©e vraie, Ă©tant intrinsĂšquement vraie adĂ©quate, doit sâaccorder avec son objet, câest-Ă -dire doit avoir aussi la dĂ©nomination extrinsĂšque. Seule lâexclusion de lâinterprĂ©tation rĂ©aliste de la dĂ©finition nominale peut rendre compatible les deux aspects de lâidĂ©e vraie. 25Ces considĂ©rations permettent dâavancer dans la comprĂ©hension de lâemploi du mot debet » dans la formulation de lâaxiome VI de lâĂthique I. DâaprĂšs ce qui a Ă©tĂ© dit, cet axiome doit ĂȘtre interprĂ©tĂ© comme lâĂ©quivalent de la formule suivante 261 Si une idĂ©e est vraie intrinsĂšquement vraie, adĂ©quate, alors elle sâaccorde nĂ©cessairement avec son objet ». 27Et non comme lâĂ©quivalent de la formule suivante 282 Si une idĂ©e sâaccorde avec son objet, alors elle est nĂ©cessairement vraie ». 18 TraitĂ© de la rĂ©forme de lâentendement, tr. A. KoyrĂ©, J. Vrin, Paris, 1984, note 69, p. 107. 29Cela veut dire que si une idĂ©e vraie sâaccorde avec son objet, elle le fait, comme le dit A. KoyrĂ©, vi propria ; elle sây accorde parce quâelle est vraie et non inversement »18. Le mot debet » exprime le fait, pour la dĂ©nomination extrinsĂšque, dâĂȘtre une consĂ©quence nĂ©cessaire de la puissance intrinsĂšque de la pensĂ©e vraie. Cela signifie que, dans le rapport de complĂ©mentaritĂ© entre convenientia et adaequatio, il y a subordination de la premiĂšre Ă la seconde. 30Cette lecture, qui exclut le caractĂšre rĂ©aliste de la dĂ©finition nominale, peut ĂȘtre renforcĂ©e par lâanalyse du deuxiĂšme exemple donnĂ© dans le § 69, qui concerne lâaffirmation de lâexistence de Pierre. Selon ce passage, la simple rencontre fortuite entre un Ă©tat de choses et lâaffirmation qui le reprĂ©sente nâest pas une condition suffisante pour que cette affirmation puisse ĂȘtre qualifiĂ©e de vraie. La simple existence fortuite de lâĂ©tat de choses affirmĂ© ne rend pas lâidĂ©e vraie. Par contre, cette mĂȘme affirmation, faite par celui qui sait avec certitude que Pierre existe », câest-Ă -dire liĂ©e Ă une idĂ©e adĂ©quate qui porte en soi la totalitĂ© des causes ou raisons de ce quâon affirme, recevra lĂ©gitimement ce prĂ©dicat. Seule une affirmation connectĂ©e au systĂšme de raisons qui la justifient peut ĂȘtre vraie. 19 GII/124. 31Ainsi, pour Spinoza, il nây a de proposition vraie sur une chose que si elle consiste dans un savoir certain sur cette chose. Dans la connaissance vraie, il y a un rapport indissociable entre ce qui est affirmĂ© et les raisons par lesquelles cela est affirmĂ©, ce qui conduit Spinoza Ă soutenir, dans lâĂthique II, Proposition XLIII, scolie, quâ avoir une idĂ©e vraie ne signifie rien, sinon connaĂźtre une chose parfaitement ou le mieux possible »19. 32 Parfaitement ou le mieux possible » dĂ©signe la forme par laquelle la chose est connue, le processus dâengendrement de la connaissance. Et dĂšs lors que ce processus ne reste pas Ă©tranger Ă la vĂ©ritĂ© de lâaffirmation Ă laquelle il conduit, mais fait partie intĂ©grante de la signification mĂȘme de sa vĂ©ritĂ©, il nâest pas possible quâune affirmation soit vraie si elle est dĂ©pourvue de cette forme, si donc elle nâest pas la connaissance parfaite de son objet. LâindissociabilitĂ© entre lâopĂ©ration rationnelle qui fonde et justifie une certaine affirmation et la vĂ©ritĂ© de cette affirmation, lâimmanence du processus dĂ©monstratif Ă la vĂ©ritĂ©, signifie que le rejet de lâinterprĂ©tation rĂ©aliste de la dĂ©finition nominale sâaccompagne, chez Spinoza, de lâexclusion consĂ©cutive de ce que M. Dummett a appelĂ© de principe de connaissance », selon lequel un Ă©noncĂ© peut ĂȘtre vrai mĂȘme si lâon ne peut pas connaĂźtre ce qui le rend vrai ». Spinoza soutient ainsi une certaine conception Ă©pistĂ©mique de la vĂ©ritĂ©. 20 Pour cette interprĂ©tation de M. Dummett, voir R. Landim A interpretação realista da definição n ... 33Le rĂ©alisme, selon Dummett, peut ĂȘtre caractĂ©risĂ© par la conjonction du principe de correspondance » si un Ă©noncĂ© est vrai il doit y avoir quelque chose en vertu de laquelle il est vrai » ; du principe de bivalence » tout Ă©noncĂ© est vrai ou faux dâune maniĂšre dĂ©terminĂ©e » ; et du principe de connaissance » si un Ă©noncĂ© est vrai, il doit ĂȘtre, en principe, possible de connaĂźtre quâil est vrai ». Or, dans la mesure oĂč les limites de la connaissance humaine ne dĂ©terminent pas les limites de toute connaissance possible, ce principe peut ĂȘtre interprĂ©tĂ© comme affirmant que quelque chose peut rendre vrai un Ă©noncĂ© sans que nous puissions lâidentifier. Il peut, par consĂ©quent, ĂȘtre reformulĂ© de la façon suivante les conditions de vĂ©ritĂ© dâun Ă©noncĂ© peuvent ĂȘtre remplies indĂ©pendamment de notre capacitĂ© de savoir si elles sont ou non remplies ». Le rĂ©alisme, ainsi caractĂ©risĂ©, Ă©tablit une nette sĂ©paration entre le fait pour un Ă©noncĂ© dâĂȘtre vrai et les raisons qui permettent de le considĂ©rer comme tel, puisquâil est possible quâun Ă©noncĂ© soit vrai et quâon ne puisse pas le dĂ©montrer20. Nous voyons ainsi que le rejet spinoziste de cette sĂ©paration, prĂ©sent dans le § 69 du TraitĂ© de la rĂ©forme de lâentendement, sâaccorde bien avec son rejet de lâinterprĂ©tation rĂ©aliste de la dĂ©finition nominale de la vĂ©ritĂ©. 