Unjour que j'enquetais un profane qui avait frappĂ© Ă  la porte de notre temple, je l'ai entendu me dir. Le Bandeau sur les yeux forum maçonnique . Vous souhaitez rĂ©agir Ă  ce message ? CrĂ©ez un compte en quelques clics ou connectez-vous pour continuer. Le Bandeau sur les yeux forum maçonnique. forum interactif entre francs maçons et non francs maçons. Notre instinct de connaissance est trop puissant pour que nous puissions encore apprĂ©cier un bonheur sans connaissance... 
 la connaissance s’est transformĂ©e chez nous en une passion qui ne redoute aucun sacrifice et ne craint rien, au fond, sinon sa propre extinction. Nous prĂ©fĂ©rons tous la destruction de l’humanitĂ© Ă  la rĂ©gression de la connaissance ! » 1Depuis quelques annĂ©es, en cherchant la cohĂ©rence entre ceque je dis de ce que je fais et ce que je fais rĂ©ellement, c’est la philosophie qui Ă©claire mon chemin de Gestalt-thĂ©rapeute. Elle m’aide Ă  comprendre et Ă  dĂ©velopper une posture que je voudrais plus tournĂ©e vers le processus. Depuis le dĂ©but de mon exercice, plusieurs maniĂšres de concevoir la vĂ©ritĂ© dont je n’avais pas vraiment conscience ont influencĂ© la maniĂšre de conduire mon travail de thĂ©rapeute. L’idĂ©e n’est pas de ne pas ĂȘtre influencĂ©e, cela serait bien vain, mais de gagner en conscience ma vision du monde et les comportements qui en dĂ©coulent. Comment je guide mes patients sciemment et Ă  mon insu ? Le monde va de soi, c’est l’évidence naturelle avec laquelle nous utilisons un langage, des tournures de phrase et un vocabulaire qui donne sens. Avec la question qu’est-ce que la vĂ©ritĂ© ? », nous allons interroger sa construction la vĂ©ritĂ© est-elle pensĂ©e Ă  partir de ce qui est, de la rĂ©alitĂ©, de l’objectivation ou bien la vĂ©ritĂ© est-elle pensĂ©e en dehors de l’objectivation ? Existe-t-il une vĂ©ritĂ© qui ferait socle pour tous ? Avec la question de la place et de l’utilitĂ© ou non de la vĂ©ritĂ©, nous allons retrouver les thĂšmes de nos discussions de Gestalt-thĂ©rapeutes le self comme processus de contact ou le self comme entitĂ©-sujet ? 2La vĂ©ritĂ© est un thĂšme qui a beaucoup occupĂ© les philosophes, et qui ouvre plusieurs questions la question de l’ĂȘtre, de la mĂ©taphysique, de la rĂ©alitĂ©, le jugement du vrai et du faux
 Nous allons voir comment la philosophie ne se rĂ©duit pas Ă  la pensĂ©e d’aprĂšs Socrate et Platon, pourtant nous baignons sans le savoir dans une pensĂ©e qui en est naturellement son prolongement. Cette pensĂ©e organise notre regard, notre conscience et notre langage. Nous nous en apercevons un peu lorsque nous sommes confrontĂ©s Ă  notre difficultĂ© de rester dans l’attention au processus et que notre rĂ©flexe est de revenir aux principes de causalitĂ© et de finalitĂ©. La dĂ©couverte de philosophes qui rĂ©flĂ©chissent Ă  partir d’un tout, pour qui il n’y a pas d’organisme individualisĂ©, pas plus d’organismemonde que d’organisme-sujet m’a beaucoup Ă©clairĂ©e pour mieux comprendre la Gestalt-thĂ©rapie selon le paradigme de champ et pour dĂ©velopper une posture rĂ©solument gestaltiste en termes de processus. La pensĂ©e dans l’immanence et le processus n’est pas neuve, et j’ai choisi de dĂ©velopper de maniĂšre forcĂ©ment rĂ©ductrice quelques aspects de la vĂ©ritĂ© Ă©clairĂ©s par ces penseurs oĂč il n’y a ni commencement ni fin, oĂč tout s’écoule HĂ©raclite, la pensĂ©e chinoise du Tao et le prĂ©curseur de la postmodernitĂ©, Nietzsche. Le thĂšme de la vĂ©ritĂ© est intĂ©ressant car dĂ©jĂ  penser en terme de vĂ©ritĂ© prĂ©suppose un courant de pensĂ©e, qui est celui de pouvoir dĂ©finir la vĂ©ritĂ©, de dire qu’elle existe, qu’elle est ». Nous verrons les fondements qui nous font apprĂ©hender le concept de la vĂ©ritĂ© selon le dĂ©veloppement de la pensĂ©e en Occident vers l’installation de la pensĂ©e moderne toujours en vigueur aujourd’hui et nous repĂšrerons les courants de pensĂ©e qui s’en Ă©cartent. Ensuite nous verrons comment la vĂ©ritĂ© cohabite avec les fondements philosophiques de notre thĂ©orie en Gestalt-thĂ©rapie; nous en interrogerons la cohĂ©rence avec notre clinique, c’est Ă  dire notre posture de Gestalt-thĂ©rapeute. Bien sĂ»r, avec cet Ă©crit, j’ai une idĂ©e de la vĂ©ritĂ© meilleure et plus vraie
 VÉRITÉ COMME RÉALITÉ OU VÉRITÉ COMME RAISON Point de vue de la vĂ©ritĂ© comme conformitĂ© de l’idĂ©e au rĂ©el, conformitĂ© avec ce qui est 3Revenons d’abord dans le bain de notre pensĂ©e, ou la vĂ©ritĂ© d’aprĂšs le dictionnaire [1] illustre cette idĂ©e vĂ©ritĂ© = caractĂšre de ce qui est vrai; adĂ©quation entre la rĂ©alitĂ© et l’homme qui la pense. Connaissance conforme au rĂ©el [2] - C’est ce Ă  quoi l’esprit peut et doit donner son assentiment par suite d’un rapport de conformitĂ© avec l’objet de pensĂ©e, d’une cohĂ©rence interne de pensĂ©e [
] 4La vĂ©ritĂ© exprime le reflet de l’adĂ©quation, de la concordance ou non de ce que je dis et la reprĂ©sentation que j’ai du monde avec ce qui est, c’est-Ă -dire la rĂ©alitĂ©. En rapport avec ce qui a Ă©tĂ© dit prĂ©cĂ©demment, on peut dire que la vĂ©ritĂ© est la connaissance exacte du rĂ©el qui peut s’objectiver [3], et c’est exactement ce que je fais lĂ  en cherchant Ă  justifier mon premier Ă©noncĂ© si la vĂ©ritĂ© est la conformitĂ© de l’idĂ©e du rĂ©el » en me rĂ©fĂ©rant au dictionnaire. Dans le dictionnaire les dĂ©finitions reprĂ©sentent une rĂ©fĂ©rence de connaissances objectivĂ©es. Je prends soin de noter la phrase telle qu’elle est, en indiquant lorsque je ne la cite pas tout entiĂšre pour de ne pas dĂ©former la vĂ©ritĂ©, et je cite la source. VĂ©ritĂ© comme concordance avec la rĂ©alitĂ© ou comme rĂ©alitĂ© ou comme raison 5LĂ  s’opĂšrent des glissements les termes vĂ©ritĂ©/rĂ©el, rĂ©alitĂ©/-connaissance/objectivation ont le mĂȘme niveau de sens de par l’usage commun. 6D’oĂč vient ce sens commun de vĂ©ritĂ© = connaissance objective ? 7D’oĂč vient que pour certains la vĂ©ritĂ©, la rĂ©alitĂ© existe ? 8Pour Platon, ce qui est sujet au changement ne mĂ©rite pas le nom d’ĂȘtre, et ne peut pas ĂȘtre l’objet d’une connaissance. La connaissance vraie ne peut ĂȘtre qu’immuable, et l’ñme a la connaissance absolue. Platon cherche les caractĂšres constants dans l’espĂšce et il pense un modĂšle universel, immuable, Ă©ternel les idĂ©es sont plus parfaites que le rĂ©el. Seule est rĂ©elle l’idĂ©e du Bien, le souverain Bien c’est le chapeau des idĂ©es la hiĂ©rarchisation des idĂ©es sera poursuivie par les chrĂ©tiens. Avec Platon s’affirme l’origine de la mĂ©taphysique il y a un bien absolu posĂ© comme extĂ©rieur Ă  l’ĂȘtre humain, posĂ© comme antĂ©rieur Ă  toute action, Ă  toute expĂ©rience. Apartir de la pensĂ©e de Platon, quelque chose d’extĂ©rieur Ă  nous fait rĂ©fĂ©rence, et nous sommes tournĂ©s vers l’abstraction, vers l’intellectualisation, en quĂȘte de ce qui a plus de valeur que le sensible, que notre expĂ©rience. Il est souvent dit que la philosophie commence avec Platon
 Notre pensĂ©e occidentale pense Ă  partir d’une thĂ©orie dualiste, et prĂ©suppose l’existence de deux principes premiers et irrĂ©ductibles les idĂ©es sont mieux que le sensible la rĂ©alitĂ©, et deuxiĂšme dualisme la sĂ©paration de l’ñme immortelle et de la matiĂšre pĂ©rissable. 9Au travers des siĂšcles jusqu’à nos jours, la vĂ©ritĂ© s’affirme comme connaissance, comme savoir. 10Avec Descartes, la raison est le pivot qui permet Ă  l’homme de mettre en jeu toute sa puissance pour acquĂ©rir une connaissance vraie. Descartes amĂšne la notion de sujet, comme un soi stable, connaissable qui connaĂźt le monde Ă  travers la raison. Les idĂ©es fondamentales des LumiĂšres, de la modernitĂ© [4] et de l’humanisme autour de la connaissance et de la vĂ©ritĂ© sont dans les prolongements de Descartes. L’essence de la vĂ©ritĂ© est conçue comme certitude de la reprĂ©sentation, c’est-Ă -dire poser quelque chose devant soi Ă  partir de soi et Ă©tablir ce qui est ainsi posĂ©, en tant que tel, comme certain. 11La modernitĂ© est le courant de pensĂ©e dominant aujourd’hui, avec quelques caractĂ©ristiques [5] en rapport avec la vĂ©ritĂ© le mode de connaissance produit par un soi rationnel objectif est la science », et peut fournir des vĂ©ritĂ©s universelles sur le monde, et le savoir produit par la science est la vĂ©ritĂ© ». La raison est le juge ultime du vrai, donc de ce qui est juste, et de ce qui est bon soit de ce qui est lĂ©gal, et Ă©thique. La libertĂ© consiste Ă  obĂ©ir aux lois qui se conforment aux savoirs dĂ©couverts par la raison. Dans un monde gouvernĂ© par la raison, la vĂ©ritĂ© sera toujours la mĂȘme comme le bien et le juste et le beau; il ne peut y avoir de conflit entre ce qui est vrai et ce qui est juste 
. La science reste donc le paradigme pour toutes les formes socialement utiles de savoir. La science est neutre et objective. PENSER AUTREMENT LA VÉRITÉ 12C’est lĂ  qu’il est intĂ©ressant de constater que Socrate est Ă  la source de la lignĂ©e de pensĂ©e qui en passant par Platon, Aristote, Descartes et d’autres nous fonde jusqu’à aujourd’hui les progrĂšs de la science sont tels qu’ils viennent Ă  imposer le rationalisme [6] comme toute rĂ©fĂ©rence de pensĂ©e et que les vĂ©ritĂ©s issues de l’expĂ©rience sont minimisĂ©es et discrĂ©ditĂ©es. Nous allons voir les auteurs qui nous permettent de nous dĂ©caler de la pensĂ©e dominante qui fait notre fond sans mĂȘme nous en rendre compte. Notre arriĂšre fond culturel est un prĂ©alable Ă©vident [7], tellement Ă©vident que notre pensĂ©e et notre expĂ©rience sont pĂ©nĂ©trĂ©es de ça. De la mĂȘme maniĂšre que nous ne pouvons pas ne pas communiquer, nous ne pouvons pas ne pas interprĂ©ter les choses et les expĂ©riences de notre vie et nous le faisons dans la confluence de nos habitudes de pensĂ©e, sans que celles-ci fassent figure ni sens, ne les apercevant pas. Qu’est-ce que philosopher, et ce de la façon la plus gĂ©nĂ©rale, si ce n’est ouvrir un Ă©cart dans la pensĂ©e ?» François Jullien, 2007, p. 112. 13C’est ce Ă  quoi nous invite François Jullien, penser du point de vue de la Chine lui permet de s’écarter de sa propre culture et apercevoir les socles implicites de la pensĂ©e occidentale. PENSER AUTREMENT LA VÉRITÉ AVEC NIETZSCHE 14Avec Nietzsche s’arrĂȘte toute l’histoire de la mĂ©taphysique [8] et avec elle toute notre conception du monde et notre rapport Ă  celui ci. Nietzsche fait exploser l’idĂ©e de vĂ©ritĂ©. Tout d’abord pour Nietzsche l’interprĂ©tation est infinie, il n’y a pas de faits, il n’y a que des interprĂ©tations, car on peut toujours interprĂ©ter les interprĂ©tations. L’infini de l’interprĂ©tation est notre nouvel infini, nous ne pourrons pas rencontrer une vĂ©ritĂ© ultime, ni produire des idoles c’est-Ă -dire des thĂ©ories qui font rĂ©fĂ©rence. Pour Nietzsche, la volontĂ© de vĂ©ritĂ©, la recherche de la vĂ©ritĂ©, c’est le modĂšle mĂȘme des forces rĂ©actives. Nietzsche distingue deux grandes forces les forces rĂ©actives et les forces actives et son but est de viser leur Ă©quilibre. Les forces rĂ©actives ne peuvent pas produire leurs effets sans mutiler ou annihiler d’autres forces et la vĂ©ritĂ© se pose toujours par rĂ©futation des modĂšles antĂ©rieurs. Les dialogues de Platon commencent par une topique pour parler d’un thĂšme, et Socrate dĂ©truit progressivement toutes les opinions qui sont sur le marchĂ© pour aller en derniĂšre instance Ă  ce qui reste, c’est Ă  dire la vĂ©ritĂ©, ou plutĂŽt sa vĂ©ritĂ©, ayant savamment posĂ© des questions inductrices.... La recherche de vĂ©ritĂ© et la volontĂ© de vĂ©ritĂ© sont des forces trĂšs puissantes. Cette recherche est d’essence dĂ©mocratique, plĂ©bĂ©ienne, car les vĂ©ritĂ©s prĂ©tendent valoir pour tout le monde en tous lieux et prĂ©tendent Ă  l’universalitĂ©. L’idĂ©e dĂ©mocratique conserve une forme semblable Ă  celle de la forme religieuse comme pensĂ©e unique, car c’est un idĂ©al et que l’on ne peut penser qu’avec ça. 15AcĂŽtĂ© des forces rĂ©actives, l’art est une force active, c’est une force qui produit son effet sans mutiler ni s’opposer Ă  d’autres forces. Ce qui a besoin d’ĂȘtre dĂ©montrĂ© ne vaut pas grande chose. L’art pose des valeurs sans avoir besoin de dĂ©montrer qu’il a raison. Si on a besoin de dĂ©montrer on est dans les forces rĂ©actives. En GrĂšce ancienne les sophistes produisent des effets de persuasion sur les gens, ils ne cherchent pas la vĂ©ritĂ©, mais Ă  plaire. La poĂ©sie ne dĂ©montre rien, comme la rhĂ©torique. Socrate dans son discours de recherche de la vĂ©ritĂ©, est rĂ©actif [9]. 16Pour continuer d’illustrer les forces rĂ©actives et actives sur le thĂšme de la vĂ©ritĂ©, Nietzsche dĂ©veloppe dans le Gai Savoir, nous pensons d’ordinaire que les progrĂšs de la science ont repoussĂ© les frontiĂšres de la foi, qu’en devenant plus savants nous sommes devenus moins croyants. Mais cette victoire du savoir sur la foi est bien fragile. Ce n’est mĂȘme pas une victoire du tout, car la foi n’a reculĂ© devant la science que pour mieux la prendre Ă  revers » [10]. C’est sur une foi mĂ©taphysique que repose notre foi dans la science; chercheurs de la connaissance, impies, ennemis de la mĂ©taphysique, nous empruntons encore nous-mĂȘmes notre feu au brasier qui fut allumĂ© par une croyance millĂ©naire, cette foi chrĂ©tienne, qui fut aussi celle de Platon, pour qui le vrai s’identifie Ă  Dieu et toute vĂ©ritĂ© est divine ». La science repose tout entiĂšre sur une croyance celle de la valeur de la vĂ©ritĂ©. La volontĂ© de vĂ©ritĂ© Ă  tout prix, cela pourrait bien ĂȘtre une volontĂ© cachĂ©e de mort. » Nous avons l’art pour ne pas pĂ©rir de la vĂ©ritĂ© ». 17Nietzsche est un prĂ©curseur de la pensĂ©e contemporaine, particuliĂšrement de la post modernitĂ©, et Foucault, Deleuze, Derrida, Lyotard s’en inspirent
 Pour Lyotard la question importante est qui dĂ©cide de ce qu’est le savoir et de ce qui doit ĂȘtre dĂ©cidĂ© ? C’est la poursuite d’une pensĂ©e basĂ©e sur la dĂ©construction y compris les considĂ©rations modernes ou humanistes telles que Ă©valuer le savoir comme vĂ©ritĂ© ses qualitĂ©s techniques, ou comme bien ou justice qualitĂ©s Ă©thiques, ou comme beautĂ© qualitĂ© esthĂ©tique. Penser autrement avec la phĂ©nomĂ©nologie, ouvrir Ă  l’expĂ©rience et laisser de cĂŽtĂ© la vĂ©ritĂ© et la rĂ©alitĂ© 18Husserl remet en question l’idĂ©e de vĂ©ritĂ© et de connaissance immuable, et ne prĂ©suppose aucune thĂ©orie quand Ă  la nature de la connaissance. Comme chez Nietzsche, la dĂ©marche de Husserl rejette la mĂ©taphysique et la philosophie comme vision du monde. La phĂ©nomĂ©nologie met en Ɠuvre une mĂ©thode originale la rĂ©duction phĂ©nomĂ©nologique », qui permet de remonter de l’objet constituĂ© au principe qui le constitue, c’est-Ă -dire Ă  la conscience pure elle-mĂȘme. Dans l’attitude naturelle, le monde est considĂ©rĂ© comme existant, et moi avec dans ce monde. La rĂ©duction phĂ©nomĂ©nologique met entre parenthĂšses cette thĂšse du monde, la suspend. Cette Ă©pochĂš, n’est pas une antithĂšse car la thĂšse du monde reste, mais nous n’en faisons aucun usage. 19Heidegger va plus loin que Husserl qui relĂšve d’une mĂ©taphysique de la subjectivitĂ©, c’est-Ă -dire qui part du sujet conscient de
 ». Heidegger, rĂ©clame que la philosophie en revienne au Lebenswelt, Ă l’homme-dans-le-monde. La phĂ©nomĂ©nologie n’est vraiment retour Ă  la chose mĂȘme que si elle reprend le thĂšme mĂ©taphysique [11] de l’ĂȘtre. La question de la vĂ©ritĂ© est davantage le besoin d’une Ă©lucidation du sens de notre relation Ă  l’ĂȘtre en vue de pĂ©nĂ©trer la structure fondamentale de sa possibilitĂ©. La vĂ©ritĂ© est dĂ©voilement phĂ©nomĂ©nologie veut dire pour Heidegger, faire voir Ă  partir de lui mĂȘme ce qui se montre tel qu’il se montre. L’homme est pensĂ© Ă  partir de sa maniĂšre d’exister et non pas seulement comme conscience. Être vrai, disait dĂ©jĂ  Être et Temps, veut dire ĂȘtre-dĂ©couvert », AlĂȘtheia, c’est l’étant dans le comment de son ĂȘtre-dĂ©couvert ». Cela veut dire au fond que la vĂ©ritĂ©, avant tout Ă©noncĂ© consiste Ă  se tenir devant la chose comme telle, en tant qu’elle-mĂȘme. VĂ©ritĂ© et Dasein sont co-originaires. Avant que le Dasein fĂ»t, aprĂšs que le Dasein ne sera plus, aucune vĂ©ritĂ© n’était ni ne sera, parce qu’elle ne peut alors ĂȘtre en tant qu’ouverture, dĂ©couverte, ĂȘtre-dĂ©couvert » Être et Temps. Heidegger ne sĂ©pare plus l’ĂȘtre du devenir, on ne peut plus dire de l’homme il est » mais il est en train d’ĂȘtre, c’est-Ă -dire un Ă©tant qui est ouvert Ă  la question de l’ĂȘtre. Penser autrement la vĂ©ritĂ© avec le prĂ©socratique HĂ©raclite et avec le taoĂŻsme 20Pourquoi HĂ©raclite et la pensĂ©e chinoise dans un mĂȘme chapitre pour parler de la vĂ©ritĂ© ? HĂ©raclite a vĂ©cu Ă  la mĂȘme Ă©poque que Lao tseu en Chine sans qu’ils se connaissent. Tous deux sont loin de la mĂ©taphysique et sont dans une pensĂ©e de l’immanence, de la totalitĂ©, de l’Un, tous deux dans une pensĂ©e de processus et proches de notre anthropologie en Gestalt-thĂ©rapie [12]. Avant Socrate et Platon, c’est une philosophie de l’immanence, tout ce qui est pensable est ce monde ci, qu’il soit nature, univers, Dieu, substance. Il n’y a pas d’autre perspective, pas d’autre rĂ©alitĂ© que ce monde qui fait l’horizon total de tout l’ĂȘtre, et toutes les idĂ©es d’un au-delĂ  du monde ne sont pas pensables. Le Tao, mutabilitĂ© perpĂ©tuelle et infinie est comme le fleuve d’HĂ©raclite. 21Dans la pensĂ©e chinoise, tout part du Tao, de la Voie, tout est transformation Ă  partir du Qi, souffle, Ă©nergie. Tao c’est ĂȘtre en accord avec le cours des choses, avancer pas Ă  pas dans le droit fil des choses. L’ĂȘtre humain est pensĂ© comme une cristallisation d’énergie cosmique immanente. Le principe du Tao est fondamental des formes sont issues de la transformation et se substituent Ă  d’autres sans cesse, ces formes prennent des aspects fixes car les changements sont plus lents, notre sociĂ©tĂ© Ă  des allures de formes fixes. Mais si l’on n’oublie pas le principe du Tao, la vraie vie est la rĂ©alitĂ© et non pas l’illusion de courir aprĂšs des formes fixes telle la recherche d’une reconnaissance. 22Sans forme constante, puisque tout est changement et transformation, il est impossible d’ériger des modĂšles, des identifications, des essences, des abstractions comme nous le faisons aisĂ©ment en Occident. La pensĂ©e chinoise suit et guette les variations du prĂ©sent et de la situation pour mieux s’y adapter. 23L’exigence de vĂ©ritĂ© est dĂ©pendante de la pensĂ©e de l’ĂȘtre, d’une rĂ©fĂ©rence Ă  un discours de ce qui est. Or en Chine, la pensĂ©e de l’ĂȘtre n’existe pas, et le verbe ĂȘtre n’existe pas sans adjectif. On peut dire Pierre est grand, mais pas Pierre est [13]. 24Que nous dit HĂ©raclite sur la vĂ©ritĂ© ? Le fragment Un nous dit l’Unique est Cela qui est sage savoir que Cela qui connaĂźt gouverne toute chose Ă  travers toute chose»selon C. Ramnoux [14]. On peut entendre par Logos une leçon concernant un principe, pour lequel le nom serait encore l’Unique ou la Chose sage, nommĂ©e de prĂ©fĂ©rence au neutre. Il n’y a pas Ă  distinguer l’un de l’autre, comme la parole se distinguerait du sens, et encore moins Ă  pratiquer la distinction du sujetde la connaissance et de son objet. 
 Savoir lire le Logos Ă  mĂȘme l’expĂ©rience quotidienne est le fait d’un homme en Ă©veil », dont la parole Ă©veille le sens endormi des meilleurs. Quant aux autres hommes, tout ce qu’ils font rĂ©veillĂ©s leur Ă©chappe, comme ils oublient ce qu’ils font endormis ». Quand la sagesse devient raison ou concept, elle donne des appuis Ă  tout pouvoir, Ă  tout gouvernement mais avec cette sagesse-lĂ  nous sommes dans l’ignorance. 25Un autre fragment dit C’est l’hĂ©ritage lĂ©guĂ© Ă  tous les hommes de se connaĂźtre eux-mĂȘmes et de vivre dans la clartĂ© ». Nous avons tous la capacitĂ© de reconnaĂźtre le vrai, car nous sommes la vĂ©ritĂ© elle-mĂȘme. C’est cette vĂ©ritĂ© qui se cherche dans ce que nous appelons notre vie, nos pensĂ©es, nos paroles, nos actes. L’ombre est prĂ©sente en nous afin de confondre ce reflet que nous prenons pour la lumiĂšre et de faire ressortir la vraie lumiĂšre, la lumiĂšre de l’Obscur. C’est pourquoi le sage d’ÉphĂšse dit C’est le propre de notre nature vĂ©ritable de se dĂ©voiler en se recouvrant ». [15] CONCEPT DE VÉRITÉ DANS NOS FONDEMENTS PHILOSOPHIQUES EN GESTALT - THÉRAPIE 26Nous avons vu d’une part comment la pensĂ©e occidentale nous invite Ă  penser la vĂ©ritĂ© comme ce qui est, dans une pensĂ©e qui sĂ©pare l’ĂȘtre du devenir, et d’autre part les philosophes qui remettent en question la notion mĂȘme de vĂ©ritĂ©, soit en choisissant la nature et la vie Nietzsche soit en pensant le processus avec la phĂ©nomĂ©nologie, HĂ©raclite et la pensĂ©e chinoise. Comment nous situons-nous avec nos paradigmes de pensĂ©e en Gestalt-thĂ©rapie ? 27Nous savons Ă  la lecture de Perls, Hefferline et Goodman que la Gestalt-thĂ©rapie oscille entre deux paradigmes, celui d’une psychologie appliquĂ©e et celui d’une phĂ©nomĂ©nologie appliquĂ©e. Si nous prenons le modĂšle de la psychologie appliquĂ©e, c’est une conception qui part d’un sujet, subjectiviste, comme l’a amorcĂ© Descartes et qui a Ă©tĂ© dĂ©veloppĂ©e dans son prolongement par la pensĂ©e moderne jusqu’à aujourd’hui, avec les fondements sur la connaissance et la recherche de vĂ©ritĂ© dans l’objectivation. [16] 28Si nous considĂ©rons le modĂšle d’une phĂ©nomĂ©nologie appliquĂ©e, alors nous changeons de paradigme le sujet ne peut ĂȘtre considĂ©rĂ© que dans une unitĂ© sujet-objet [17], constamment en train de fabriquer de la rĂ©alitĂ© dans l’expĂ©rience de l’ici et maintenant. 29En clinique, s’appuyer sur un savoir se rattachant Ă  des thĂ©ories psychologiques qui font valeur de vĂ©ritĂ© tant qu’elles ne sont pas rĂ©futĂ©es est un point de vue dualiste, qui considĂšre le sujet d’un cĂŽtĂ© et ce que l’on peut en comprendre de l’autre. Nous pouvons dire, et alors ? Est-ce un problĂšme ? PlutĂŽt un choix, et pas toujours en conscience, je m’appuie sur mon expĂ©rience. Une position qui peut affirmer ce qui est, c’est dire aussi ce qui est vrai ou faux, ou bien qui a tort ou raison. C’est une position de savoir et parfois aussi une position de pouvoir, et Jean-Marie Robine a longuement dĂ©veloppĂ© les avatars de cette position et la honte engendrĂ©e. D’autre part, Ă  partir du sujet nous avons dĂ©veloppĂ© tout un systĂšme de pensĂ©e intrapsychique sur ses caractĂšres et son fonctionnement normal et pathologique, qu’il soit mĂ©dical, psychanalytique. ConsidĂ©rer la primautĂ© du sujet, c’est le point de dĂ©part de la posture objectivante de son fonctionnement. Nous sommes tirĂ©s dans un au-delĂ  de l’expĂ©rience par notre focalisation sur la thĂ©orie qui vient dire ce qui est et ce qui n’est pas, et qui va nous confirmer ce que nous voyons ou pas repĂ©rer un signe de la personnalitĂ© narcissique va nous faire chercher tous les autres
 et les trouver. Quand nous ramenons le processus du contact self du P. H. G. ou le processus de la relation self de Gilles Delisle Ă  la thĂ©orie nous nous appuyons Ă  un moment donnĂ© sur une position qui sait et qui dit ce qui est. Construire une hypothĂšse sous tend une dynamique de projet, d’un aller quelque part, vers un ailleurs de la rĂ©alitĂ© premiĂšre. La posture est alors semblable Ă  une entreprise de recherche de la vĂ©ritĂ©, qui s’active pour dĂ©montrer et pour arriver Ă  un rĂ©sultat. 30Que peut nous apprendre Nietzsche ? Sortir de la posture de vĂ©ritĂ©, c’est sortir des jugements, ou de la position rĂ©active. Nous dĂ©veloppons une dynamique rĂ©active quand nous voulons convaincre, quand il s’agit de savoir qui a tort qui a raison, quand nous prenons parti, cela semble Ă©vident. Mais aussi Ă  chaque fois que nous dĂ©tenons une orientation de sens, une interprĂ©tation, une conviction, une explication. Sortir de l’explication pour rejoindre l’explicitation, sortir de ce qui se dĂ©montre pour regarder ce qui se montre, ĂȘtre prĂ©sent Ă  ce qui se passe lĂ , ce sont aussi les principes de la phĂ©nomĂ©nologie et c’est je pense rallier le cĂŽtĂ© des forces actives. EN PRATIQUE LA VÉRITÉ ET LE MODE PERSONNALITÉ 31Certains patients entretiennent leurs vĂ©cus de culpabilitĂ©, d’inadĂ©quation, de honte grĂące » Ă  leur cogito qui se rĂ©fĂšre au savoir, au comprendre. La conscience veut comprendre le comment du pourquoi et compare par rapport aux vĂ©ritĂ©s existantes. Dans ce fonctionnement, chaque modification de la situation est anxiogĂšne et sans cesse le moi les pensĂ©es, les comportements et les ressentis est passĂ© au crible de la comparaison Ă  quelque idĂ©al qui serait plus juste, plus acceptable sans que cette idĂ©e soit d’ailleurs clairement dĂ©finie. Cette dĂ©marche aboutit immanquablement Ă  se juger, par rapport Ă  un idĂ©al dĂ©fini ou pas, et Ă  se haĂŻr. La personne se sent coupable, inadĂ©quate, mauvaise, honteuse, tous ces sentiments Ă  la fois mĂȘlĂ©s. Les moments oĂč cette situation se produit sont quasi permanents, car tous les instants de prĂ©sence sont sujets Ă  cette cruelle analyse. L’inconnu ne peut s’apprĂ©hender, car il est potentialitĂ© de ressentir cette inadĂ©quation et ce qui est le plus redoutĂ© est finalement fabriquĂ©, car il vaut mieux un connu mauvais que de l’inconnu potentiellement mauvais, cela fait au moins un socle pour s’appuyer. Ce cercle vicieux trĂšs contrĂŽlĂ© est difficile Ă  dĂ©samorcer. 32Comment sortir des jugements installĂ©s si intimement dans le mode d’exister ? Le mode personnalitĂ© [18] introduit dans le self ce que je sais de moi, ce que je pense que je suis ». Le mode personnalitĂ© imprĂšgne le sens Ă  donner dans tous les sens du terme, sens comme sensitif, sensation, sentiment et signifiĂ©. Quand l’hypothĂšse de ce que l’on est se rapporte Ă  quelque chose de jugĂ© ou prĂ©jugĂ© non acceptable, toute prise de conscience du mode personnalitĂ© est la rencontre avec ce prĂ©jugĂ©. Le thĂ©rapeute en augmentant la conscience du comprendre peut ainsi donner ren-dez-vous au sentiment d’inadĂ©quation, avec le dĂ©sespoir de n’ĂȘtre que cela. M’appuyant sur mon expĂ©rience, je cherche Ă  comprendre, Ă  mettre du sens, je favorise implicitement Ă  poursuivre la quĂȘte d’autre chose que ce qui se prĂ©sente lĂ , et c’est resserrer davantage le nƓud de l’infernal quand nous cherchons Ă  comprendre Ă  partir des reprĂ©sentations préétablies, les miennes et celle du patient, je l’incite Ă  tourner en rond dans son systĂšme de pensĂ©e aliĂ©nant et sans issue coupable de se sentir coupable, nul de se sentir nul, honteux de se sentir honteux