21 Ăthique II, Proposition III. 22 Ibid, Proposition VI, corollaire. 23 Cette inspiration est nettement prĂ©sente dans la thĂ©orie de la dĂ©finition gĂ©nĂ©tique formulĂ©e dans l ... 34Il faut nĂ©anmoins souligner que lâexclusion de lâinterprĂ©tation rĂ©aliste de la dĂ©finition nominale de la vĂ©ritĂ© ne fait pas de Spinoza un idĂ©aliste. DâaprĂšs lui, jamais lâĂȘtre des choses ne se rĂ©duit au fait pour elles dâĂȘtre pensĂ©es. MĂȘme si tout ce qui existe est nĂ©cessairement lâobjet dâune idĂ©e en Dieu21, ce nâest pas cela qui constitue lâĂȘtre formel de lâobjet, car Spinoza exclut catĂ©goriquement lâhypothĂšse dâun entendement crĂ©ateur22. Sa position pourrait ĂȘtre caractĂ©risĂ©e comme celle dâun rĂ©aliste mĂ©taphysique qui, en vertu de son inspiration constructiviste23, refuse le rĂ©alisme Ă©pistĂ©mologique. Cela signifie que tout en acceptant lâexistence indĂ©pendante dâune rĂ©alitĂ© extĂ©rieure Ă la pensĂ©e, Spinoza nie la fonction de cette rĂ©alitĂ© dans la production des idĂ©es ainsi que dans la dĂ©termination par soi seule de leur valeur de vĂ©ritĂ©. 24 Ăthique II, Proposition XL, scolie 2. 35Le fameux exemple de la quatriĂšme proportionnelle, utilisĂ© par Spinoza pour illustrer aussi bien les diffĂ©rences entre les modes de perception du TraitĂ© de la rĂ©forme de lâentendement § 23 et 24 que les genres de connaissance de lâĂthique24, illustre bien ce lien indissociable entre ce quâon affirme et les raisons qui prouvent ce quâon affirme dans lâidĂ©e vraie. En effet, le mĂȘme rĂ©sultat peut ĂȘtre atteint par des procĂ©dĂ©s cognitifs qui divergent qualitativement, et cette divergence quant Ă la maniĂšre de parvenir au rĂ©sultat permet de poser les uns et dâexclure les autres de la sphĂšre de la vĂ©ritĂ©. 36La simple application aveugle dâune rĂšgle quâon a apprise par ouĂŻ-dire mais dont la raison nous Ă©chappe premier mode de perception, ou qui a Ă©tĂ© trouvĂ©e par des expĂ©riences particuliĂšres non guidĂ©es par la raison, et gĂ©nĂ©ralisĂ©e ensuite dâune façon abusive, sans que nous puissions comprendre la validitĂ© de la rĂšgle et la nĂ©cessitĂ© du rĂ©sultat obtenu second mode de perception, conduit Ă des affirmations gratuites et incertaines qui ne peuvent pas ĂȘtre qualifiĂ©es de vraies. MĂȘme si lâapplication de la rĂšgle nous mĂšne au rĂ©sultat correct », la simple impossibilitĂ© de rendre compte du chemin qui y conduit lâexclut de la vĂ©ritĂ©. Ces modes de perception, qui font partie du premier genre de connaissance dans lâĂthique, sont inadĂ©quats et par consĂ©quent non-vrais. 25 Il est important de rapprocher cette distinction intrinsĂšque, du point de vue de la vĂ©ritĂ©, entre s ... 37Par contre, lâapplication de la rĂšgle comprise Ă partir des propriĂ©tĂ©s communes des nombres proportionnels troisiĂšme mode de perception, second genre de connaissance, ou lâinfĂ©rence directe de la quatriĂšme proportionnelle Ă partir de lâintuition du rapport entre le premier et le second nombre quatriĂšme mode de perception, troisiĂšme genre de connaissance, Ă©tant de procĂ©dĂ©s qui peuvent rendre compte du chemin qui les mĂšne nĂ©cessairement au rĂ©sultat, appartiennent Ă la sphĂšre de la vĂ©ritĂ©. Ainsi, il ne suffit pas de suivre aveuglĂ©ment une rĂšgle qui nous mĂšne au rĂ©sultat correct pour Ă©noncer des propositions vraies. Il faut aussi comprendre la nĂ©cessitĂ© de la rĂšgle, cette comprĂ©hension Ă©tant la condition mĂȘme pour la comprĂ©hension de la nĂ©cessitĂ© du rĂ©sultat25. Comparaison avec Descartes 38Pour mieux saisir lâoriginalitĂ© de la pensĂ©e de Spinoza, il est intĂ©ressant de rapprocher ce quâil affirme dans le § 69 du TraitĂ© de la rĂ©forme de lâentendement de ce que Descartes soutient dans ses MĂ©ditations MĂ©taphysiques. 39Nous trouvons dans les MĂ©ditations deux passages qui illustrent la position de Descartes Ă propos du principe de connaissance ». Le premier se trouve au dĂ©but de la TroisiĂšme MĂ©ditation 26 AT-VII-35 AT » renvoie aux Ćuvres de Descartes, Ă©d. Charles Adam et Paul Tannery, Paris, LĂ©opold ... Mais il y avait encore une autre chose que jâassurais, et quâĂ cause de lâhabitude que jâavais Ă la croire, je pensais apercevoir trĂšs clairement, quoique vĂ©ritablement je ne lâaperçusse point, Ă savoir quâil y avait des choses hors de moi, dâoĂč procĂ©dait ces idĂ©es, et auxquelles elles Ă©taient tout Ă fait semblables. Et câĂ©tait en cela que je me trompais ; ou, si peut-ĂȘtre je jugeais selon la vĂ©ritĂ©, ce nâĂ©tait aucune connaissance que jâeusse, qui fĂ»t cause de la vĂ©ritĂ© de mon jugement si verum judicabam, id non ex vi meae percepcionis contingebat26. 40Dans ce passage Descartes admet que si ce quâil assurait sâaccordait effectivement avec la rĂ©alitĂ©, son jugement serait vrai, malgrĂ© lâabsence dâune perception claire et distincte de ce quâil affirmait. Son jugement serait vrai non par la force ex vi de sa perception, mais, pourrait-on dire, grĂące Ă une rencontre hasardeuse avec la rĂ©alitĂ©. Son hĂ©sitation câĂ©tait en cela que je me trompais ; ou, si peut-ĂȘtre je jugeais selon la vĂ©ritĂ©... » ne porte pas sur la lĂ©gitimitĂ© de considĂ©rer un jugement de ce type comme vrai, mais plutĂŽt sur la possibilitĂ© de reconnaĂźtre ou dĂ©terminer cette vĂ©ritĂ©. Le jugement serait, absolument parlant, vrai, mais lâabsence de clartĂ© et de distinction lâempĂȘcherait de connaĂźtre sa vĂ©ritĂ©. 41Spinoza, quant Ă lui, nâhĂ©site pas Ă considĂ©rer un tel jugement, de par lâabsence mĂȘme dâune perception adĂ©quate de ce qui est affirmĂ©, comme Ă©tant hors de la sphĂšre des jugements vrais. Et cela mĂȘme si ce quâil affirme sâaccorde avec la rĂ©alitĂ©. Pour lui, un jugement dont la vĂ©ritĂ© ne dĂ©pend en rien de la puissance explicative de la pensĂ©e ne peut pas ĂȘtre qualifiĂ© de vrai ». Sa seule hĂ©sitation, dont jâindiquerai ensuite le sens possible, porte sur la façon de dĂ©signer ce jugement, hĂ©sitant entre les prĂ©dicats faux » et non-vrai » sa pensĂ©e...est fausse ou, si lâon prĂ©fĂšre, nâest pas vraie, encore que Pierre existe effectivement. » 42Chez Descartes, lâabsence de clartĂ© et de distinction, câest-Ă -dire du critĂšre de vĂ©ritĂ©, empĂȘche la reconnaissance de la vĂ©ritĂ©, mais le jugement reste, malgrĂ© cela, vrai. Il y a dissociation entre ce qui identifie et ce qui rend un jugement vrai. Chez Spinoza, lâabsence dâadĂ©quation, câest-Ă -dire de la propriĂ©tĂ© intrinsĂšque de lâidĂ©e vraie, empĂȘche que le jugement puisse ĂȘtre, au sens pleinement spinoziste, vrai, et a fortiori quâil puisse y avoir une reconnaissance quelconque de sa vĂ©ritĂ©. 43Lâautre passage de Descartes se trouve dans la QuatriĂšme MĂ©ditation, dans le contexte dâune discussion Ă propos du bon usage du libre arbitre 27 AT-IX-48. Or si je mâabstiens de donner mon jugement sur une chose, lorsque je ne la conçois pas avec assez de clartĂ© et de distinction, il est Ă©vident que jâen use fort bien, et que je ne suis point trompĂ© ; mais si je me dĂ©termine Ă la nier, ou assurer, alors je ne me sers plus comme je dois de mon libre arbitre ; et si jâassure ce qui nâest pas vrai, il est Ă©vident que je me trompe ; mĂȘme aussi, encore que je juge selon la vĂ©ritĂ©, cela nâarrive que par hasard, et je ne laisse pas de faillir...27 44Ici Descartes affirme clairement quâun jugement qui sâaccorderait par hasard avec la rĂ©alitĂ© ne laisserait pas dâĂȘtre un jugement vrai. Sâil le rapproche dâun jugement faux, il ne va pas jusquâĂ le qualifier de faux ou de non-vrai, comme le fait Spinoza. Ce rapprochement vise Ă attirer lâattention sur le fait quâun jugement qui par hasard se trouve ĂȘtre vrai renvoie, tout comme un jugement faux, Ă un mauvais usage du libre arbitre. Mais ce jugement ne laisse pas dâĂȘtre vrai, mĂȘme sâil trouve Ă sa racine le mĂȘme mauvais usage du libre arbitre qui engendre la faussetĂ©. Nous voyons ainsi comment chez Descartes, contrairement Ă ce qui se passe chez Spinoza, câest bien la prĂ©sence de lâobjet qui a la fonction de rendre le jugement vrai et comment lâabsence dâĂ©vidence ne le rend pas faux mais seulement douteux. Cela montre que lâinterprĂ©tation rĂ©aliste de la dĂ©finition nominale sâaccompagne du principe de connaissance », et que lâexclusion de lâun entraĂźne celle de lâautre. Le refus du principe de bivalence » et le problĂšme de la valeur de vĂ©ritĂ© de lâimagination 45En consonance avec le refus de lâinterprĂ©tation rĂ©aliste du principe de correspondance et du principe de connaissance, lâhĂ©sitation de Spinoza entre les prĂ©dicats faux » et non-vrai » dans le § 69 suggĂšre encore, au moins implicitement, une possible rupture avec le principe de bivalence, faisant basculer ainsi la dichotomie traditionnelle du vrai et du faux. En effet, dans ce paragraphe du TraitĂ© de la rĂ©forme de lâentendement, Spinoza suggĂšre une distinction entre trois