 Le patient se ressent trĂšs seul, inadĂ©quat et souvent dans la mĂ©connaissance de ces sentiments, ceux-ci n’étant pas pensables. 33La posture phĂ©nomĂ©nologique nous pousse Ă  renoncer Ă  la recherche de vĂ©ritĂ© et de certitude, car penser en termes de processus, fait que l’on ne peut s’arrĂȘter quelque part pour dire cela est ». Le travail du thĂ©rapeute et du client porte sur le vĂ©cu, sur la conscience en train d’ĂȘtre et de donner sens, provisoirement, c’est Ă dire Ă  ce moment-lĂ . Et le rĂ©sultat n’est pas une vĂ©ritĂ©, on ne peut pas parler en termes de vrai ou faux avec la phĂ©nomĂ©nologie mais juste en termes d’expĂ©rience et le sens contient cette expĂ©rience Husserl, principe de l’immanence [19]. 34La pensĂ©e et l’auto-rĂ©flexion vont dans un ailleurs et nous Ă©loignent de tout rapport dans l’immĂ©diatetĂ©. Si je reste dans l’expĂ©rience, attentive Ă  ce qui se passe lĂ  et que je laisse tomber toutes mes pensĂ©es, j’ai l’impression d’ouvrir un espace oĂč il se passe quelque chose d’inhabituel. Cette dĂ©marche participe Ă  l’attention du ça de la situation [20] et Ă  une forme de conscience immĂ©diate et implicite dans le champ, c’est-Ă -dire, l’awareness. Je centre mon attention dĂ©libĂ©rĂ©ment sur ce que je perçois du corps de mon patient. Je nomme mon expĂ©rience et ce que je vois de la posture corporelle, particuliĂšrement la respiration. Je l’invite Ă  prendre conscience de l’expĂ©rience en lui proposant de laisser de cĂŽtĂ© les reprĂ©sentations et les jugements s’ils surviennent et lui propose de se centrer sur les infimes modifications qui surviennent et Ă  les nommer. Le plus important est comment nous habitons notre corps et cet espace en nous appuyant sur les sensations physiques. J’invite Ă  dĂ©crire et je dĂ©cris moi-mĂȘme mon corps dans l’espace avec les caractĂšres que prennent les corps physiques lourd, tendu, large, serrĂ©, dilatĂ©, lĂ©ger, agité  Les sentiments sont dĂ©jĂ  dans une interprĂ©tation par rapport Ă  un rĂ©fĂ©rentiel idĂ©alisant et moralisant. Lorsque le thĂ©rapeute et le patient abolissent la morale comme Nietzsche [21], renoncent Ă  cette dĂ©marche entreprenante du comprendre et choisissent l’audacieuse rĂ©alitĂ© en restant au plus prĂšs de ce qu’il se passe lĂ , dans le sentir lĂ  de la sensation de cette rĂ©alitĂ© premiĂšre, c’est la possibilitĂ© de sentir l’expĂ©rience du touchĂ© touchant quelque chose », de s’ouvrir Ă  l’inconnu de cette expĂ©rience et apprendre de cette nouveautĂ© lĂ , comme nous le promettent Perls et Goodman dans l’ouvrage fondateur de P. H. G. POUR CONCLURE 35Une derniĂšre phrase d’HĂ©raclite DĂšs qu’on ose dĂ©laisser un moment les reprĂ©sentations traditionnelles sĂ©curisantes, l’émerveillement vient ». 36Chaque fois qu’il y a de la culpabilitĂ©, c’est par la rĂ©fĂ©rence Ă  de la morale, Ă  des idĂ©aux. Or nous sommes pleins de rĂ©fĂ©rences, d’idĂ©ologies et donc de jugements implicites. Notre monde, nos conceptions sont rĂ©vĂ©lĂ©es avec nos interventions, notre vocabulaire et l’organisation syntaxique. Prendre conscience des prĂ©alables créés par notre propre culture, c’est la condition pour les dĂ©construire, et nous avons intĂ©rĂȘt Ă  poursuivre ce repĂ©rage de nos habitudes et de nos jugements. 37Je choisis idĂ©ologiquement et oui, je ne vais pas suivre Nietzsche jusqu’au bout, j’ai des idĂ©aux, que je laisserai tomber en partie quand je le pourrai dans la sĂ©ance une posture qui ne sĂ©pare pas l’organisme de l’environnement, oĂč le contact le processus de contact et la conscience que nous en avons ici et maintenant est notre premiĂšre rĂ©alitĂ©. PlutĂŽt que de me rĂ©fĂ©rer Ă  des vĂ©ritĂ©s oĂč la vĂ©ritĂ© est dĂ©finie traditionnellement comme l’adĂ©quation entre le rĂ©el et le discours, je rĂ©fĂšre la posture de la mise entre parenthĂšses du monde objectif rĂ©duction phĂ©nomĂ©nologique, oĂč l’homme donne un sens aux choses et sa vĂ©ritĂ©. 38Les Grecs ont encore beaucoup Ă  nous apprendre. Nous avons vu un petit aperçu de leur potentielle richesse. La rĂ©flexion des prĂ©socratiques est une ressource pour prolonger la pensĂ©e des auteurs contemporains, et il est intĂ©ressant de savoir que Nietzsche puise en partie sa pensĂ©e dans HĂ©raclite, ainsi que Michel Foucault et d’autres penseurs de la postmodernitĂ©. A l’inverse de Platon qui cherche et prĂŽne la stabilitĂ©, l’immuabilitĂ©, l’éternitĂ©, la Chine pense la transformation, le devenir sans cesse et sans fin, et pour François Jullien, les auteurs qui font un pont avec la pensĂ©e du Tao sont les stoĂŻciens, Montaigne et la phĂ©nomĂ©nologie. Que de pistes philosophiques nous pourrions continuer d’explorer pour dĂ©velopper la Gestalt-thĂ©rapie comme processus de contact
 OĂč la rĂ©alitĂ© est l’expĂ©rience et ne sera jamais une vĂ©ritĂ© scientifique
 Notes [1] Le Petit Larousse illustrĂ© 1998. [2] Quel est ce rĂ©el avec lequel il nous faut ĂȘtre conforme ? RĂ©el ici est pris au sens de rĂ©alitĂ©, c’est-Ă -dire ce qui a une existence concrĂšte, par opposition aux apparences, aux illusions ou aux fictions de notre imagination. Comme adjectif qui existe effectivement, et pas seulement Ă  titre d’idĂ©e ou de reprĂ©sentation de mot. [3] L’objet, l’objectivation est tout ce qui est prĂ©sentĂ© par la perception, avec un caractĂšre stable et indĂ©pendant du sujet objet externe. [4] Voir l’article de Mary KLAGE Associate Professor, English Department, University of Colorado qui propose un aperçu des enjeux thĂ©oriques, pratiques, sociaux et culturels qui fondent ce que l’on appelle la pensĂ©e postmoderne, et revient sur la pensĂ©e moderne. Il a Ă©tĂ© traduit par F. BELLAICHE, Directeur de la RĂ©daction de www. psythere. com. [5] Voir l’article de Mary KLAGE. [6] Le rationalisme identifie l’homme Ă  la conscience de soi qui identifiera celle-ci Ă  la raison. [7] F. STAEMMLER, ConfĂ©rences UniversitĂ© d’étĂ© Angers, 2004. [8] Cette question mĂ©rite un dĂ©tour la mĂ©taphysique est la science de ce qui est au-delĂ  des choses physiques, des objets empiriques. En grec Meta phusica » signifie ce qui est au-delĂ  oĂč au-dessus des Ă©lĂ©ments de la nature. La mĂ©taphysique conçoit des thĂšses qui pensent un au-delĂ  de la physique. Elle traite de quelque chose d’éternel, d’immobile et de sĂ©parĂ© », alors que la physique traite de cette sorte de substance qui possĂšde en elle le principe de son mouvement et de son repos ». MĂ©taphysique, nom donnĂ© au livre d’ARISTOTE, Ă  la suite de son ouvrage sur la physique, dĂ©veloppe la thĂ©orie de l’ĂȘtre en tant qu’ĂȘtre. La mĂ©taphysique sous entend la question de la transcendance, de l’absolu, comme idĂ©alitĂ©, Ă©ternitĂ© et perfection, venant rééquilibrer le monde sensible. La vraie vie, le vrai monde se trouvent ailleurs ». Le dĂ©sir de retrouver cet autre monde sera le moteur de toute rĂ©flexion mĂ©taphysique, que celle-ci soit sous la forme d’un savoir absolu, d’un Dieu, de la connaissance, de la rationalité  L’histoire de la mĂ©taphysique offre un ensemble de thĂšses contradictoires, qui retrace toute l’histoire de la philosophie occidentale. [9] Texte issu de Luc FERRY, Apprendre Ă  vivre, Nietzsche et l’avĂšnement de la postmodernitĂ©, FrĂ©meaux et associĂ©s, 2006, Plon. [10] NIETZSCHE, Le gai savoir, Folio, essais, Paris, 1989. [11] MĂ©taphysique est aussi entendu comme ontologie science de l’ĂȘtre en tant qu’ĂȘtre... que les philosophes grecs ont beaucoup interrogĂ©e, avec ParmĂ©nide en particulier. HEIDEGGER reprendra la question de l’ontologie en critiquant la mĂ©taphysique, soutenant que la question de l’ĂȘtre a Ă©tĂ© oubliĂ©e car elle a Ă©tĂ© pensĂ©e Ă  partir de l’étant et non de l’ĂȘtre de l’étant. Depuis SOCRATE et PLATON la mĂ©taphysique demeure dans l’oubli de l’Être », elle a cessĂ©, en effet, de s’interroger sur le sens de ce qui est, car elle crĂ©e des entitĂ©s Dieu, la Substance, les IdĂ©es qui voilent la comprĂ©hension de l’Être » c’est-Ă -dire de ce par quoi les choses sont et ce sans quoi on ne pourrait dire qu’elles sont et la mĂ©taphysique doit ĂȘtre remplacĂ©e par un mode authentique de rĂ©flexion sur la question du sens de l’ĂȘtre. La mĂ©taphysique ne fait pas la distinction entre les Ă©tants », c’est-Ă -dire les choses qui sont les idĂ©es, les hommes, les pierres et les fleurs et l’ĂȘtre des Ă©tants » qui est Ă  leur source mais qui ne peut ĂȘtre dĂ©crit comme un Ă©tant, un objet. [12] Voir 2500 years of Gestalt from Heraclitus to the “big bang” de PetrĂ»ska CLARKSON, in the British Gestalt Journal, 1993,2,4-9. [13] Dans François JULLIEN, Le bonheur vision occidentale et chinoise avec AndrĂ© Comte Sponville, 2006, arte philosophia. [14] C. RAMNOUX, HĂ©raclite, EncyclopĂ©die Universalis. [15] Dans Jean BOUCHARD D’ORVAL, La lumiĂšre de l’obscur, 1997. [16] Nous lisons dans le P. H. G. que l’expĂ©rience est contact de la frontiĂšre entre l’organisme et l’environnement » p 49, la sĂ©paration entre les deux reflĂšte une conception dualiste, mĂ©taphysique. [17] Le P. H. G. dit la frontiĂšre contact oĂč se situe l’expĂ©rience ne sĂ©pare pas l’organisme de son environnement, au contraire, elle limite plutĂŽt l’organisme, le contient, le protĂšge et en mĂȘme temps touche l’environnement » p 51. Dans cette non dissociation de l’organisme et de l’environnement, nous sommes toujours dans un organisme/environnement, et le contact avec le champ organisme/environnement est notre premiĂšre rĂ©alitĂ©. [18] La PersonnalitĂ© c’est le systĂšme des attitudes prĂ©sumĂ©es dans les relations interpersonnelles ; c’est l’hypothĂšse de ce qu’on est, et sert de base Ă  partir de laquelle on expliquerait son comportement si l’explication en Ă©tait demandĂ©e », P. H. G., p 226. [19] Quand le sens est au-delĂ  de l’expĂ©rience immĂ©diate c’est le principe de transcendance. [20] Ce quelque chose, ce ça » de la situation, peut revĂȘtir diverses formes proprioceptions d’une sensation corporelle, perception d’un stimulus environnemental, besoin, dĂ©sir, appĂ©tit, attrait, pulsion, situation inachevĂ©e qui vient croiser le prĂ©sent
 Le concept de ça » dĂ©signe Ă  juste titre cette poussĂ©e, et l’awareness de cette poussĂ©e, sans spĂ©culation aucune de son origine possible. Indissociable de l’awareness, la fonction-ça est une modalitĂ© du self qui, Ă  partir de perceptions et sensations corporelles, constitue en Ă©mergence de figure, l’ensuite » next de la situation. Dans Jean-Marie ROBINE La construction du Soi. [21] NIETZSCHE Par delĂ  le bien et le mal. LECHRETIEN ET LA DÎME. Je voudrais, en ce dĂ©but d'annĂ©e 2019, souhaiter Ă  tous et Ă  toutes, une annĂ©e de grande intimitĂ©, de communion et d'accomplissement avec le Seigneur notre PĂšre et notre Dieu.A prĂ©sent que je renoue avec mes lecteurs dans l'animation de ma page "Devoir de VĂ©ritĂ©", je voudrais partager avec vous cette autre vĂ©ritĂ© du Seigneur sur le privilĂšge dont Oh mon dieu, j'ai honte ! Je viens de constater que ça fait plus d'une semaine que je vous ai laissĂ©es sans post, c'est plutĂŽt terrible ! Mais il y a une explication logique Ă  tout cela, c'est promis ! Et oui, je passe des EXAMENS, c'est-Ă -dire le BAC et les CONCOURS pour Sciences Po oui, en majuscules, c'est plus percutant !. Premier examen ce matin, j'en ai encore pour deux semaines, et les prĂ©cĂ©dentes Ă©taient que des rĂ©visions, youpi ! Donc promis, promis, promis, je vous reviens bientĂŽt, avec encore plus d'articles, encore plus de tests de produits, de manucures et d'histoires farfelues et tout le tintouin ! Mais je ne vous ais pas laissĂ©es toutes seules, hein ? Il y a le giveaway qui se termine le 29 ! contente de voir qu'il vous plaĂźt d'ailleurs ! Donc voilĂ , je vous embrasse, et vous propose de vous faire rĂ©flĂ©chir sur le sujet de philo que j'ai choisi ce matin - Avons-nous le devoir de chercher la vĂ©ritĂ© ? Je dĂ©conne, bien sĂ»r, mais moi j'ai le devoir de vous faire quelques articles d'ici bientĂŽt, c'est promis ! DĂ©cidĂ©ment la vĂ©ritĂ© est un bien trĂšs prĂ©cieux ! Elle confĂšre force et pouvoir, mais surtout elle transforme, apaise, rĂ©conforte, et Ă©claire. Je ne cesserais jamais de le scander : la vĂ©ritĂ© est un droit pour ceux qui la cherchent, et un devoir pour ceux qui la dĂ©tiennent. Il n’y a pour l’instant aucun texte sur cette page ; vous pouvez lancer une recherche sur le titre de cette page ou modifier cette page.
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Sujet Re: Avons-nous un devoir envers la vĂ©ritĂ©? Sam 2 DĂ©c 2006 - 18:39 Tu devrais commencer par chercher dans cet objet Ă©trange qu'on appelle un «livre». "A chacun sa vĂ©ritĂ©", tel est le titre d'une piĂšce du dramaturge italien Luigi Pirandello. Pour Pirandello, il n'y a pas une vĂ©ritĂ©, mais des vĂ©ritĂ©s. Mais s'il en est ainsi, si la vĂ©ritĂ© au singulier est inaccessible ou inexistante, on ne voit pas trĂšs bien en quoi ce serait un devoir de la chercher. Avons-nous le devoir de chercher la vĂ©ritĂ© ?Le mot "devoir" vient du latin debere du prĂ©fixe de et habere, "tenir quelque chose de quelqu'un, lui en ĂȘtre redevable", "ĂȘtre obligĂ©". Le devoir est l'obligation morale considĂ©rĂ©e en elle-mĂȘme. La notion de devoir Ă©voque l'idĂ©e de contrainte et, par suite, le renoncement Ă  la libertĂ©. Le devoir se distingue de la nĂ©cessitĂ© qui s'impose Ă  tous et ne laisse aucune alternative les besoins du corps ; l'obligation implique la volontĂ© et la libertĂ© de choix. Je dois chercher la vĂ©ritĂ© implique que je peux choisir de ne pas la chercher. Le devoir tend Ă  se confondre avec l'obligation, bien que toute obligation ne soit pas un devoir moral. Le devoir, selon Kant, n'est que l'intention et la volontĂ© de bien faire, l'exigence purement dĂ©sintĂ©ressĂ©e, simplement motivĂ©e par le respect de la loi c'est essayer de dĂ©couvrir par un effort de pensĂ©e la solution d'une difficultĂ©, une idĂ©e... chercher la solution d'un problĂšme, examiner, scruter, rĂ©flĂ©chir. "Cherchez et vous trouverez." La Bible. Si on cherche la vĂ©ritĂ©, c'est qu'on ne la possĂšde pas ou qu'on ne sait pas qu'on la nous interrogerons dans une premiĂšre partie sur la notion de vĂ©ritĂ©, puis nous montrerons que tous les hommes ne cherchent pas la vĂ©ritĂ©, et enfin que la recherche de la vĂ©ritĂ© engage la dignitĂ© de l'homme et constitue un projet de recherche de la vĂ©ritĂ© est constitutif de la rĂ©flexion philosophique, et c'est par lui que, dĂšs l'origine, celle-ci s'est dĂ©finie dans la GrĂšce antique. Le mot "Philosophie" aurait Ă©tĂ© crĂ©e par Pythagore. Il signifie "amour de la sagesse" sophia, mais la sophia est en rapport avec "l'alĂ©thĂ©ia" la vĂ©ritĂ© comme dĂ©voilement de l’Être, du Logos. Pour les PrĂ©socratiques, ce n'est pas l'homme qui dĂ©couvre la vĂ©ritĂ©, mais la vĂ©ritĂ© qui se rĂ©vĂšle Ă  Philosophie de Platon illustre la triple idĂ©e autour de laquelle se formule le projet de vĂ©ritĂ© la vĂ©ritĂ© existe et peut se rĂ©vĂ©ler Ă  l'homme ; la vĂ©ritĂ© ne rĂ©side pas dans un savoir Ă©tranger que l'on rĂ©pĂ©terait comme un perroquet ; connaĂźtre la vĂ©ritĂ© que l'on porte en soi passe par la "maĂŻeutique" littĂ©ralement accouchement de l'esprit ; la vĂ©ritĂ© ne se confond pas avec l'opinion, elle est permanente et universelle. La vĂ©ritĂ© n'est pas une notion purement "intellectuelle", elle est en relation avec le Bien et avec le Beau. Le but de la vie, pour la plupart des penseurs grecs est le bonheur eudaĂŻmon et le bonheur rĂ©side dans la pensĂ©e vraie, enracinĂ©e dans la vie bonne."L'allĂ©gorie de la caverne", exposĂ©e par Platon dans le Livre VII de La RĂ©publique met en scĂšne des hommes enchaĂźnĂ©s et immobilisĂ©s dans une demeure souterraine qui tournent le dos Ă  l'entrĂ©e et ne voient que leurs ombres et celles projetĂ©es d'objets au loin derriĂšre affirme que ces prisonniers nous ressemblent parce que nous sommes, nous aussi "prisonniers" ; prisonniers du monde sensible nous prenons ce que nous pouvons voir, entendre, sentir et toucher pour l'unique rĂ©alitĂ© et parce que nous sommes "enchaĂźnĂ©s" Ă  nos sommes Ă©galement "prisonniers" de l'opinion la doxa, des idĂ©es toutes faites, des prĂ©jugĂ©s, de tout ce que nous avons appris sur le monde depuis notre enfance et que nous avons acceptĂ© sans prisonniers ne sont ni malheureux, ni rĂ©voltĂ©s parce qu'ils ne connaissent que le monde dans lequel ils vivent. Il ne leur vient pas Ă  l'esprit qu'il existe un autre monde, plus lumineux, plus vaste, plus beau et plus un commentaire rĂ©cent de La RĂ©publique de Platon, Alain Badiou nous propose une transposition du dĂ©but de l'allĂ©gorie de la caverne Imaginez une gigantesque salle de cinĂ©ma. En avant l’écran, qui monte jusqu’au plafond, mais c’est si haut que tout ça se perd dans l’ombre, barre toute vision d’autre chose que de lui-mĂȘme. La salle est comble. Les spectateurs sont, depuis qu’ils existent, emprisonnĂ©s sur leurs siĂšges, les yeux fixĂ©s sur l’écran, la tĂȘte tenue par des Ă©couteurs rigides qui leur couvrent les oreilles »L'illusion est le produit de l'imitation, de l'instinct grĂ©gaire, de l'Ă©ducation, du temps et de l'habitude. Les prisonniers ne renoncent pas facilement et la plupart, pas du tout Ă  leurs illusions les ombres et les Ă©chos ; le prisonnier dĂ©livrĂ© souffre de regarder les objets la lumiĂšre lui blesse les yeux et il va jusqu'Ă  regretter son ancienne existence ; lorsqu'il redescend dans la caverne, ses anciens compagnons de captivitĂ© se moquent de lui et songent mĂȘme Ă  le mettre Ă  recherche de la vĂ©ritĂ© n'est pas un simple exercice intellectuel. C'est d'abord un double exercice spirituel qui consiste en la conversion radicale de notre facultĂ© de penser et de notre mode de exercice demande Ă  la fois de se dĂ©gager de l'opinion et de rechercher la satisfaction dans l'ĂȘtre plutĂŽt que dans l'avoir. Au terme de cette aventure spirituelle, la vĂ©ritĂ© ne se reconnaĂźt pas au seul moyen d'un critĂšre, elle se montre dans son Ă©vidence. C'est dans cet esprit que Spinoza affirmait verum index sui », la vĂ©ritĂ© est Ă  elle mĂȘme son propre celui qui a contemplĂ© les rĂ©alitĂ©s d'en-haut, le philosophe, le mystique, l'artiste... qui assimile le monde visible Ă  une prison. Une prison est un endroit obscur oĂč rĂšgnent les ombres, un lieu de souffrance et d'expiation. Nous sommes "jetĂ©s" ici-bas dit Pascal, nous y faisons l'expĂ©rience physique et morale de la "limite"... Dans une lettre Ă  son frĂšre ThĂ©o, Vincent Van Gogh dit qu'il se sent dans une "prison Ă©troite, trĂšs Ă©troite".Le philosophe qui a contemplĂ© l'IdĂ©e du Vrai et du Bien a pour mission de dĂ©livrer les autres hommes parce qu'il en va du salut de la CitĂ©. Il peut le faire, comme Socrate en faisant prendre conscience aux hommes qu'ils sont dans l'illusion, que leur savoir est un faux savoir, en les incitant, Ă  temps et Ă  contre temps, Ă  chercher la vĂ©ritĂ© et en donnant, jusque dans la mort, le tĂ©moignage d'une vie philosophique exemplaire, ou comme Platon, en Ă©crivant l'allĂ©gorie de la caverne, en parlant des "choses d'en-haut" et en fondant l'AcadĂ©mie."Contemplare atque aliis contemplata tradere" contempler et transmettre aux autres ce que l'on a contemplĂ© dira saint Thomas d'Aquin quelques siĂšcles plus tard, Ă  l'instar de Platon se livrer Ă  la contemplation dans le cloĂźtre, mais aussi et surtout, transmettre aux autres dans le siĂšcle ce qui a Ă©tĂ© ceux-lĂ  seuls qui se sont approchĂ©s du Feu peuvent en attiser la devoir ne se confond pas avec la nĂ©cessitĂ©. Nous ne sommes pas obligĂ©s de chercher la vĂ©ritĂ©. Nous pouvons mĂȘme passer notre vie entiĂšre Ă  chercher autre chose, y compris le mensonge et l' cette "libertĂ© d'indiffĂ©rence" n'est pas la vĂ©ritable libertĂ©. La vraie libertĂ©, selon Descartes, consiste Ă  nous dĂ©terminer en fonction de valeurs telles que la vĂ©ritĂ© et le nous avons le devoir de chercher la vĂ©ritĂ©, ce devoir ne nous est pas imposĂ© de l'extĂ©rieur. Il ne peut reposer que sur notre libre consentement. La vĂ©ritĂ© ne rĂ©side pas dans une doctrine ; elle n'est la propriĂ©tĂ© de personne. Elle n'est pas "Ă  toi" ou "Ă  moi" disait Maurice Merleau-Ponty, mais "entre nous". Dans la thĂ©ologie patristique hĂ©ritĂ©e de la tradition juive, le texte saint est un "jeu symbolique" il ouvre au sens, car comme pour Socrate la clĂ© de l'ouverture est le questionnement. "La gloire de Dieu, c'est de cacher les choses; La gloire des rois, c'est de sonder les choses." Salomon, Proverbes, Nous avons le devoir de chercher la vĂ©ritĂ©, comme nous avons le devoir de la laisser quand nous pensons l'avoir trouvĂ©e, de la trouver pour la chercher l'Histoire de l'HumanitĂ©, nous constatons que les hommes et les femmes qui ont vĂ©cu pour la vĂ©ritĂ© et le bien ont vĂ©cu une vie plus humaine ; quand nous pensons Ă  un ĂȘtre humain pleinement rĂ©alisĂ©, nous pensons Ă  Socrate, Ă  EpictĂšte ou Ă  Marc-AurĂšle ; nous ne pensons pas Ă  CrĂ©sus, Ă  CalliclĂšs ou Ă  NĂ©ron. Nous pensons Ă  Gandhi, Ă  Abraham Heschel ou Ă  Martin Luther nous avons le devoir de chercher la vĂ©ritĂ© et non simplement le savoir, c'est parce que nous avons le devoir de devenir des hommes "vĂ©ritables" et si nous avons ce devoir, c'est que son humanitĂ© n'est pas donnĂ©e Ă  l'homme, mais doit ĂȘtre conquise. "Et il me sera loisible de possĂ©der la vĂ©ritĂ© dans une Ăąme et dans un corps." Arthur Rimbaud, derniĂšre phrase d'Une saison en enfer Laperception sensible, cette expĂ©rience directe et vĂ©cue qui a certes la force irrĂ©cusable de la prĂ©sence n’a pas pour autant le privilĂšge de la vĂ©ritĂ© et elle n’est mĂȘme pas le critĂšre indispensable de celle-ci. Nous avons besoin de croire au-delĂ  de ce que nous voyons, et nous avons le devoir de douter, si nous cherchons la vĂ©ritĂ©, de ce qui nous apparaĂźt comme le 403 ERROR The Amazon CloudFront distribution is configured to block access from your country. We can't connect to the server for this app or website at this time. There might be too much traffic or a configuration error. Try again later, or contact the app or website owner. If you provide content to customers through CloudFront, you can find steps to troubleshoot and help prevent this error by reviewing the CloudFront documentation. Generated by cloudfront CloudFront Request ID oRb38FMtxCkfjqAGJllSran2gLX5M_iHUMIKTesA7Yq-uXAEeAXoTw== Nousavons rompu le contact avec la nature et nous prĂ©fĂ©rons chercher notre vĂ©ritĂ© sur Internet. La quĂȘte du sens plutĂŽt que la quĂȘte de vĂ©ritĂ© vraie. Nos cerveaux cherchent en permanence
Passer au contenu C’est sur ce thĂšme qu’ont planchĂ© les candidats au baccalaurĂ©at scientifique 2012 hier matin. La question vous inspire-t-elle ? Qu’auriez-vous rĂ©pondu Ă  leur place ? Philosopher est tout un art
 qui s’apprend ! Pour briller en sociĂ©tĂ©, se coucher un peu plus savant que la veille, ou encore Ă©clairer les enfants dans leurs questionnements quotidiens, voici une sĂ©lection de collections Milan prĂȘte Ă  penser » Pour les adultes, la collection CarrĂ© philo » suggĂšre 80 citations, pensĂ©es ou maximes sur des thĂšmes spĂ©cifiques la libertĂ© avec Les Mots pour ĂȘtre libre par exemple, l’amour, le voyage,
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Quoide plus naturel qu’un journal toujours au plus prĂšs de l’actualitĂ© comme le notre et cherchant Ă  reproduire la vĂ©racitĂ© des faits se penche sur l’une des questions du bac de philosophie qui avait lieu lundi. Cette question, la voici : «Quel besoin avons- nous de chercher la vĂ©ritĂ© ?» Afin de rĂ©pondre Ă  ce questionnement

Voici le texte intĂ©gral du document des Ă©vĂȘques du Conseil permanent. Nous vous invitons Ă  lire la prĂ©face de Monseigneur Michel Aupetit, archevĂȘque de Paris, l’introduction rĂ©digĂ©e par les membres du Conseil permanent, enfin la postface de Monseigneur Jean-Pierre Batut, Ă©vĂȘque de Blois. PrĂ©face de Mgr Aupetit L’Église a-t-elle quelque chose Ă  dire aux hommes ? » Que faut-il dire aux hommes ? » C’est par le titre de Saint-ExupĂ©ry dans sa Lettre au gĂ©nĂ©ral X [1]que je voudrais ouvrir l’ouvrage que les Ă©vĂȘques de France proposent Ă  la rĂ©flexion de tous. La question en entraĂźne une autre Qu’est-ce que l’homme ? ». Le psalmiste oscille entre le sentiment de l’extrĂȘme fragilitĂ© de la vie de l’homme et celui de l’émerveillement devant l’inaliĂ©nable grandeur de sa vie L’homme n’est qu’un souffle, les fils des hommes, un mensonge »[2] ; Tu l’as fait un peu moindre qu’un dieu, le couronnant de gloire et d’honneur »[3] L’homme est un mystĂšre de faiblesse et de splendeur, tour Ă  tour misĂ©rable esclave et capable de la libertĂ© suprĂȘme, celle d’aimer jusqu’au don total de sa vie. Adam n’est que terre, mais il a reçu le souffle de Dieu. En tout homme, fĂ»t-il le plus obscur, brille le don d’une Ăąme immortelle. Une autre question se pose l’Église a-t-elle quelque chose Ă  dire aux hommes ? On accuse souvent les religions d’ĂȘtre indistinctement facteur de violence. Toute lĂ©gitimation de la violence au nom de la foi chrĂ©tienne est en radicale contradiction avec l’Évangile Nous proclamons un Messie crucifiĂ©, scandale pour les juifs et folie pour les paĂŻens, mais pour ceux que Dieu appelle 