valeurs de vĂ©ritĂ© le vrai, le non-vrai et le faux. Cette tripartition entraĂźne une asymĂ©trie dans les rapports entre adĂ©quation et vĂ©ritĂ©, dâune part, et inadĂ©quation et faussetĂ©, dâautre part. Si toute idĂ©e adĂ©quate est nĂ©cessairement vraie et vice-versa, cette rĂ©ciprocitĂ© nâarrive point dans le rapport entre inadĂ©quation et faussetĂ©. Bien que toute idĂ©e fausse soit nĂ©cessairement inadĂ©quate, toute idĂ©e inadĂ©quate nâest pas nĂ©cessairement fausse, sans que cela signifie que ces idĂ©es soient vraies. Dans ce cas, le fait pour une idĂ©e de ne pas ĂȘtre vraie nâimplique pas quâelle soit fausse. La ligne de partage essentielle se fait entre lâidĂ©e adĂ©quate et lâidĂ©e inadĂ©quate, celle-ci pouvant ĂȘtre fausse ou simplement non-vraie. 28 Cf. G. H. R. Parkinson, Truth Is Its Own Standard Aspects of Spinozaâs Theory of Truth », in Sh ... 29 Ăthique II, Proposition XLI, dĂ©monstration, et Proposition XXVIII. 30 Ibid., Proposition XLI. 31 Ăthique II, Proposition XVII, scolie et Proposition XLIX, scolie. 32 Ăthique IV, Proposition I, dĂ©monstration et scolie. 46Certains interprĂštes ont signalĂ© la prĂ©sence de cette distinction dans le § 69, tout en affirmant ensuite quâil nây en a aucune trace dans lâĂthique28. NĂ©anmoins, je voudrais juste indiquer, pour finir, comment cette distinction entre lâidĂ©e inadĂ©quate non-vraie et lâidĂ©e inadĂ©quate fausse permet dâĂ©claircir dâune maniĂšre satisfaisante une ambiguĂŻtĂ© prĂ©sente dans les affirmations de lâĂthique concernant le rapport entre la faussetĂ© et la connaissance imaginative, connaissance qui est constituĂ©e exclusivement par des idĂ©es qui sont toujours inadĂ©quates et confuses29. En effet, Spinoza affirme, dâune part, que cette connaissance est lâunique cause de la faussetĂ©30. Dâautre part, il affirme que les imaginations de lâĂme, considĂ©rĂ©es en elles-mĂȘmes, ne contiennent aucune erreur »31 ; ou encore, que la prĂ©sence dâune idĂ©e vraie peut supprimer lâerreur causĂ©e par une connaissance imaginative sans supprimer ce quâil y a de positif dans cette mĂȘme connaissance32. Or, il est extrĂȘmement significatif que dans lâĂthique Spinoza ne qualifie jamais de vraie une idĂ©e imaginative. Dans ce dernier passage, mĂȘme sâil lui arrive de parler dâune positivitĂ© de lâidĂ©e imaginative qui nâest pas fausse, il ne va pas jusquâĂ qualifier cette idĂ©e, dans son rapport Ă lâĂąme humaine, comme vraie, ce quâil nâaurait pas pu faire sâil nâavait pas distinguĂ© entre lâidĂ©e inadĂ©quate non-vraie et lâidĂ©e inadĂ©quate fausse. 33 Pour la distinction entre lâobjet directement reprĂ©sentĂ© et lâobjet indirectement reprĂ©sentĂ© par lâ ... 34 Ăthique II, Proposition XXVIII. 35 Bien entendu, ce nâest pas par lâidĂ©e inadĂ©quate que nous pouvons savoir quâelle sâaccorde avec lâa ... 36 Cette idĂ©e est lâĂ©quivalent Ă©pistĂ©mique de la passion joyeuse. Celle-ci naĂźt dâun accord entre des ... 47Si nous nous rappelons que les idĂ©es inadĂ©quates de lâimagination sont les idĂ©es des affections du corps humain causĂ©es par les corps extĂ©rieurs, et que ces idĂ©es, qui indiquent directement lâĂ©tat du corps humain, nous permettent aussi de percevoir indirectement la cause extĂ©rieure de cet Ă©tat33, nous constaterons que lâidĂ©e inadĂ©quate non-vraie est celle qui, tout en sâaccordant, grĂące au parallĂ©lisme, avec son corrĂ©lat physique, Ă savoir lâaffection du corps, ne lâindique que trĂšs confusĂ©ment. Bien quâelle sâaccorde avec lâaffection, elle ne peut pas lâexpliquer par ses causes. En effet, lâaffection du corps est dĂ©terminĂ©e par une sĂ©rie infinie de causes finies. Dans la mesure oĂč lâĂąme humaine nâest quâune partie de lâentendement infini de Dieu, elle nâest pas capable de connaĂźtre la totalitĂ© infinie de cette sĂ©rie. Ainsi, lâidĂ©e dâaffection, considĂ©rĂ©e exclusivement dans son rapport Ă lâĂąme humaine, est nĂ©cessairement comme une consĂ©quence dĂ©tachĂ©e de ses prĂ©misses », câest-Ă -dire inadĂ©quate et confuse34. Son inadĂ©quation irrĂ©ductible est suffisante pour lâexclure de la vĂ©ritĂ©, tandis que son accord fortuit », câest-Ă -dire non justifiĂ© par lâidĂ©e35, avec son corrĂ©lat physique, sans ĂȘtre suffisant pour la dĂ©terminer comme vraie, suffit pour lâexclure de la faussetĂ©36. LâidĂ©e inadĂ©quate fausse, pour sa part, est lâidĂ©e dâaffection qui, outre son inadĂ©quation et confusion, ne sâaccorde pas Ă lâobjet indirect auquel elle renvoie le corps extĂ©rieur qui est cause de lâaffection. Si Spinoza soutenait exclusivement une thĂ©orie de la vĂ©ritĂ© comme correspondance, il devrait dĂ©signer le premier aspect des idĂ©es imaginatives comme vrai, ce quâil ne fait pas. Sâil soutenait exclusivement une certaine conception de la vĂ©ritĂ© comme cohĂ©rence, lâinadĂ©quation coĂŻnciderait avec la faussetĂ©, et il ne pourrait pas se rĂ©fĂ©rer Ă la positivitĂ© des idĂ©es inadĂ©quates de lâimagination, ce quâil fait pourtant. Mais, si la vĂ©ritĂ© naĂźt de la conjonction entre adĂ©quation et correspondance, conjonction rendue possible par lâexclusion de lâinterprĂ©tation rĂ©aliste de la dĂ©finition nominale de la vĂ©ritĂ©, il est possible de considĂ©rer comme fausse lâidĂ©e inadĂ©quate qui ne sâaccorde pas avec son objet indirect, et simplement comme non-vraie celle qui sâaccorde avec son objet direct. 48Ainsi, nous pouvons conclure que câest lâexclusion de lâinterprĂ©tation rĂ©aliste de la dĂ©finition nominale de la vĂ©ritĂ© et, dâune maniĂšre plus gĂ©nĂ©rale, la tendance Ă refuser les principes du rĂ©alisme Ă©pistĂ©mologique, qui permet Ă la pensĂ©e spinoziste de dissoudre la tension signalĂ©e par F. AlquiĂ© et de rendre compatible les deux propriĂ©tĂ©s de lâidĂ©e vraie. Il reste toutefois que rendre compatibles ces deux propriĂ©tĂ©s nâest pas encore montrer la nĂ©cessitĂ© de leur liaison. Pour expliciter comment et pourquoi la convenientia est une propriĂ©tĂ© nĂ©cessairement liĂ©e Ă lâadaequatio, il faudrait examiner la doctrine du parallĂ©lisme et la fonction exercĂ©e par la substance absolue comme fondement de la complĂ©mentaritĂ© entre les deux aspects de la vĂ©ritĂ©. Cette tĂąche, nĂ©anmoins, dĂ©passe largement les objectifs et limites de cet article. Landim, R., A interpretação realista da definição nominal da verdade », Manuscrito, volume VI, n° 2, abril 1983. Haut de page Bibliographie AlquiĂ©, F., Le Rationalisme de Spinoza, PUF, coll. ĂpimĂ©thĂ©e, Paris, 1981. Curley, E., Spinozaâs Metaphysics An Essay in interpretation, Harvard University Press, Cambridge, Mass., 1969. Curley, E., Spinoza on Truth », Australasian Journal of Philosophy, vol. 72, n° 1, March 1994. 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Della Rocca, M., Representation and the Mind-Body Problem in Spinoza ; Oxford University Press, 1996. Spinoza, B., Spinoza Opera, ed. Carl Gebhardt, 5 vol., Heidelberg, Carl Winters, 1924. Spinoza, B., Ăthique, prĂ©sentĂ© et traduit par Bernard Pautrat, Ăditions du Seuil, Paris, 1999. Spinoza, B., Ăthique, Ă©dition bilingue, trad. et notes de Ch. Appuhn, J. Vrin, Paris, 1983. Spinoza, B., TraitĂ© de la RĂ©forme de lâEntendement, trad. de A. KoyrĂ©, J. Vrin, Paris, 1984. Haut de page Notes 1 Il [Cherbury] examine ce que câest que la vĂ©ritĂ© ; et pour moi, je nâen ai jamais doutĂ©, me semblant que câest une notion si transcendantalement claire, quâil est impossible de lâignorer en effet, on a bien des moyens pour examiner une balance avant que de sâen servir, mais on nâen aurait point pour apprendre ce que câest que la vĂ©ritĂ©, si on ne la connaissait de nature. Car quelle raison aurions-nous de consentir Ă ce qui nous lâapprendrait, si nous ne savions quâil fĂ»t vrai, câest-Ă -dire, si nous ne connaissions la vĂ©ritĂ© ? Ainsi on peut bien expliquer quid nominis Ă ceux qui nâentendent pas la langue, et leur dire que ce mot vĂ©ritĂ©, en sa propre signification, dĂ©note la conformitĂ© de la pensĂ©e avec lâobjet, mais lorsquâon lâattribue aux choses qui sont hors de la pensĂ©e, il signifie seulement que ces choses peuvent servir dâobjets Ă des pensĂ©es vĂ©ritables, soit aux nĂŽtres, soit Ă celles de Dieu; mais on ne peut donner aucune dĂ©finition de logique qui aide Ă connaĂźtre sa nature » R. Descartes, Ćuvres Philosophiques, Ă©d. F. AlquiĂ©, Garnier, Paris, 1973, t. II, p. 144. 2 Cf. chap. XV, deuxiĂšme partie. GI/78 G » renverra toujours Ă Spinoza Opera, Ă©d. Carl Gebhardt, 5 vol., Heidelberg, Carl Winters, 1924. 3 Ăthique II, Proposition XLIII, scolie. GII/124. 4 R. Landim, La notion de vĂ©ritĂ© dans lâĂthique de Spinoza », in Groupe de recherches spinozistes n° 2, Paris, 1989, p. 123. Il faut remarquer que Landim semble distinguer dans son article entre ce qui constitue proprement la vĂ©ritĂ© la correspondance et ce qui nous permet de la reconnaĂźtre la cohĂ©rence, puisquâil affirme que la cohĂ©rence est ce par quoi la vĂ©ritĂ© sâimpose Ă lâhomme comme correspondance. Bref, au lieu dâune coexistence entre deux thĂ©ories de la vĂ©ritĂ©, il sâagit plutĂŽt dâune distinction entre la dĂ©finition et le critĂšre de vĂ©ritĂ©. Or, si lâon pose que la correspondance Ă©puise la dĂ©finition de la vĂ©ritĂ©, Ă©tant donnĂ©e lâimpossibilitĂ© de comparer lâidĂ©e avec son objet pour vĂ©rifier la satisfaction de cet accord, il faudra chercher une propriĂ©tĂ© intrinsĂšque Ă la pensĂ©e qui puisse lĂ©gitimement lâattester. Dans ce