 il est puissance de Dieu et sagesse de Dieu »[4]. Le Seigneur a assumĂ© comme prĂȘtre et victime la puissance du Mal et de la mort pour tout vaincre dans la lumiĂšre de sa rĂ©surrection. Notre foi en JĂ©sus ressuscitĂ© est solide, attestĂ©e par les apĂŽtres qui ont vu, entendu et touchĂ© » le Verbe de Vie[5]. Elle est proclamĂ©e par le peuple immense des tĂ©moins qui ont engagĂ© leur vie par fidĂ©litĂ© au Christ, souvent jusqu’à la mort. Pour qui en reste Ă  un regard extĂ©rieur, l’Église apparaĂźt en Occident comme une institution vieillie et secouĂ©e de scandales, qui entrave le mythe d’un progrĂšs que l’on invoque sans trop savoir oĂč il mĂšne. Mais l’Église est belle pourtant dans le visage de ses saints, dans l’immense manteau de tendresse qu’elle Ă©tend sur le monde, particuliĂšrement sur les plus dĂ©laissĂ©s des hommes. Elle est experte en humanitĂ© »[6] car sa foi repose sur l’Alliance de Dieu avec son peuple, accomplie dans l’Incarnation du Christ et le Salut par la Croix, ouvert Ă  la multitude des hommes de toute race, langue, peuple et nation ».[7] L’oubli de Dieu, l’estompement de la conscience de l’éternitĂ© dans le cƓur de l’homme entraĂźne l’effacement de la dignitĂ© humaine. Le drame de l’humanisme athĂ©e qui a ravagĂ© le XXe siĂšcle a vu, dans des proportions jusqu’alors inĂ©galĂ©es dans l’histoire, la mort de l’innocent. La tentation promĂ©thĂ©enne demeure. Elle ne pourra exaucer les hommes dans leur dĂ©sir d’une vie Ă©ternelle. Elle sacrifie les plus fragiles sur l’autel d’une prĂ©tendue modernitĂ©. Nous proclamons, Ă  temps et Ă  contretemps, la dignitĂ© inaliĂ©nable de toute vie humaine en ce monde. JĂ©sus, le Fils de Dieu fait homme, est l’amour divin dĂ©ployĂ© dans la vulnĂ©rabilitĂ© de la chair. Une sociĂ©tĂ© est vraiment humaine quand elle se fait gardienne du plus petit des ĂȘtres. Il faut imaginer Sisyphe heureux »[8]. La parole de Camus sur l’homme condamnĂ© Ă  rouler Ă©ternellement son rocher est celle de l’acceptation de l’absurde. Avec saint Ignace d’Antioche, nous voulons dire une autre parole Il y a en moi une eau vive et qui murmure viens vers le PĂšre »[9]. Laissez-moi simplement vous poser la question quelle est votre espĂ©rance ? Puisse cet ouvrage vous donner de devenir davantage ce que vous ĂȘtes en vous ouvrant Ă  Celui qui est », le Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob, dont la gloire resplendit sur la Face du Christ. [1] A de SAINT-EXUPERY, Que faut-il dire aux hommes, Lettre inĂ©dite au gĂ©nĂ©ral X, Imprimerie gĂ©nĂ©rale du sud-ouest, Bergerac, 1949. [2] Ps 39. [3] Ps 8. [4] I Co 23-24. [5] Cf. I Jn 1, 1. [6] Bx PAUL VI, Lettre encyclique Populorum progressio, 1967, I, 13. [7] Ap 5, 9. [8] Albert CAMUS, Le Mythe de Sisyphe, NRF, Gallimard, 1965, p. 198. [9] S. IGNACE D’ANTIOCHE, Lettre aux Romains, 7. Introduction au document qu’il est exaltant d’ĂȘtre humain face aux dĂ©fis ! » L’Église catholique tient Ă  proclamer un grand oui Ă  la vie humaine » CongrĂ©gation pour la Doctrine de la Foi, instruction Dignitas Personae, 1. Elle dĂ©fend le dĂ©veloppement de la personne humaine dans toutes ses dimensions. L’Église voudrait redire combien il est exaltant d’ĂȘtre humain face Ă  ces dĂ©fis. L’Ecriture le chante Qu’est-ce que l’homme pour que tu penses Ă  lui, le fils d’un homme, que tu en prennes souci ? Tu l’as voulu un peu moindre qu’un dieu, le couronnant de gloire et d’honneur, tu l’établis sur les Ɠuvres de tes mains, tu mets toute chose Ă  ses pieds » Ps 8, 5-7. Aujourd’hui l’homme fait face Ă  de grands dĂ©fis et Ă  de grandes tentations. Le progrĂšs donne Ă  l’homme des potentialitĂ©s exaltantes mais crĂ©e aussi des menaces inquiĂ©tantes. D’une part, il est menacĂ© par la catastrophe Ă©cologique, d’autre part certains parlent de le remplacer par un homme augmentĂ© ou mĂȘme un post-humain ». Nous nous interrogeons sur sa dignitĂ©, sa vocation, son destin dans l’univers. Nous nous effrayons de ses crimes. Beaucoup rĂ©clament sans cesse de nouveaux droits qui posent des problĂšmes redoutables. C’est pourquoi il a Ă©tĂ© jugĂ© utile de proposer quelques pistes de rĂ©flexion sans doute partielles[1] sur ces interrogations concernant la personne humaine, sa beautĂ©, sa dignitĂ©, son droit de s’accomplir pleinement. Tu nous as fait pour Toi, Seigneur, et notre cƓur est sans repos tant qu’il ne repose en Toi » Saint Augustin, Confessions I, i, 1. Dieu a créé l’homme Ă  son image et Ă  sa ressemblance pour l’unir Ă  lui dans l’Amour qui est la vie Ă©ternelle. L’homme n’est pas fait pour se contenter de cette vie-ci, il est appelĂ© Ă  plus grand, en vivant dĂšs maintenant l’amour. Plus radicalement encore, l’homme ne trouve pas sa fin en lui-mĂȘme, il est appelĂ© Ă  se donner aux autres et Ă  Dieu pour s’accomplir. En l’appelant Ă  l’existence par amour, il l’a appelĂ© en mĂȘme temps Ă  l’amour Jean-Paul II, Familiaris consortio, 11. Par cet appel, l’homme est une personne, Ă  la fois intĂ©rioritĂ© et relation, il se reçoit toujours d’un autre, Ă  commencer par l’Autre par excellence qu’est le CrĂ©ateur. [1] Par souci de mĂ©thode, les questions Ă©conomiques et sociales seront trĂšs peu abordĂ©es ici. Partie I L’Être humain est une personne Créé et appelĂ© par DieuCréé et appelĂ© par Dieu, chacun de nous est une personne. Cette affirmation comporte une part de mystĂšre. La personne ne peut pas ĂȘtre dĂ©finie comme un crayon ou une table parce qu’elle est créée Ă  l’image et ressemblance de Dieu et porte quelque chose de son mystĂšre. Mais il est possible de montrer ce que la personne possĂšde en propre qui la rend supĂ©rieure Ă  toute autre chose. La personne est appelĂ©e par Dieu Ă  se donner librement Ă  lui. Sa libertĂ© se dĂ©termine par sa raison. L’exercice libre de la raison rend la personne responsable, apte Ă  Ă©couter sa conscience pour y Ă©couter Dieu, ce qui l’ouvre Ă  la transcendance. La personne est appelĂ©e tout entiĂšre, corps, Ăąme et esprit. Voir les Ă©clairages du PĂšre Emmanuel Coquet AppelĂ© Ă  la libertĂ©Souverainement libre et aimant, Dieu ne peut appeler Ă  s’unir Ă  lui que dans la libertĂ©. Il a donc crĂ©e l’homme libre. Cette libertĂ© s’accomplit par l’amour qui tient dans le don de soi. Cette libertĂ© comporte une insatisfaction qui pousse l’homme Ă  chercher plus grand que ce monde-ci. La personne est libre. Ses actes ne peuvent s’expliquer complĂštement par des causes extĂ©rieures telles que la gĂ©nĂ©tique, son histoire, le milieu ou la configuration du cerveau. Chacun de nous sent bien que ses dĂ©cisions lui appartiennent en propre. Chacun est vraiment maĂźtre de sa vie. Cette libertĂ© permet en particulier Ă  l’homme de choisir le Bien pour le Bien et non par instinct ou calcul stratĂ©gique. Cette libertĂ© innĂ©e, nommĂ©e libre arbitre, pousse l’homme Ă  chercher la libertĂ© sociale et politique. Il se rĂ©volte contre toute forme d’oppression contraire Ă  sa dignitĂ©. Mais le libre arbitre n’est pas capacitĂ© indiffĂ©rente de faire n’importe quoi. Il n’est pas non plus autorisation de faire tout ce qu’on veut comme si nos actes ne concernaient que nous. Le libre arbitre deÂŽ sire le Bien total. Il est appelĂ© par Dieu Ă  s’unir Ă  Lui dans l’amour. Il se rĂ©alise donc pleinement par cet amour. La science a souvent tendance Ă  nier ce libre arbitre en appliquant Ă  l’homme des modĂšles qui sont valables pour l’univers inanimĂ©. C’est ainsi qu’à notre Ă©poque, les neurosciences se font fortes de percer les mystĂšres de l’esprit humain et de dĂ©montrer que l’homme est dĂ©terminĂ© par la structure de son cerveau. Sans rien nier des formidables dĂ©couvertes apportĂ©es par ces sciences, nous ne pouvons souscrire Ă  cette affirmation. Mon cerveau ne me dĂ©termine pas. Quelle que soit leur importance, les biens limitĂ©s de ce monde ne peuvent apaiser notre soif. Tous, nous cherchons un Bien suprĂȘme qui nous procure le bonheur. Notre libertĂ© porte en elle une insatisfaction qui la pousse Ă  chercher autre chose que ce monde-ci et ses biens relatifs. La libertĂ© de la personne ne s’accomplit jamais seule. Elle a besoin de s’allier Ă  la libertĂ© des autres pour atteindre sa fin vĂ©ritable qui est le bonheur. Ce libre arbitre est Ă©galement besoin de se donner. Il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu’on aime » Jn 15, 13. La personne n’est pas faite pour poursuivre son intĂ©rĂȘt de maniĂšre Ă©goĂŻste. Elle est destinĂ©e Ă  s’ouvrir aux autres. C’est ainsi que les rĂ©gimes d’oppression ont vu se lever des hommes et des femmes prĂȘts au sacrifice suprĂȘme pour rĂ©tablir la justice. La libertĂ© comporte donc le devoir de respecter la libertĂ© d’autrui. La libertĂ© de l’homme ne flotte pas en l’air, elle est situĂ©e. Elle apparaĂźt dans un lieu et une eÂŽpoque, une culture, des conditions de vie. Elle est par lĂ  mĂȘme limitĂ©e. LimitĂ©e parce qu’elle est finie, limitĂ©e par les Ă©lĂ©ments qui l’environnent, limitĂ©e par la libertĂ© d’autrui. En rĂȘvant orgueilleusement de s’affranchir de ses limites, l’homme se dĂ©truit et blesse la fraternitĂ©. En les accueillant humblement comme un chemin de vĂ©ritĂ© , il s’accomplit. Qui s’élĂšve sera abaissĂ©, qui s’abaisse sera Ă©levĂ© » Lc 14, 11. La libertĂ© ainsi comprise appartient Ă  la beautĂ© de l’homme capable de surmonter les obstacles et d’ouvrir de nouvelles routes de progrĂšs humain. Si bien du travail reste Ă  faire, la fin du XXe siĂšcle a vu s’effondrer plus d’un rĂ©gime oppressif qui se croyait dĂ©finitif. Osons croire en cette libertĂ©. L’homme sent bien qu’il est divisĂ© intĂ©rieurement. S’il se regarde avec honnĂȘtetĂ©, chacun de nous avouera des complicitĂ©s avec le mal en lui-mĂȘme. Car je ne fais pas le bien que je veux, et je fais le mal que je ne veux pas » Rm 7, 19 dit saint Paul. La libertĂ© de l’homme a Ă©tĂ© blessĂ©e par le pĂ©chĂ©. Le pĂ©chĂ© vient dresser la volontĂ© contre elle-mĂȘme. Cette situation se rĂ©vĂšle spĂ©cialement dans les diffĂ©rentes addictions comme la toxicomanie ou la pornographie. Mais avec l’aide de JĂ©sus-Christ, l’homme peut surmonter cette division et trouver la paix. Je peux tout en celui qui me rend fort » Ph 4, 13 dit le meˆme saint AppelĂ© Ă  la vĂ©ritĂ©La libertĂ© n’est pas aveugle, elle se dĂ©termine par la raison que Dieu a dĂ©posĂ©e en l’homme. Par sa raison, la personne est faite pour la vĂ©ritĂ©. Elle est capable de trouver la vĂ©ritĂ© parce qu’elle est intĂ©rioritĂ©. Nous avons tous besoin de la vĂ©ritĂ©. L’homme ne se satisfait pas des apparences, il veut connaĂźtre la nature profonde des choses. Il dĂ©sire possĂ©der la vĂ©ritĂ© pour elle-mĂȘme. Il y a quelque chose d’exaltant dans la dĂ©couverte de la vĂ©ritĂ©, dans le progrĂšs des connaissances humaines, portĂ© si loin ces derniers siĂšcles. La vĂ©ritĂ© est universelle. Elle est faite pour l’humanitĂ© entiĂšre. Le besoin de vĂ©ritĂ© est la source de tout dialogue. L’amour de la vĂ©ritĂ© permet le dialogue et en mĂȘme temps le dialogue suppose l’amour de l’autre. Dans l’amour commun de la vĂ©ritĂ© et de l’homme, le dialogue permet Ă  chacun d’avancer librement. De mĂȘme, tout homme a droit Ă  la vĂ©ritĂ©. Les programmes d’aide sociale envers les plus dĂ©favorisĂ©s doivent comporter l’éducation pour respecter ce droit Ă  la vĂ©ritĂ© de tous. La recherche de la vĂ©ritĂ© suppose aussi l’humilitĂ©. Celui qui s’enferre dans ses certitudes, son idĂ©ologie, se voue Ă  l’illusion. La vĂ©ritĂ© se trouve en acceptant de grandir et pour cela d’avoir besoin des autres. La parole des plus petits est prĂ©cieuse, en particulier quand elle crie leurs dĂ©tresses et leurs espĂ©rances, car elle aussi porte la vĂ©ritĂ©. C’est pourquoi le mensonge est contraire Ă  la dignitĂ© de l’homme. AprĂšs des siĂšcles trĂšs rationalistes, notre Ă©poque est traversĂ©e de doutes sur les capacitĂ©s de la raison humaine. Les Ă©checs du progrĂšs, les menaces nouvelles, le choc des cultures, tendent Ă  provoquer un relativisme ou un scepticisme. Cet excĂšs est aussi mortifĂšre que le prĂ©cĂ©dent. Nous en arrivons Ă  une Ăšre de la post-vĂ©ritĂ© » oĂč de soi-disant faits alternatifs » viendraient remplacer le besoin de vĂ©ritĂ©, Ăšre Ă  laquelle nous ne pouvons pas nous rĂ©signer. Maintenue dans ses justes limites, Ă©clairĂ©e par l’amour, la raison humaine est vraiment capable de connaĂźtre l’univers et de proposer de nouvelles solutions. Elle n’a pas fini de nous Ă©merveiller. Si la raison peut ĂȘtre Ă©clairĂ©e par la RĂ©vĂ©lation, la vĂ©ritĂ© ultime que cherche l’homme, sur Dieu, sur lui-mĂȘme, est inaccessible Ă  la raison, aussi puissante que puisse ĂȘtre celle-ci. Elle a Ă©tĂ© rĂ©vĂ©lĂ©e par le Christ, qui est Ă  la fois le chemin, la vĂ©ritĂ©, la vie » Jn 14, 6. AppelĂ© Ă  la responsabilitĂ©L’homme est appeleÂŽ a` reÂŽpondre selon sa liberteÂŽ eÂŽ claireÂŽ e par sa raison a` l’appel de Dieu. Il est donc responsable. S’assumer comme personne libre suppose d’exercer cette responsabiliteÂŽ . L’eÂŽducation doit veiller a` faire naıˆtre chez les jeunes ce sens de la responsabilite ÂŽ . L’homme est responsable de luime ˆme, des autres et de l’univers. La catastrophe eÂŽ cologique qui nous menace deÂŽmontre ce point l’homme a un devoir de bonne geÂŽrance sur la creÂŽation qui lui a eÂŽ teÂŽ confieÂŽ e par Dieu. S’il n’assume pas ce devoir, il creÂŽe des drames dont il est la premie` re victime. Cet exemple de la responsabilite ÂŽ eÂŽcologique deÂŽmontre aussi que s’assumer libre ne peut pas signifier suivre ses deÂŽ sirs sans frein, faire comme si l’on eÂŽ tait seul au monde. Les actes de chacun ont des reÂŽpercussions sur tous. Les actes ont aussi valeur d’exemples. Par exemple, le groupe des eÂŽveˆques chargeÂŽ de la bioeÂŽthique a signaleÂŽ que le suicide assisteÂŽ ne peut pas eˆ tre preÂŽsenteÂŽ comme un choix individuel sans conseÂŽquence pour les autres. En choisissant le suicide assisteÂŽ en raison de leur aˆ ge ou de leur maladie, les personnes font peser sur les autres malades et personnes aˆ geÂŽes le soupcžon d’eˆ tre en trop, encombrantes ou trop couˆ teuses. Nous sommes responsables les uns des autres. En particulier, nous sommes responsables de ceux qui parmi nous souffrent le plus ou sont blesseÂŽs dans leur humaniteÂŽ . Nous ne pouvons pas regarder ailleurs et faire comme si cela ne nous concernait pas. Mais l’aide indispensable que nous leur devons doit aussi respecter leur liberteÂŽ et les aider a` exercer leur propre responsabiliteÂŽ . Notre eÂŽpoque a des proble`mes avec la responsabilite ÂŽ . Elle oscille entre la tentation de deÂŽresponsabiliser l’homme, de le laisser a` sa liberteÂŽ abaisseÂŽe au rang de caprice, et celle de deÂŽ signer des boucs eÂŽ missaires. D’un coˆ teÂŽ , l’ideÂŽe d’une liberteÂŽ laisseÂŽe seule a` elle-meˆme sans loi induit la fin de toute responsabiliteÂŽ devant les autres et Dieu. De l’autre, les drames qui font la une des journaux imposent qu’il y ait un responsable et comme l’eÂŽpoque ne sait plus exercer cette responsabilite ÂŽ , elle revient sous des formes folles en lynchant un individu pris presque au hasard pendant que les autres se lavent les mains de proble`mes qui souvent rele`vent de l’ensemble de la communauteÂŽ. En reÂŽ aliteÂŽ , la responsabilite ÂŽ est l’exercice pleÂŽnier de la liberteÂŽ . Dieu a laisseÂŽ l’homme a` son propre conseil, non pour qu’il suive aveugleÂŽment ses instincts qui ne suffisent pas a` eÂŽ clairer entie`rement ses choix, mais pour qu’il puisse se donner aux autres et a` Lui-meˆme en toute liberteÂŽ . C’est pourquoi chacun de nous reÂŽpondra de ses actes devant Dieu. L’EÂŽ vangile manifeste que ce jugement dernier portera sur la conduite envers les plus petits Ce que vous faites au plus petit d’entre mes fre` res, c’est a` moi que vous le faites » Mt 25, 40. Nous ne serons pas jugeÂŽs sur des performances extraordinaires mais sur notre solidariteÂŽ avec les plus Conscience et Loi naturelleLa responsabilitĂ© de l’homme est sa rĂ©ponse Ă  l’appel de Dieu. C’est pourquoi l’homme est dotĂ© d’une conscience morale, un sanctuaire intĂ©rieur oĂč Dieu lui parle, oĂč il juge ses propres actes, se louant quand il fait le bien, se condamnant quand il fait le mal. Dans cette conscience, Dieu y a dĂ©posĂ© la loi morale. Cette loi morale, qui est appelĂ©e loi naturelle, n’est pas la loi de la nature au sens des animaux. Du point de vue de l’homme, il est sans intĂ©rĂȘt de savoir si la monogamie ou l’homosexualitĂ© existent chez les animaux d’ailleurs, les animaux ne connaissent pas l’interdit de l’inceste. La loi naturelle est la loi de la nature humaine, qui dit ce qu’il est bon que l’homme fasse pour trouver le bonheur. Cette nature humaine ne s’oppose pas Ă  la culture, car il est de la nature de l’homme de gĂ©nĂ©rer des cultures. L’homme a le devoir de toujours suivre sa conscience. Il ne doit pas en ĂȘtre empĂȘchĂ© par les autres tant que cela ne nuit pas Ă  l’ordre public juste. TrĂšs spĂ©cialement, l’homme doit ĂȘtre laissĂ© libre de suivre sa conscience en matiĂšre