cas, nĂ©anmoins, cette propriĂ©tĂ© sera distincte de la propriĂ©tĂ© dâĂȘtre vraie et il y aura dissociation entre ce qui rend et ce qui identifie une idĂ©e vraie. Nous sommes ainsi ramenĂ©s Ă la position cartĂ©sienne du problĂšme de la vĂ©ritĂ©. La dĂ©finition de la vĂ©ritĂ© Ă©tant transcendentalement claire », le problĂšme consiste Ă trouver un critĂšre ou signe de la vĂ©ritĂ© et Ă prouver sa validitĂ©. Par contre, si, comme le fait Spinoza, la propriĂ©tĂ© intrinsĂšque de la pensĂ©e vraie est posĂ©e comme faisant partie de la dĂ©finition mĂȘme de la vĂ©ritĂ©, câest-Ă -dire sâil nây a pas de vĂ©ritĂ© sans justification rationnelle seule lâidĂ©e adĂ©quate qui porte en elle la complĂ©tude de ses causes ou raisons peut ĂȘtre vraie, alors on peut dire que cette propriĂ©tĂ© non seulement permet la reconnaissance de la vĂ©ritĂ© mais aussi quâelle appartient Ă la nature de lâidĂ©e vraie raison pour laquelle celle-ci nâa pas besoin dâun signe extrinsĂšque pour ĂȘtre reconnue. Câest pour cette raison quâau lieu de parler de coexistence entre deux thĂ©ories de la vĂ©ritĂ©, je parlerai de complĂ©mentaritĂ© entre lâadaequatio cohĂ©rence et la convenientia correspondance dans la constitution du concept spinoziste de vĂ©ritĂ©. 5 F. AlquiĂ©, Le Rationalisme de Spinoza, PUF, coll. ĂpimĂ©thĂ©e, Paris, 1981, p. 212. 6 Ce sont ceux, comme S. Hampshire ou H. Joachim, qui considĂšrent que Spinoza soutient exclusivement la conception de la vĂ©ritĂ© comme cohĂ©rence. 7 Ce sont ceux, comme E. Curley ou J. Bennett, pour lesquels Spinoza adopte exclusivement la conception de la vĂ©ritĂ© comme correspondance. Cette position, adoptĂ©e par Curley dans son livre Spinozaâs Metaphysics p. 56, p. 122â126, a Ă©tĂ© revue dans son article Spinoza on Truth », in Australasian Journal of Philosophy, vol. 72, no 1, March 1994. Dans cet article, il soutient lâexistence dans la pensĂ©e de Spinoza de tendances en conflit » entre la thĂ©orie de la vĂ©ritĂ© comme correspondance et une certaine version de la thĂ©orie de la vĂ©ritĂ© comme cohĂ©rence. 8 En particulier, il nâest pas possible de dĂ©velopper ici lâanalyse dĂ©taillĂ©e de la notion dâidĂ©e adĂ©quate Ă©laborĂ©e par Spinoza dans le TraitĂ© de la rĂ©forme de lâentendement et dans lâĂthique, ni de justifier lâinterprĂ©tation adoptĂ©e de cette notion comme renvoyant Ă une affirmation connectĂ©e au systĂšme de raisons qui la prouvent et, par lĂ , Ă une certaine version de la thĂ©orie de la vĂ©ritĂ© comme cohĂ©rence. Pour ces analyses et cette justification je renvoie au deuxiĂšme chapitre de mon livre Verdade e Certeza em Espinosa Ed. L & PM, Porto Alegre, 1999. 9 Ăthique I, axiome VI. 10 Je ne reconnais aucune diffĂ©rence entre lâidĂ©e vraie et lâidĂ©e adĂ©quate, sinon que le mot âvraieâ se rapporte seulement Ă lâaccord de lâidĂ©e avec son objet, tandis que le mot âadĂ©quateâ se rapporte Ă la nature de lâidĂ©e mĂȘme » GIV/270. 11 GII/26. 12 Cf. Ăthique I, Proposition VIII, scolie 2 ; Ăthique II, Proposition VIII ; Ăthique V, Proposition XXIX, scolie. 13 Selon Spinoza, le contraste entre lâexistence Ă©ternelle et lâexistence temporelle nâest pas un contraste entre lâexistence possible et lâexistence actuelle, mais entre deux types dâexistence actuelle. LâactualitĂ© Ă©ternelle de lâessence dâun mode fini qui nâexiste pas dans le temps nâest que la propriĂ©tĂ© actuelle qui appartient Ă lâattribut divin de produire nĂ©cessairement ce mode quand les conditions sont remplies. Cette propriĂ©tĂ© est une combinaison particuliĂšre des lois de la nature. 14 Cf. les § 41, § 42, § 85, § 91 et § 99. 15 Cf. Ăthique II, Propositions XXXII et XXXIV ; Proposition XLI, dĂ©monstration ; Proposition XLIII, dĂ©monstration. 16 Cf. ibid., Proposition XLIII, scolie. 17 Bien que la substitution de lâĂ©noncĂ© dĂ©finitionnel par lâaxiomatique ne soit pas dĂ©pourvue dâimportance, elle ne signifie pas la suppression de la correspondance comme lâun des Ă©lĂ©ments constitutifs de la conception spinoziste de la vĂ©ritĂ©. Pour cette raison, et pour faciliter lâexposition, jâai pris la libertĂ© de maintenir la dĂ©signation traditionnelle de dĂ©finition nominale pour renvoyer Ă cet Ă©lĂ©ment. 18 TraitĂ© de la rĂ©forme de lâentendement, tr. A. KoyrĂ©, J. Vrin, Paris, 1984, note 69, p. 107. 19 GII/124. 20 Pour cette interprĂ©tation de M. Dummett, voir R. Landim A interpretação realista da definição nominal da verdade », Manuscrito, n° 2, avril 1983 ; et Significado e verdade », SĂntese, n° 32, dĂ©cembre 1984. 21 Ăthique II, Proposition III. 22 Ibid, Proposition VI, corollaire. 23 Cette inspiration est nettement prĂ©sente dans la thĂ©orie de la dĂ©finition gĂ©nĂ©tique formulĂ©e dans le TraitĂ© de la rĂ©forme de lâentendement. 24 Ăthique II, Proposition XL, scolie 2. 25 Il est important de rapprocher cette distinction intrinsĂšque, du point de vue de la vĂ©ritĂ©, entre suivre une rĂšgle en connaissant ou en ignorant sa nĂ©cessitĂ©, de ce que Spinoza soutient Ă propos de la distinction intrinsĂšque, du point de vue Ă©thique, entre la conduite du sage et celle de lâignorant par rapport aux principes Ă©thiques. Le sage et lâignorant peuvent avoir une mĂȘme conduite, accomplir une mĂȘme action dâun point de vue extĂ©rieur tout en Ă©tant radicalement distincts du point de vue de la dĂ©termination intĂ©rieure. Ainsi, lâun interprĂšte une rĂšgle de vie comme une loi morale et est dĂ©terminĂ© Ă lâobĂ©ir par la peur du chĂątiment et lâespoir dâune rĂ©compense ; lâautre est au-dessus de la loi, câest-Ă -dire quâil est dĂ©terminĂ© Ă suivre cette rĂšgle de vie par la comprĂ©hension de la nĂ©cessitĂ© par laquelle elle est liĂ©e Ă ses effets immanents, et par la comprĂ©hension de son utilitĂ© comme moyen pour parvenir Ă la libertĂ© et au bonheur voir lettre XIX Ă Blyenbergh et Ăthique IV, Propositions LIX et LXIII. Le premier est esclave des passions tristes engendrĂ©es par sa connaissance inadĂ©quate, lâautre est un homme libre qui agit dĂ©terminĂ© par sa connaissance adĂ©quate et par les affects actifs qui en dĂ©coulent joie et amour intellectuel. De mĂȘme quâil ne suffit pas de parvenir Ă une conclusion correcte en suivant une rĂšgle dont on ignore la nĂ©cessitĂ© pour ĂȘtre dans la sphĂšre de la vĂ©ritĂ©, de mĂȘme il ne suffit pas de conformer notre conduite Ă une loi dont on ignore la nĂ©cessitĂ© et lâutilitĂ© pour ĂȘtre dans la sphĂšre de lâactivitĂ© Ă©thique et de la libertĂ©. La simple conformitĂ©, Ă lâobjet ou Ă la rĂšgle, dĂ©tachĂ©e des raisons qui la justifient, est Ă©galement insuffisante dans les deux cas. Ce rapprochement indique â sans que nous puissions lâapprofondir ici â lâextrĂȘme importance qui sera accordĂ©e Ă la propriĂ©tĂ© intrinsĂšque de lâidĂ©e vraie adaequatio pour fonder la supĂ©rioritĂ© Ă©thique du sage face Ă lâignorant. 26 AT-VII-35 AT » renvoie aux Ćuvres de Descartes, Ă©d. Charles Adam et Paul Tannery, Paris, LĂ©opold Cerf, 1897â1909 ; réédition Vrin-CNRS, 11 vol., 1964â1974. 27 AT-IX-48. 28 Cf. G. H. R. Parkinson, Truth Is Its Own Standard Aspects of Spinozaâs Theory of Truth », in Shahan and Biro eds., Spinoza New Perspectives, University of Oklahoma Press, 1978, p. 44, et M. Della Rocca, Representation and the Mind-Body Problem in Spinoza, Oxford University Press, 1996, p. 109. 29 Ăthique II, Proposition XLI, dĂ©monstration, et Proposition XXVIII. 30 Ibid., Proposition XLI. 31 Ăthique II, Proposition XVII, scolie et Proposition XLIX, scolie. 32 Ăthique IV, Proposition I, dĂ©monstration et scolie. 33 Pour la distinction entre lâobjet directement reprĂ©sentĂ© et lâobjet indirectement reprĂ©sentĂ© par lâidĂ©e dâaffection, voir Ăthique II, Proposition XVI, et ses deux corollaires. 34 Ăthique II, Proposition XXVIII. 35 Bien entendu, ce nâest pas par lâidĂ©e inadĂ©quate que nous pouvons savoir quâelle sâaccorde avec lâaffection, câest-Ă -dire quâelle indique effectivement la maniĂšre dont nous sommes affectĂ©s par les choses extĂ©rieures, mais par notre connaissance adĂ©quate de lâorigine et de la nature de la connaissance imaginative. 36 Cette idĂ©e est lâĂ©quivalent Ă©pistĂ©mique de la passion joyeuse. Celle-ci naĂźt dâun accord entre des individus qui se rencontrent, cet accord entre leurs natures Ă©tant cause de joie, câest-Ă -dire dâune augmentation positive de puissance. NĂ©anmoins, cet accord et cette positivitĂ© ne sont pas suffisants pour caractĂ©riser ces individus comme des individus actifs, de mĂȘme que la positivitĂ© de lâidĂ©e inadĂ©quate et son accord fortuit » avec lâaffection du corps ne sont pas suffisants pour la caractĂ©riser comme vraie. Haut de page Pour citer cet article RĂ©fĂ©rence papier Marcos AndrĂ© GLEIZER, Remarques sur le problĂšme de la vĂ©ritĂ© chez Spinoza », Philonsorbonne, 5 2011, 119-135. RĂ©fĂ©rence Ă©lectronique Marcos AndrĂ© GLEIZER, Remarques sur le problĂšme de la vĂ©ritĂ© chez Spinoza », Philonsorbonne [En ligne], 5 2011, mis en ligne le 03 fĂ©vrier 2013, consultĂ© le 17 aoĂ»t 2022. URL ; DOI de page Droits dâauteur Tous droits rĂ©servĂ©sHaut de page