religieuse, car se donner par contrainte Ă  Dieu est indigne et de l’homme et de Dieu. Mais la conscience est marquĂ©e par le pĂ©chĂ©. Elle peut ĂȘtre obscurcie par des habitudes malsaines du groupe ou par l’accumulation des pĂ©chĂ©s personnels. Un enfant qui grandit dans un milieu oĂč le vol est habituel trouvera normal de voler. Un individu qui s’est habituĂ© Ă  mentir n’y verra plus de difficultĂ©s. Il faut Ă©clairer la conscience par la voix de la sagesse et l’écoute de la Parole de Dieu. C’est particuliĂšrement la responsabilitĂ© des Ă©ducateurs, Ă  commencer par les parents. Mais la voix de la conscience ne s’éteint jamais complĂštement, car elle est la voix mĂȘme de Dieu. Ne desesperons jamais de personne ! Toute personne humaine est capable d’à nouveau Ă©couter sa conscience pour revenir au Ouverture Ă  la transcendanceParce qu’elle est dotĂ©e d’une conscience oĂč Dieu lui parle, la personne est ouverte Ă  la question religieuse. Depuis les origines, les civilisations humaines rĂ©flĂ©chissent Ă  la signiïŹcation de l’univers, Ă  la destinĂ©e ïŹnale de l’homme, et Ă  l’existence de Dieu. Ces recherches ont Ă©tĂ© marquĂ©es de bien des maniĂšres par le pĂ©chĂ© mais elles prouvent que l’homme est tournĂ© vers le transcendant. Cette ouverture Ă  la transcendance n’est pas l’apanage d’une Ă©lite. Tout au long de sa vie terrestre, JĂ©sus a manifestĂ© combien les petits, les pauvres sont Ă©galement habitĂ©s du dĂ©sir de rencontrer Dieu et que justice leur soit rendue. L’ouverture Ă  la transcendance appartient Ă  tout homme. Voir les Ă©clairages du PĂšre Emmanuel Coquet Corps, Ăąme et espritL’homme est appelĂ© tout entier, il n’y a rien en lui que Dieu voudrait laisser de cĂŽtĂ©. La personne humaine a Ă©tĂ© créée comme une rĂ©alitĂ© corps-Ăąme-esprit Ă  la fois, indissociable et formant un tout. Elle a Ă©tĂ© créée ainsi par Dieu, et elle est appelĂ©e Ă  le rejoindre avec tout ce qu’elle est. Elle ne se rĂ©duit pas Ă  son corps. Elle ne se rĂ©duit par consĂ©quent pas non plus Ă  cette vie-ci. Les activitĂ©s de cette vie ont leur bontĂ© propre mais elles n’apaisent pas la soif de l’homme. Au travers de ses activitĂ©s dans ce monde, en particulier la recherche de la vĂ©ritĂ© et de la justice, l’homme dĂ©montre qu’il aspire Ă  une autre existence libĂ©rĂ©e de la souffrance et du pĂ©chĂ©. L’homme porte en lui une Ăąme par laquelle il est rationnel et libre et un esprit par lequel il est en relation avec l’Esprit de Dieu. L’ñme est immortelle, elle est appelĂ©e Ă  vivre avec Dieu en attendant la rĂ©surrection des corps. Par consĂ©quent, le service que nous devons Ă  nos frĂšres n’est jamais seulement matĂ©riel. L’homme ne vit pas seulement de pain, mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu » Mt 4, 4. Les pauvres ont besoin d’ĂȘtre scolarisĂ©s, d’avoir accĂšs aux biens culturels, d’ĂȘtre respectĂ©s dans leur croyance autant qu’ils ont besoin de pain et de toit. Par son esprit, qui l’ouvre Ă  la transcendance, l’homme est apte Ă  communiquer avec Dieu, Ă  recevoir le Saint-Esprit et Ă  vivre de la vie divine. C’est la pointe de son intĂ©rioritĂ©, oĂč il peut dialoguer secrĂštement avec Dieu. Mais le corps de l’homme lui aussi appartient pleinement a` sa digniteÂŽ . Lui aussi a eÂŽteÂŽ creÂŽeÂŽ par l’amour et pour l’amour. Par nos corps, nous sommes en relation avec les autres et avec l’univers. Nous en sommes solidaires. Le corps de l’homme est sexueÂŽ . Par ce fait meˆme, il est tourneÂŽ vers l’autre et feÂŽcond. C’est par le corps que la personne peut s’unir intimement a` une autre personne. C’est la` une de ses graˆ ces majeures. La recherche de la veÂŽ riteÂŽ passe par le corps, car elle commence par l’usage droit des cinq sens. La responsabiliteÂŽ passe par le corps. La personne humaine est responsable des autres parce qu’elle en est solidaire par son corps. Les actes de chariteÂŽ que le Christ nous presse de poser concernent le corps nourrir, veˆ tir, loger Mt 25, 35 s.. JeÂŽ sus lui-meˆme a tre` s souvent gueÂŽ ri les corps, montrant par la` le soin que nous lui devons. Le corps est donc le premier instrument de la chariteÂŽ . Le corps offre a` la personne de multiples potentialiteÂŽ s que le sport met en valeur. Les philosophes se sont tre`s toˆt eÂŽmerveilleÂŽ s des mains, ces outils a` tout faire. Le corps impose aussi a` la personne des limites. L’homme n’est pas capable de tout. Il est fragile. Il doit veiller sur sa santeÂŽ . Ces limites le rappellent a` l’humiliteÂŽ et le prote`gent de la deÂŽmesure. Ces limites rappellent aussi que tout homme a ses propres pauvreteÂŽ s nous avons tous commenceÂŽ par eˆ tre un embryon vulneÂŽrable et cacheÂŽ, et a` part ceux qui connaıˆtront le drame de mourir jeunes, nous vivrons tous la vieillesse et ses fragiliteÂŽ s. Respecter l’homme dans son corps, ce n’est pas l’eÂŽcraser sous des exigences inaccessibles, mais respecter sa pauvreteÂŽ, ses limites en soi et en l’autre. Le souci que nous prenons des corps les plus affaiblis est le signe de notre veÂŽritable amour du corps tel qu’il est. Le corps n’est pas un outil que chacun utiliserait a` sa guise. C’est un don de Dieu, qui nous ouvre a` la communion avec les autres. Nous devons donc le recevoir avec respect et l’utiliser de manie`re droite. Depuis l’AntiquiteÂŽ , l’homme veille a` cultiver son corps par l’asce`se, la meÂŽdecine et le sport pour en tirer le meilleur. ConserveÂŽe dans des proportions raisonnables, cette habitude est excellente. Les progre` s techniques de notre eÂŽpoque promettent de nouvelles reÂŽalisations dans ce domaine. Nombre d’entre elles seront excellentes et a` accueillir dans la joie. Mais aujourd’hui, certains veulent augmenter » le corps humain, voir le remplacer par un post-humain ». C’est excessif. Le corps humain tel que facžonneÂŽ par la nature porte en lui-meˆme la digniteÂŽ de la personne et le moyen de s’accomplir librement dans l’amour. L’homme n’est pas fait pour accumuler les performances, mais pour se donner dans l’amour. Le corps qu’il a aujourd’hui y est apte malgreÂŽ sa faiblesse. C’est en apprenant a` vivre avec nos limites que nous nous accomplirons. Le corps permet a` l’homme de travailler. C’est un eÂŽ leÂŽment essentiel de sa digniteÂŽ , qui le fait participer a` l’oeuvre creÂŽ atrice de Dieu. Encore faut-il que les conditions de ce travail soient humaines, ce qui n’est pas toujours le cas. Quand la santeÂŽ et la seÂŽcuriteÂŽ du travailleur ne sont pas assureÂŽ es, loin d’eÂŽ tablir la digniteÂŽ du corps, le travail l’abıˆme. Le travail des enfants en particulier est un scandale. Le corps appartient pleinement a` l’image de Dieu. La Gene` se montre poeÂŽ tiquement Dieu occupeÂŽ a` le facžonner de ses mains et y a insuffler son esprit Gn 2, 7. Le premier commandement qu’il a donneÂŽ a` l’homme est de croıˆtre et se multiplier Gn 1, 28. Dieu se reÂŽjouit gratuitement de voir l’homme vivre avant qu’il lui ait rendu le moindre culte. Adam s’est eÂŽmerveilleÂŽ de voir E` ve, l’aide qui lui eÂŽ tait accordeÂŽ e, et ce avant qu’E` ve ait fait quoi que ce soit pour lui Gn 2, 23. Le salut offert a` l’homme concerne aussi son corps, promis a` la reÂŽ surrection. JeÂŽ sus ressusciteÂŽ montre a` Thomas ses stigmates Jn 20, 27. Ce signe abyssal manifeste entre autres que la reÂŽsurrection ne nie pas nos fragiliteÂŽ s mais les assume pour les transfigurer. Le corps humain est splendide. A ` condition qu’il soit regardeÂŽ selon sa veÂŽ riteÂŽ, une expression contingente de la vie. Ce respect duˆ au corps n’est pas une idolaˆ – trie. Les soins porteÂŽ s au corps ne peuvent avoir pour finaliteÂŽ que de maintenir son eÂŽquilibre et son existence, de manie`re raisonneÂŽ e, sans lui donner une importance Scandale du malLe scandale du mal ne frappe pas seulement la volonteÂŽ humaine. Plus mysteÂŽ rieusement, il frappe l’homme tout entier. Certains accumulent les eÂŽpreuves douloureuses et deÂŽ stabilisantes, ou sont frappeÂŽs subitement par la maladie physique ou mentale. D’autres, de`s la conception, ou par des accidents de la vie, sont marqueÂŽ s par le handicap. C’est pour eux et leur entourage un fardeau lourd a` porter. Il est leÂŽgitime de se tourner vers Dieu et de lui crier pourquoi ? » Comme JeÂŽsus luime ˆme l’a fait. Hors de la ReÂŽsurrection, il n’y a pas de reÂŽponse deÂŽfinitive au scandale du mal. Mais par sa vie et surtout sa Passion, JeÂŽsus nous a rejoints dans ce myste`re et nous aide a` l’affronter dans l’espeÂŽrance. Il l’a vaincu par sa reÂŽsurrection et il nous promet de le vaincre totalement un jour. Il est possible aussi de manifester sa compassion envers ceux qui sont particulie`rement frappeÂŽ s par ce scandale. Il arrive des situations ou` il n’y a plus rien de techniquement efficace a` faire contre le scandale du mal. Ce sont des moments speÂŽ cialement difficiles pour notre eÂŽpoque habitueÂŽ e aux prouesses de la technique. Dans ces situations, une parole, un geste, une simple preÂŽ – sence peuvent manifester une profonde compassion et soulager la personne. JeÂŽsus a souvent exerceÂŽ ce ministe`re de compassion et nous a demandeÂŽ de faire de meˆme. Les personnes frappeÂŽ es par l’eÂŽpreuve du mal conservent toute leur digniteÂŽ. Les gens qui se vouent au service des personnes handicape ÂŽes teÂŽmoignent particulie`rement des treÂŽsors d’humaniteÂŽ qu’ils deÂŽcouvrent par la` . Le coeur, la capaciteÂŽ d’aimer de la personne demeure toujours intact sous les handicaps. C’est pourquoi il est important de travailler a` un meilleur accueil des personnes handicapeÂŽ La MortLa mort est l’eÂŽnigme par excellence. Depuis la plus haute AntiquiteÂŽ , l’humaniteÂŽ meÂŽ dite sur ce myste` re, sa signification, les moyens de le surmonter. Les diverses religions proposent toutes leur reÂŽponse a` ce myste` re. L’homme porte en lui le deÂŽ sir de vivre, et la mort scandalise, en particulier quand elle frappe trop toˆt ou de manie` re aveugle. Il est naturel d’en avoir peur et la foi ne nous invite pas a` une inhumaine indiffe ÂŽrence. Encore une fois, il est leÂŽgitime de porter ce cri devant Dieu, comme Job. JeÂŽsus lui-meˆme a eu peur face a` sa propre mort, nous rejoignant par-la` dans toute notre faibless. La mort est aussi la limite fondamentale de l’homme. Elle se dessine derrie`re toutes les autres limites de l’homme. L’homme ne peut pas tout se permettre parce qu’il mettrait sa vie en danger. Elle lui rappelle qu’il est un eˆ tre fini, qu’il ne s’est pas donneÂŽ la vie et que sa vie lui est confieÂŽe sans eˆ tre sa proprieÂŽ teÂŽ .Mais l’homme sait aussi deÂŽpasser le scandale de la mort par le sacrifice, la mort affronteÂŽe librement pour deÂŽfendre la justice et la veÂŽ riteÂŽ . Toutes les civilisations, toutes les religions, ont connu ces cas de sacrifice, dont la mort de Socrate est sans doute l’exemple occidental le plus parlant. La France est resteÂŽe marqueÂŽe par le sacrifice du colonel Beltrame contre la folie terroriste. Par ces sacrifices, l’homme deÂŽmontre qu’il se sent appeleÂŽ a` un au-dela` de la mort, vers un Bien parfait. Notre eÂŽpoque est contradictoire vis-a` -vis de la mort. D’un coˆ teÂŽ , elle est eÂŽvacueÂŽe du deÂŽ bat, on n’ose plus en parler ; de l’autre, nos fictions et jeux videÂŽo sont plus morbides que jamais. Nous avons besoin de reÂŽ apprendre a` regarder la mort en face, sans complaisance mais lucidement. Par la reÂŽsurrection du Christ, la mort est devenue un passage vers la vie en Dieu si l’homme se laisse rejoindre par lui. Elle n’est pas la fin de tout. Il est urgent de rappeler l’espeÂŽ rance. L’homme n’est pas fait seulement pour cette vie-ci, il aspire au Bien supreˆme, Dieu. Il aspire a` la victoire de la chariteÂŽ divine jusque dans les corps. JeÂŽsus reviendra a` la fin des temps, et ressuscitera les morts pour que tous ceux qui se seront laisseÂŽs rejoindre par lui vivent de sa Gloire. Ceux qui nous promettent la mort de la mort » ne nous promettent pas le bonheur mais nous vouent a` une mise`re sans Accepter sa finitudeDieu n’appelle pas des surhommes aux performances invincibles. Il aime les hommes et les femmes que nous sommes, avec nos limites. Dans l’Évangile, c’est devant JĂ©sus outragĂ© et ïŹ‚agellĂ© qu’est prononcĂ©e la parole Voici l’homme» Jn 19, 5. La dignitĂ© inamissible de l’homme n’est pas afïŹrmĂ©e au sujet d’un hĂ©ros performant au sommet de son succĂšs, mais devant un homme affaibli. JĂ©sus nous rejoint ainsi au cƓur de toutes nos limites pour les porter avec nous dans la foi et la charitĂ©. C’est en acceptant notre ïŹnitude Ă  la suite de JĂ©sus Christ que nous nous accomplirons pleinement. En particulier, en manifestant notre solidaritĂ© envers ceux qui ont Ă©tĂ© blessĂ©s par la vie. Notre Ă©poque voit prolifĂ©rer un culte de la performance, de la jeunesse Ă©ternelle, qui nous Ă©crase. C’est Ă  la fois inutile et blessant. Les faiblesses de l’homme ne s’opposent pas Ă  sa dignitĂ©. Nier nos limites, c’est nous blesser en nous imposant un destin qui n’est pas le nĂŽtre. C’est aussi rendre impossible la fraternitĂ©, ou la rĂ©server Ă  une Ă©lite de chanceux. Portons nos limites avec conïŹance pour nous ouvrir Ă  une vraie rĂ©alisation de soi qui fera des merveilles. Voir les Ă©clairages du PĂšre Emmanuel Coquet Tout ĂȘtre humain est une personneTout en l’homme est humain. Nous ne sommes pas des animaux auxquels aurait Ă©tĂ© ajoutĂ©e une couche de spiritualitĂ© comme on ajoute un logiciel Ă  un ordinateur. Les caractĂšres les plus basiques de l’homme sont dĂ©jĂ  humains. Le corps de l’homme manifeste dĂ©jĂ  sa dignitĂ©, par sa station debout, ses mains prĂ©hensiles, la taille de son crĂąne et la taille de son bassin. L’homme ne manifeste pas seulement sa supĂ©rioritĂ© par la petite partie en lui qui est capable de raisonnement et de calcul. Le plaisir et la souffrance sont dĂ©jĂ  spĂ©cifiques en l’homme. Ils s’accompagnent d’un pourquoi ? » dans le double sens d’en vue de quoi et a` cause de quoi ? Par exemple, l’alimentation n’est pas chez l’homme un besoin seulement biologique. Elle s’accompagne de rites sociaux et de symboles. Le drame de la personne anorexique tient autant Ă  sa difficultĂ© Ă  se tenir Ă  table avec les autres qu’à sa difficultĂ© Ă  manger. S’il faut respecter la sensibilitĂ© animale, il est capital de voir qu’elle n’est pas la meˆme que celle de l’homme. En consĂ©quence, tout ĂȘtre humain est une personne. Il n’est pas nĂ©cessaire de faire montre de capacitĂ©s intellectuelles brillantes ou d’une vie morale dĂ©velopĂ©es pour ĂȘtre une personne. Il est excellent que des mĂ©thodes toujours plus affinĂ©es permettent aux hommes de dĂ©velopper leur rationalitĂ© ou leur capacitĂ© de mĂ©ditation, mais cela ne constitue pas des conditions pour ĂȘtre compte comme personne. Respectons tout ĂȘtre humain comme une personne, de sa conception jusqu’à sa mort naturelle. En particulier, respectons la vie de