ï»żLavĂ©ritĂ© est une valeur de la connaissance, relevant du domaine de la science ; la notion de devoir est une valeur de lâexistence, relevant du domaine de la morale ou de lâĂ©thique. Donc lâidĂ©e dâun devoir de chercher la vĂ©ritĂ© peut paraĂźtre Ă©trange, dâautant quâon recherche la vĂ©ritĂ© en science et ailleurs. Il y a un dĂ©sir de vĂ©ritĂ©, un devoirï»żEpreuve corrigĂ©e du BAC S 2012 de philosophie dissertation Avons-nous le devoir de chercher la vĂ©ritĂ© ? Au prĂ©alable, il convient dâinterroger les notions, les termes de ce sujet. Par devoir, il faut entendre obligation morale », Ă lâĂ©chelle dâun individu comme obligation quâon se donne Ă soi-mĂȘme comme aiguillon dans lâexistence ou Ă celle du genre humain. Cette obligation donne sens Ă notre vie direction et signification. On peut aussi concevoir le devoir en question comme une nĂ©cessitĂ© en vue dâobtenir autre chose que la vĂ©ritĂ© elle-mĂȘme. Lâobtention de celle-ci serait la condition sine qua non du bonheur, de la sagesse. Une voie obligĂ©e, escarpĂ©e mais bĂ©nĂ©fique vers quelque chose de supĂ©rieur. La vĂ©ritĂ© est une valeur suprĂȘme. Platon place le Vrai sur le mĂȘme plan que le Beau ou le Bien. Ses Ă©quivalents et contraires seront intĂ©ressants Ă interroger la vĂ©ritĂ© est-elle synonyme de rĂ©alitĂ© ? Lâerreur, lâillusion semblent ses contraires. Les domaines Ă Ă©tudier ne seront pas uniquement Ă©thiques ou mĂ©taphysiques mais bien sĂ»r aussi scientifiques et pourquoi pas politiques. La troisiĂšme notion clĂ© dans cet intitulĂ© rĂ©side dans le verbe chercher. Il faut lui opposer trouver ». Le sujet nous interroge sur la quĂȘte de la vĂ©ritĂ©, comme dynamique. Lâenjeu principal nâest donc pas lâobtention de la vĂ©ritĂ© mais le cheminement qui mĂšne Ă elle avec tout ce que cela peut supposer le chemin peut ĂȘtre douloureux, mais Ă©galement vain. Trouve-t-on un jour la vĂ©ritĂ© ? Qui peut prĂ©tendre la dĂ©couvrir ? La vĂ©ritĂ© est-elle pĂ©renne Ă lâĂ©chelle de lâhumanitĂ© ? Que se passe-t-il si nous ne nous soumettons pas Ă ce devoir ? Sommes- nous encore Ă la hauteur des attentes de notre condition ? Sommes-nous dignes dâĂȘtre humains ? Renoncer Ă cet effort, fĂ»t-il vain, nâest-ce pas se complaire dans lâillusion ? Bien sĂ»r, nous risquons lâerreur Ă chercher ainsi mais lâerreur serait moins prĂ©judiciable Ă notre condition que lâillusion, facile, dont nous serions complices. Lâerreur nâest donc pas Ă craindre. Elle constitue souvent une Ă©tape sur le chemin de la vĂ©ritĂ©. Cette quĂȘte de la vĂ©ritĂ© est un exercice difficile, douloureux et qui peut ne pas ĂȘtre couronnĂ© de succĂšs. On peut chercher assidument la vĂ©ritĂ© et ne jamais la trouver. Mais câest sans doute plus honorable de continuer de la chercher que dâabandonner ce projet et de se contenter dâun ersatz de vĂ©ritĂ©, ce qui dâailleurs nâaurait pas de sens. Certes et câest tout le paradoxe, nous serions plus heureux dans lâillusion. Câest un Ă©tat fini, qui singe le bonheur, la plĂ©nitude. Les hommes de la caverne platonicienne croient ce quâils voient sur le mur. Ils prennent ces ombres pour la rĂ©alitĂ©, pour le vrai. Or il faut un sage pour guider tout un groupe vers la VĂ©ritĂ©, hors de la caverne, aux rayons du soleil. Une fois la VĂ©ritĂ© rĂ©vĂ©lĂ©e, les illusions semblent bien fades. Reste un cas de figure une vĂ©ritĂ© quâil ne serait pas bon ou pas agrĂ©able de dĂ©couvrir. Faut-il sâobstiner Ă la chercher ? Sans doute pas, pas Ă tout prix mais cette quĂȘte est souvent un exercice intellectuel insĂ©parable des dĂ©couvertes elles-mĂȘmes. Lâesprit humain est ainsi fait quâil est passionnĂ© par la recherche et ne saurait que difficilement sâimposer, en la matiĂšre, de limites. Vous cherchez un cour de philosophie ? Proposition de plan I- La quĂȘte de la vĂ©ritĂ© est un exercice difficile 1- Un exercice qui exige des qualitĂ©s nombreuses patience, discipline, honnĂȘteté⊠Ref. possible Descartes, Discours de la mĂ©thode, la dĂ©marche scientifique dans son ensemble ; la dĂ©marche maĂŻeutique de Socrate dans les discours platoniciens 2- Le spectre de lâerreur fausse menace, finalement, mais Ă©tape nĂ©cessaire vers lâobtention de qqc Ref. possible Popper, Conjectures et rĂ©futations, le concept de falsifiabilitĂ© de la science 3- Une vĂ©ritĂ© inaccessible ? Une vĂ©ritĂ© une a-t-elle un sens ? Ref. possible thĂ©orie de la relativitĂ© puis de la relativitĂ© restreinte, aujourdâhui mise Ă mal par des recherches nouvelles. II- Une obligation morale inhĂ©rente Ă la condition humaine 1- Les hommes sont les seuls ĂȘtres vivants Ă pouvoir prĂ©tendre Ă cette dynamique 2- Lâhomme ne peut se contenter de lâillusion bien que cette derniĂšre soit apparemment confortable Ref. possible Platon, La RĂ©publique, le mythe de la Caverne 3- La quĂȘte de la vĂ©ritĂ© est la route vers la sagesse, vers la connaissance voire vers le bonheur. 4- Une quĂȘte en toutes circonstances ? Limites morales de la recherche de la vĂ©ritĂ©/ goĂ»t pour lâexercice intellectuel quâelle constitue. M7t9.