tout ĂȘtre humain car elle est dĂšs l’origine porteuse de ces valeurs de la personne. Voir les Ă©clairages du PĂšre Emmanuel Coquet Seul l'ĂȘtre humain est une personneCreÂŽeÂŽ par Dieu dans l’amour et appeleÂŽ a` se donner par amour, l’eˆtre humain est une personne, tout eˆ tre humain est une personne et dans la creÂŽation visible seul l’eˆtre humain est une personne. Tout en l’homme est humain, l’homme est splendide y compris par son corps. Il est ainsi capable de merveilles. La creÂŽ ation de l’homme constitue ainsi le sommet de la creÂŽation, et en l’homme toute la creÂŽation trouve sa finaliteÂŽ veÂŽ ritable. Elle aspire elle aussi a` eˆtre libeÂŽreÂŽe du mal qui la frappe Rm 8, en eÂŽtant unie au salut de l’humanite ÂŽ . Mais cela ne l’autorise pas a` nier ses limites. l’animal n’est pas une personne et ne peut eˆ tre eÂŽ galeÂŽ a` l’homme. Il ne partage ni sa raison, ni sa liberteÂŽ . L’animal ne porte pas cette insatisfaction qui pousse a` rechercher une transcendance. L’antispeÂŽcisme, qui nie la digniteÂŽ supeÂŽrieure de l’homme sur l’animal, lance des cris d’alerte qu’il est bon d’entendre pour prendre nos responsabiliteÂŽs face a` la souffrance animale, mais se trompe dans ses conclusions. L’homme est la seule creÂŽature sur terre que Dieu a voulue pour elle-meˆme » Gaudium et Spes, 24. L’arriveÂŽe des robots doteÂŽ s d’intelligence artificielle va reÂŽvolutionner nos modes de vie. Ce progre`s ouvrira des possibiliteÂŽs fabuleuses. Mais il pose aussi des proble`mes eÂŽ thiques redoutables. En particulier, il n’est pas acceptable de doter le robot d’une personnalite ÂŽ juridique. Le robot reste toujours sous la responsabiliteÂŽ de ses concepteurs et utilisateurs. Il n’est pas doteÂŽ d’un libre arbitre, il ne s’inteÂŽresse pas a` la veÂŽ riteÂŽ pour elle-meˆme mais seulement a` l’application de son programme. Il est speÂŽcialement inquieÂŽ tant de voir se deÂŽvelopper des robots sexuels qui preÂŽ – tendent remplacer l’intimiteÂŽ d’amour avec une autre personne Sommet de la CrĂ©ationCréé par Dieu dans l’amour et appelĂ© Ă  se donner par amour, l’ĂȘtre humain est une personne, tout ĂȘtre humain est une personne et dans la crĂ©ation visible seul l’ĂȘtre humain est une personne. Tout en l’homme est humain, l’homme est splendide y compris par son corps. Il est ainsi capable de merveilles. La crĂ©ation de l’homme constitue ainsi le sommet de la crĂ©ation , et en l’homme toute la crĂ©ation trouve sa finalitĂ© vĂ©ritable. Elle aspire elle aussi Ă  ĂȘtre libĂ©rĂ©e du mal qui la frappe Rm 8, en Ă©tant unie au salut de l’humanitĂ©. Mais cela ne l’autorise pas Ă  nier ses limites. Partie II Nous sommes une seule famille Dieu a créé une seule famille Dieu, qui veille paternellement sur tous, a voulu que tous les hommes constituent une seule famille et se traitent mutuellement comme des fre` res » Gaudium et Spes, 24. Dieu n’a pas creÂŽeÂŽ l’homme seul, il a creÂŽeÂŽ l’humanite ÂŽ comme une seule famille appeleÂŽe a` se construire dans la fraterniteÂŽ jusqu’a` ce qu’elle soit pleinement rassembleÂŽe dans le Christ ressuscite ÂŽ comme un seul corps sous sa teˆ te. Ce fait nous impose de reconnaıˆtre notre interde ÂŽpendance et de vivre de` s aujourd’hui la solidariteÂŽ , speÂŽcialement envers les plus faibles qui sont aussi nos fre` res. Mais ce principe est nieÂŽ aujourd’hui par l’invocation d’une autonomie absolue qui nous enferme dans une solitude invivable. C’est au nom de cette autonomie que sont sans cesse reÂŽ clameÂŽs de nouveaux droits qui deÂŽnaturent de plus en plus la transmission de la vie, comme la gestation pour autrui[1]. L’homme n’est pas fait pour cette solitude, nous avons besoin les uns des autres et nous nous influencžons les uns les autres. Tout est lieÂŽ », reÂŽpe` te le pape Francž ois Laudato Si’. Nous faisons tous l’expeÂŽ rience de notre interdeÂŽpendance mais l’individualisme actuel la deÂŽnie et empeˆche de la vivre sereinement. L’humaniteÂŽ doit reconnaıˆtre qu’elle trouvera les solutions a` ces deÂŽfis par la fraterniteÂŽ et la coopeÂŽration. [1] Nous renvoyons ici au document des eÂŽveˆques de France sur la bioeÂŽthique La DigniteÂŽ de la procreÂŽation, Paris, Bayard-Cerf-Mame, 2018. Nous sommes interdĂ©pendants Il n’est pas bon que l’homme soit seul » Gn 2, 18. Dieu a creÂŽeÂŽ l’homme pour vivre uni a` toute l’humaniteÂŽ autant qu’a` Lui. Nous ne sommes pas des atomes isoleÂŽ s qui choisiraient avec qui avoir ou non des relations. Nous sommes tous interdeÂŽpendants. Avant de choisir de vivre la solidariteÂŽ comme valeur et pour la vivre selon sa veÂŽ riteÂŽ , l’homme doit consentir a` ce fait de l’interdeÂŽ – pendance. La question eÂŽcologique, a` propos de laquelle le pape a poseÂŽ ce principe, l’illustre la deÂŽ fense de l’environnement a` l’eÂŽ chelle de la plane` te deÂŽpend des actes de chacun la` ou` il se trouve. Mener une vie sobre, trier, recycler, eÂŽ conomiser l’eau deÂŽpend de chacun et a des reÂŽpercussions sur tous. C’est notre commune responsabiliteÂŽ . Dans ce domaine tre` s particulie`rement, nul ne peut preÂŽtendre mener sa vie a` sa guise sans se preÂŽoccuper du prochain. Nous ne pouvons pas comprendre le remplissez la terre et soumettez-la » Gn 1, 28 de la Bible comme l’autorisation de la saccager. Il s’agit d’un devoir de bonne geÂŽ rance qui aura des comptes a` rendre au vrai maıˆtre de la creÂŽation. L’interdeÂŽpendance des hommes peut aussi se montrer par le cas de la maladie. Dans une famille, si un membre est malade, toute la famille est toucheÂŽ e. Toute la famille doit s’organiser pour le soin du malade, pour mener les taˆ ches domestiques sans lui, eÂŽventuellement pour eÂŽ viter la contagion si le malade est affaibli dans son syste`me immunitaire. S’il se trouvait dans une situation deÂŽja` preÂŽ – caire, celle-ci s’aggrave. La vie sociale de la famille est toucheÂŽ e. Mais le destin de cette famille deÂŽpend de la qualiteÂŽ et de la proximiteÂŽ des structures de soin. Il est des reÂŽ gions, meˆme en France, ou` l’on est mieux soigneÂŽ que d’autres. Ces structures de soin a` leur tour deÂŽpendent de la politique de santeÂŽ de l’EÂŽ tat, qui est influenceÂŽe par la crise mondiale. Ainsi, la santeÂŽ d’une seule personne au sein d’une famille est relieÂŽe par cercles concentriques a` la situation de toute l’humanite ÂŽ . De manie`re geÂŽneÂŽrale, les situations de pauvreteÂŽ manifestent mieux l’interdeÂŽ pendance des humains. L’individu qui s’est enferreÂŽ dans une logique de performance peut se faire croire qu’il est seul au monde. Le pauvre, lui, manifeste combien nos destins sont lieÂŽ s. C’est une de ses graˆ ces. Un reˆve d’autonomie absolue ou` l’individu ne rend de comptes qu’a` lui-meˆme viole la veÂŽ riteÂŽ de la nature humaine et engendre une cruelle solitude. Il fait peser sur les plus petits une exigence inaccessible et douloureuse. L’homme est un animal politique. Il a besoin d’interagir avec ses semblables, de construire avec eux une socieÂŽ teÂŽ juste ou` chacun peut s’eÂŽpanouir. Chacun de nous a besoin d’eˆ tre reconnu par les autres comme personne libre. Il a besoin d’aimer et d’eˆ tre aimeÂŽ . Sa raison le pousse au dialogue indispensable a` la deÂŽcouverte d’une veÂŽ riteÂŽ universelle. L’homme est aussi un eˆtre de langage. Il a besoin de communiquer avec les autres, de raconter son existence pour se forger une identiteÂŽ . L’homme a besoin d’une culture qui lui permet d’affirmer ses valeurs et de chercher le vrai, le bon, le beau. Il est essentiel que les projets d’aide au deÂŽveloppement comportent aussi des volets de deÂŽfense de la culture des peuples consideÂŽ reÂŽ s. Chaque culture, meˆme si elle a besoin de passer par un discernement pour eˆ tre libeÂŽreÂŽe de ses eÂŽ leÂŽ – ments de peÂŽcheÂŽ , est porteuse de treÂŽsors pour l’humaniteÂŽ . L’eÂŽchange culturel, favoriseÂŽ par la mondialisation, est une taˆ che essentielle pourvu qu’il ne se transforme pas en heÂŽgeÂŽ – monie d’une culture sur les autres. Ce besoin d’interaction est speÂŽcialement sensible chez les plus petits, chez ceux que les drames de la vie privent de l’utilisation normale des moyens de la vie sociale. C’est toujours l’occasion d’une joie pour tous chaque fois que nous associons les plus faibles a` nos cercles. L’homme est aussi un animal religieux. Ouvert a` la transcendance, il a besoin pour l’exprimer de symboles, de rites, de liturgie. Or il n’existe pas de symbole ou de rite priveÂŽ . Le rite et le symbole supposent une communaute ÂŽ qui se rassemble en eux. Une des eÂŽ tymologies proposeÂŽes de religion » renvoie a` relier ». La religion est la` pour rassembler les hommes, leur donner conscience de leur interdeÂŽpendance et la vivre dans la fraterniteÂŽ . Mais il faut pour cela que les religions s’ouvrent encore davantage au dialogue. L’ambition de la laıšciteÂŽ est de contribuer a` la paix sociale en respectant chaque religion dans sa croyance et dans son rite et en conduisant les religions ou courants de penseÂŽe a` cohabiter sereinement au sein de la socieÂŽteÂŽ . Ce besoin aussi est universel. La religion suppose une reÂŽflexion rationnelle, mais elle ne peut eˆ tre l’affaire d’un cercle d’initieÂŽ s. JeÂŽsus a aimeÂŽ parler aux exclus de la socieÂŽteÂŽ et deÂŽmontreÂŽ que ces hommes et ces femmes rejeteÂŽs eÂŽtaient aptes a` le suivre. Nos communaute ÂŽs auront a` coeur de devenir des lieux ou` le petit se sent chez AppelĂ©s Ă  la fraternitĂ©L’interdĂ©pendance est d’abord une chance. Elle donne Ă  chacun la possibilitĂ© de s’appuyer sur tous les autres. Mais comme toute rĂ©alitĂ© humaine, elle est marquĂ©e par le pĂ©chĂ©. Cette interdĂ©pendance de fait demande Ă  ĂȘtre amĂ©nagĂ©e par la libertĂ© de l’homme. Il dĂ©pend de nous d’en faire une situation d’aliĂ©nation ou au contraire l’occasion d’une fraternitĂ©. Notre Ă©poque nous donne d’extraordinaires outils pour construire cette fraternitĂ©. La mondialisation rend plus visibles et plus rapides les liens de dĂ©veloppement entre les rĂ©gions du monde. Les moyens de communication sociale permettent d’interagir rapidement avec des personnes situĂ©es Ă  l’autre bout du monde. Cela permet d’immenses campagnes de mobilisation pour venir en aide Ă  une rĂ©gion touchĂ©e par une catastrophe. Nous avons vu des chaĂźnes mondiales de solidaritĂ©, par exemple pour notre pays aprĂšs les attentats du 13 novembre 2015. La fraternitĂ© n’est pas un vain mot, elle se vit au quotidien de mille parce que l’homme reste marqueÂŽ par le scandale du mal, notre eÂŽpoque voit aussi de formidables menaces contre la fraterniteÂŽ. Le progre`s est aussi heÂŽlas le progre`s du mal. La mondialisation concerne aussi le crime. Il faut citer d’abord la violence terroriste, qui est devenue internationale et qui se pare a` nouveau de l’excuse de la religion, comme si Dieu pouvait eˆtre un Dieu de mort et non de vie. L’attentat suicide est un sommet de deÂŽviance de la religion, puisqu’au meurtre il ajoute le suicide honteusement regardeÂŽ comme martyre. Il faut se reÂŽjouir de toutes les occasions qui sont veÂŽcues de rejeter cette idolaˆ trie de la violence. Il y a le fleÂŽau du crime organiseÂŽ , qui tue et exploite par la prostitution ou l’embrigadement dans les reÂŽseaux du crime, en particulier dans certaines reÂŽgions du monde. Il s’accompagne du trafic mondial de drogue avec son corte`ge de mise` re et de violence. Au Mexique et ailleurs, plusieurs preˆtres ont payeÂŽ de leur vie la deÂŽnonciation de ce scandale. Il y a le deÂŽveloppement industriel non controˆ leÂŽ qui pollue la plane`te et rend malade les populations, speÂŽcialement dans les pays eÂŽmergents. Les ineÂŽ galiteÂŽs se sont terriblement creuseÂŽ es, entre individus et entre reÂŽgions du monde. Nous continuons a` admettre en pratique que les uns se sentent plus humains que les autres, comme s’ils eÂŽtaient neÂŽs avec de plus grands droits » Laudato Si’, 90. Il y a les attentats contre la vie, avortement et euthanasie, preÂŽsenteÂŽs comme droits. Le sort reÂŽserveÂŽ aux femmes et aux enfants doit progresser encore partout dans le monde. Nous nous reÂŽjouissons des reÂŽcentes prises de conscience contre le harce`lement sexuel. Les femmes qui ont eÂŽteÂŽ pousseÂŽes a` l’avortement doivent beÂŽneÂŽ – ficier d’un accompagnement miseÂŽricordieux pour les aider a` surmonter la deÂŽ tresse qui accompagne souvent cet acte terrible. L’EÂŽ glise catholique s’est lanceÂŽ e, y compris en France, dans un chantier de peÂŽnitence et de reÂŽformes pour combattre les abus sexuels. Ces fleÂŽaux, dont la liste n’est pas exhaustive, nous appellent a` construire ensemble la fraterniteÂŽ . Mais la graviteÂŽ de ces drames ne doit pas conduire au deÂŽsespoir. Tout n’est pas perdu, parce que les eˆ tres humains, capables de se deÂŽgrader a` l’extreˆme, peuvent aussi se surmonter, opter de nouveau pour le bien et se reÂŽgeÂŽneÂŽrer » Laudato Si, 205. Les chreÂŽ – tiens sauront eˆ tre exemplaires, la` ou` ils sont, avec les moyens qui sont les leurs, dans leur construction de cette fraterniteÂŽ . Elle commence par des gestes simples. L’entraide en famille, les activiteÂŽ s de paroisse comme les maraudes ou les vestiaires solidaires, sont un vrai fondement de la solidariteÂŽ. Meˆme s’ils ne remplacent pas des politiques publiques responsables, ce sont ces petits moyens, multiplieÂŽ s partout, qui font reculer la mise` re. Ils ont aussi l’avantage de deÂŽmontrer que nul n’est trop faible ou trop petit pour participer a` l’effort de fraterniteÂŽ . Seul un esprit de pauvrete ÂŽ permet de combattre la pauvreteÂŽ . Les reÂŽseaux sociaux manifestent l’ambivalence de la situation. UtiliseÂŽ s raisonnablement, ils manifestent l’interdeÂŽpendance et permettent des mobilisations rapides a` travers la plane` te. Mais laisseÂŽs a` eux-meˆmes, veÂŽcus dans une sorte d’addiction, ils enferment dans des relations virtuelles qui sont au fond la pire des solitudes et ils deÂŽtournent de veÂŽritables activiteÂŽ s fraternelles. Ils risquent aussi d’enfermer chacun dans des cercles qui pensent comme lui, rendant le dialogue La sexualitĂ©, lieu du don de soi Dieu crĂ©a l’homme Ă  son image, Ă  l’image de Dieu il le crĂ©a, il les crĂ©a homme et femme » Gn 1, 27. La diffĂ©rence sexuelle est la premiĂšre altĂ©ritĂ© de l’humanitĂ©, celle qui fonde toutes les autres. La diffĂ©rence sexuelle n’est pas une convention sociale qu’on pourrait réérire Ă  son grĂ©, elle appartient Ă  la nature humaine. Son respect est essentiel pour la construction d’un ordre social Ă©quilibrĂ©. Mais les deux sexes ont Ă©tĂ© créés pour vivre dans la communion, le respect et l’égalitĂ©. Il faut que partout dans le monde se poursuivent les efforts de libĂ©ration de la femme, pour son accĂšs aux droits civiques, Ă  la libertĂ© de mariage, Ă  l’emploi avec un salaire Ă©gal. Toute forme de violence faite aux femmes est inacceptable, y compris l’excision et les autres formes de mutilation. L’augmentation du nombre de femmes participant a` la vie publique sera une chance pour tous. La diffĂ©rence sexuelle ouvre Ă  la sexualitĂ©. Chaque sexe est tournĂ© vers l’autre. VĂ©cue en vĂ©ritĂ©, la sexualitĂ© est un lieu spĂ©cial de don de soi, d’amour et de libertĂ©. Par nature ouverte Ă  l’accueil de la vie, elle est le lieu oĂč l’homme et la femme vivent ensemble leur image de Dieu. Puisque Dieu est en mĂȘme temps le CrĂ©ateur, la fĂ©conditĂ© du couple humain est l’image’’ vivante et efficace, un signe visible de l’acte crĂ©ateur » Amoris Laetitia, 10. La sexualitĂ© chante aussi particuliĂšrement la beautĂ© du corps humain. Mais le pĂ©chĂ© originel a dĂ©formĂ© la sexualitĂ© en la transformant en lieu de dĂ©sir effrĂ©nĂ© et de domination Ton dĂ©sir te portera vers ton mari, et celui-ci dominera sur toi » Gn 3, 16. Cette dĂ©formation se manifeste aujourd’hui avec le rĂšgne de la pornographie prĂ©sentĂ©e comme une norme et promesse de bonheur qui dĂ©stabilise les plus jeunes. En rĂ©alitĂ©, toute personne humaine porte le dĂ©sir d’une relation stable avec un partenaire aimeÂŽ pour lui-meˆme. Il existe dans la famille humaine une diversitĂ© d’inclinations sexuelles. Il ne faut pas discriminer les personnes violences physiques ou verbales contre elles sont intolĂ©rables. L’Église catholique invite Ă  les accueillir et les accompagner dans leur chemin vers Dieu. Mais il n’est pas possible de mettre les relations homosexuelles sur le mĂȘme plan que la relation de l’homme et de la FĂ©conditĂ© et familleL’enfant est comme l’incarnation de l’amour de ses parents. Il ouvre celui-ci Ă  une nouvelle dimension et leur donne la joie d’ĂȘtre Ă©ducateurs d’une libertĂ©. Il leur fournit l’occasion de donner le meilleur d’eux-mĂȘmes dans l’ensemble des soins qu’ils lui prodiguent. Il offre Ă  leur libertĂ© un champ d’action particuliĂšrement beau. L’enfant est don de Dieu. Toute naissance est une occasion d’action de grĂąces. Les couples qui ne peuvent pas avoir d’enfant ont besoin d’ĂȘtre accompagnĂ©s pour qu’ils puissent dĂ©couvrir qu’il existe d’autres fĂ©conditĂ©s. Mais l’enfant ne saurait ĂȘtre un droit ouvrant Ă  des technologies toujours plus sophistiquĂ©es qui s’accompagnent de destruction d’embryons. L’annonce chrĂ©tienne qui concerne la famille est vraiment une bonne nouvelle. JĂ©sus est nĂ© dans une famille, c’est lĂ  d’abord qu’il a vĂ©cu son incarnation, offrant Ă  toutes les familles une grĂące spĂ©ciale. La fĂ©conditĂ© du couple fonde la famille. Celle-ci est le premier cercle de l’interdĂ©pendance des hommes. Elle dĂ©ploie une intimitĂ© trĂšs particuliĂšre. Pour les enfants, elle est le premier lieu oĂč dĂ©couvrir la valeur de la solidaritĂ©. En particulier, les enfants se dĂ©couvrent en dette de la vie vis-Ă -vis de leurs parents et la fraternitĂ© de sang est la premiĂšre de toutes les fraternitĂ©s. Les parents ont une spĂ©ciale responsabilitĂ© dans l’éducation des enfants et doivent pour cela bĂ©nĂ©ficier d’une vraie libertĂ©, en particulier dans le choix de la scolaritĂ©. La sociĂ©tĂ© doit aider les parents mais n’a pas Ă  se substituer Ă  eux dans la mission d’éducation. Pendant des millĂ©naires, la pente de l’humanitĂ© a Ă©tĂ© d’avoir des enfants pour se survivre. La foi en la RĂ©surrection nous a libĂ©rĂ©s de cette nĂ©cessitĂ©. JĂ©sus vient transformer les familles pour les faire devenir une communion de personnes unies dans le respect et dans l’amour. La famille est le premier cercle de la sociĂ©tĂ©. Il est essentiel Ă  la bonne santĂ© des sociĂ©tĂ©s qu’elles favorisent la famille. Les communautĂ©s catholiques sont invitĂ©es Ă  devenir des lieux oĂč` les familles se sentent chez elles, accompagnĂ©es dans leurs joies, soutenues dans leurs difficultĂ©s. Il faut que les politiques publiques soutiennent les familles, que les infrastructures collectives les aident Ă  vivre avec des places en crĂšche suffisantes par exemple, que les mĂšres au travail soient aidĂ©es. Notre Ă©poque voit un nombre grandissant de familles blessĂ©es. Les communautĂ©s catholiques auront Ă  cƓur d’accompagner ces situations, sans jugement, avec misĂ©ricorde, en voyant oĂč en sont les personnes et en rendant grĂące pour les trĂ©sors de charitĂ© qui se vivent souvent dans ces situations L'unique famille humaineCréée par Dieu pour ĂȘtre rassemblĂ©e dans la charitĂ© par le Christ, unie par des liens de sang autant que par des liens spirituels Ă©manant des cultures, l’humanitĂ© est une seule famille appelĂ©e Ă  vivre la fraternitĂ© et la solidaritĂ©. Elle en est capable malgrĂ© les dĂ©fis qui la menacent. Chacun, Ă  sa place et avec les moyens qui sont les siens, par JĂ©sus-Christ, peut contribuer Ă  cette tĂąche. Personne n’est en trop dans l’oeuvre de fraternitĂ©. Cela se vit d’abord dans les familles qui sont le premier lieu oĂč apprendre la solidaritĂ©. La famille doit donc ĂȘtre dĂ©fendue contre les attaques des idĂ©ologies. L’Église souhaite prendre sa part dans cette dĂ©fense et cet accompagnement des familles pour leur donner de vivre cette fraternitĂ©. Mais la famille est destinĂ©e Ă  s’ouvrir Ă  plus grand qu’elle. La solidaritĂ© doit atteindre les limites de l’humanitĂ©. À l’heure de la mondialisation, il est plus mortifĂšre que jamais de rĂȘver que chaque nation se replie sur elle-mĂȘme en cherchant l’autarcie. Aucune nation ne peut plus trouver en elle les moyens de faire face aux dĂ©fis du temps. Les menaces contre l’humanitĂ© appellent une rĂ©ponse commune. La voie du dialogue et de la coopĂ©ration internationale est la seule possible. A fortiori, les diverses discriminations qui divisent l’humanitĂ© en dĂ©signant des sous-hommes sont intolĂ©rables. Chaque personne humaine a le droit de trouver sa place dans la famille humaine. Luttons pour que chaque homme soit reconnu comme un a créé l’homme Ă  son image et ressemblance pour se l’unir dans l’amour. Il en a fait une personne relationnelle comme Lui, il l’a créé beau, libre, apte Ă  la vĂ©ritĂ©, constituant une seule famille interdĂ©pendante appelĂ©e Ă  la fraternitĂ©. Il l’a appelĂ© Ă  l’amour. Chacun d’entre nous, Ă©coutant sa conscience et aidĂ© par Dieu, se verra capable de dĂ©ployer cette fraternitĂ© envers tous. En particulier en pensant prĂ©fĂ©rentiellement aux plus petits. C’est le chemin du bonheur. JĂ©sus-Christ est mort et ressuscitĂ© pour bĂ©nir et fortifier cet effort et associer l’homme au salut. Finalement, au dernier jour JĂ©sus vaincra la mort et rassemblera en lui toute la crĂ©ation et tous ceux qui l’auront acceptĂ© en le confessant ou en suivant leur conscience. C’est notre vocation ultime, qui porte toutes les autres. En aimant, [le chrĂ©tien] devient lui-mĂȘme un membre, et il est insĂ©rĂ© par l’amour dans l’unitĂ© du corps du Christ et il y aura un seul Christ s’aimant lui-mĂȘme » Saint Augustin, Commentaire de la premiĂšre ÉpĂźtre de saint Jean, X, 3. Postface de Mgr Batut Qu’est-ce que l’homme dans la nature ? » Qu’est-ce que l’homme dans la nature ? Un nĂ©ant Ă  l’égard de l’infini, un tout Ă  l’égard du nĂ©ant, un milieu entre rien et tout. » La cĂ©lĂšbre rĂ©flexion de Pascal rejoint dans son dĂ©but l’interrogation du psaume 8, mais elle la prolonge avec l’accent dĂ©jĂ  contemporain d’une humanitĂ© qui n’ose plus croire que quelqu’un pense Ă  elle. Mesurant plus que jamais, grĂące aux progrĂšs des sciences, l’immensitĂ© de l’univers qui l’entoure, ce milieu entre rien et tout » s’apprĂ©hende lui-mĂȘme sur fond d’angoisse existentielle plutĂŽt comme un nĂ©ant que comme un tout – une poussiĂšre d’étoiles » selon le mot d’Hubert Reeves. Mais lorsque cette mĂȘme humanitĂ© regarde le microcosme oĂč elle vit, elle s’aperçoit que loin de grandir en humilitĂ© en rĂ©flĂ©chissant sur elle-mĂȘme, elle n’a cessĂ© d’agir avec dĂ©mesure au point d’épuiser les ressources de la maison commune »[1] oĂč elle a Ă©tĂ© placĂ©e depuis la rĂ©volution industrielle, dans son dĂ©sir insatiable de profit et de confort, l’homme est devenu un danger pour son environnement. DĂ©sorientĂ© et perdu Ă  l’échelle de l’univers, il doute de lui-mĂȘme Ă  l’échelle de son milieu vital, jusqu’à douter de l’opportunitĂ© de prolonger son existence. Qu’est-ce que l’homme ? Un prĂ©dateur et un meurtrier qui n’est pas digne de vivre, affirment certains aujourd’hui. Par avance pourtant, la Parole de Dieu a mis l’homme en garde contre sa dĂ©mesure, tout en le rassurant devant sa petitesse. Le choix de Dieu, dans sa toute-puissance et son Ă©ternitĂ©, a Ă©tĂ© de crĂ©er l’univers. Au sein de sa crĂ©ation, il a voulu entrer en alliance avec un ĂȘtre dans lequel est imprimĂ©e sa propre image. Et, pour parachever cette alliance, il a voulu connaĂźtre la vie de cet ĂȘtre de la naissance Ă  la mort, afin de le racheter de la mort et de lui communiquer sa propre vie. La question du psaume qu’est-ce que l’homme pour que tu penses Ă  lui ? » retrouve dans le Christ toute sa pertinence et dĂ©bouche sur un Ă©tonnement Ă©merveillĂ© Tu l’as voulu un peu moindre qu’un dieu, le couronnant de gloire et d’honneur ! Tu l’établis sur les Ɠuvres de tes mains, tu mets toutes choses Ă  ses pieds ! » Le pouvoir de l’homme sur la nature, envers de l’humilitĂ© de sa condition, n’est pas un pouvoir discrĂ©tionnaire. C’est une gĂ©rance, une intendance – mieux une mission, celle de parachever l’Ɠuvre de Dieu. En comprenant cela, nous percevons la signification de l’univers. Dans le Christ, rĂ©vĂ©lateur du PĂšre, nous dĂ©couvrons que le cosmos a Ă©tĂ© voulu paternellement et que son accomplissement ne peut ĂȘtre que filial. L’alliance nouĂ©e avec l’humanitĂ© nous apparaĂźt comme la transposition dans le temps de l’échange Ă©ternel du PĂšre et du Fils. La vie terrestre de JĂ©sus devient le paradigme de cette vie filiale et fraternelle qui dĂ©ploie jusqu’au bout en nous le goĂ»t de vivre, la joie d’habiter cette terre et de contribuer, en y vivant la charitĂ©, Ă  la faire passer en Dieu. Elle passe, certes, la figure de ce monde dĂ©formĂ©e par le pĂ©chĂ© ; mais, nous l’avons appris, Dieu nous prĂ©pare une nouvelle terre oĂč rĂ©gnera la justice et dont la bĂ©atitude comblera et dĂ©passera tous les dĂ©sirs de paix qui montent au cƓur de l’homme. Alors, la mort vaincue, les fils de Dieu ressusciteront dans le Christ
 La charitĂ© et ses Ɠuvres demeureront et toute cette crĂ©ation que Dieu a faite pour l’homme sera dĂ©livrĂ©e de l’esclavage[2]. » La foi chrĂ©tienne n’en est qu’à ses dĂ©buts. Et pour dire l’amour de Dieu, l’éternitĂ© sera courte. [1] Pape François, encyclique Laudato sĂŹ sur l’écologie Notre maison commune est comme une sƓur, avec laquelle nous partageons l’existence, et comme une mĂšre, belle, qui nous accueille Ă  bras ouverts. » [2] Vatican II, Constitution Gaudium et Spes sur l’Église dans le monde de ce temps, 39.
LavĂ©ritĂ© est une valeur de la connaissance, relevant du domaine de la science ; la notion de devoir est une valeur de l’existence, relevant du domaine de la morale ou de l’éthique. Donc l’idĂ©e d’un devoir de chercher la vĂ©ritĂ© peut paraĂźtre Ă©trange, d’autant qu’on recherche la vĂ©ritĂ© en science et ailleurs. Il y a un RĂ©sumĂ© Index Plan Texte Bibliographie Notes Citation Auteur RĂ©sumĂ© La rĂ©flexion spinoziste sur la vĂ©ritĂ© dĂ©gage deux propriĂ©tĂ©s de l’idĂ©e vraie – l’adaequatio et la convenientia – dont l’articulation exacte pose quelques difficultĂ©s d’interprĂ©tation. Le problĂšme principal consiste Ă  savoir si ces deux propriĂ©tĂ©s renvoient Ă  deux thĂ©ories de la vĂ©ritĂ© qui s’opposent vĂ©ritĂ©-cohĂ©rence et vĂ©ritĂ©-correspondance ou Ă  deux aspects qui se complĂštent d’une façon harmonieuse dans une seule conception de la vĂ©ritĂ©. L’objectif de cet article est de prĂ©senter quelques remarques qui soutiennent la seconde option et Ă©clairent l’originalitĂ© de la conception spinoziste de la vĂ©ritĂ©. Haut de page EntrĂ©es d’index Haut de page Texte intĂ©gral 1Dans cet article, je voudrais prĂ©senter quelques remarques sur le problĂšme de la vĂ©ritĂ© chez Spinoza. NĂ©anmoins, il faut d’abord prĂ©ciser que sous la rubrique problĂšme de la vĂ©ritĂ© », il se trouve en rĂ©alitĂ© un ensemble de questions distinctes bien qu’essentiellement liĂ©es entre elles. Par problĂšme de la vĂ©ritĂ© » on doit d’abord comprendre le problĂšme qui porte sur la dĂ©termination de la nature ou essence de la vĂ©ritĂ©. Il s’agit de rĂ©pondre Ă  la question 1 sur la signification du terme vĂ©ritĂ© ». Ensuite, il s’agit de poser les questions qui portent sur les conditions de possibilitĂ© de la vĂ©ritĂ©, c’est-Ă -dire de rĂ©pondre aux questions suivantes 2 Etant donnĂ©e la dĂ©finition de la vĂ©ritĂ©, quelles conditions gĂ©nĂ©rales, du point de vue de l’absolu, doivent ĂȘtre remplies pour qu’il y ait des idĂ©es vraies ? 3 Ensuite, quelles conditions particuliĂšres doivent ĂȘtre remplies pour que nous, du point de vue de l’ñme humaine, ayons des idĂ©es vraies ? 4 Finalement, quelles conditions doivent ĂȘtre remplies pour que nous sachions que nous avons des idĂ©es vraies, c’est-Ă -dire pour que nous puissions reconnaĂźtre les idĂ©es vraies et les distinguer de celles qui sont fausses ? C’est le problĂšme du critĂšre de vĂ©ritĂ©. 2L’ordre des ces questions n’est pas fortuit. En effet, il semble bien que pour rĂ©pondre aux questions 2, 3 et 4, il nous faut d’abord rĂ©pondre Ă  celle qui porte sur la nature de la vĂ©ritĂ©, puisque c’est cette rĂ©ponse qui nous permettra de dĂ©terminer le sens prĂ©cis Ă  apporter aux mots vrai » et vĂ©ritĂ© » prĂ©sents dans ces questions. 3NĂ©anmoins, la liaison entre elles, surtout entre la premiĂšre et la derniĂšre, n’est pas dĂ©pourvue d’une certaine tension interne. Selon certains philosophes, par exemple Russell et Popper, nous devons distinguer soigneusement l’investigation qui porte sur la dĂ©finition de la vĂ©ritĂ© de celle qui concerne le critĂšre de vĂ©ritĂ©, et nous ne devons pas espĂ©rer que cette dĂ©finition nous apporte un critĂšre pour reconnaĂźtre la vĂ©ritĂ© d’un jugement donnĂ©. Selon eux, la premiĂšre question est complĂštement indĂ©pendante de la derniĂšre. D’autres, par exemple les pragmatistes et Dummet, soutiennent que toute recherche sur le concept de vĂ©ritĂ© resterait vide si elle n’était pas susceptible de nous montrer comment nous pouvons reconnaĂźtre la vĂ©ritĂ© d’un jugement donnĂ©. Pour eux, la rĂ©ponse Ă  apporter Ă  la premiĂšre question dĂ©pend de la prise en considĂ©ration de l’exigence exprimĂ©e par la derniĂšre. 1 Il [Cherbury] examine ce que c’est que la vĂ©ritĂ© ; et pour moi, je n’en ai jamais doutĂ©, me sembl ... 4Mais que la question concernant la dĂ©termination de la nature de la vĂ©ritĂ© soit considĂ©rĂ©e comme un problĂšme », voilĂ  qui a quelque chose de problĂ©matique ou de paradoxal en soi. En effet, si nous ne savions pas d’emblĂ©e ce qu’est la vĂ©ritĂ©, comment pourrions-nous l’apprendre ? Quelles raisons aurions-nous d’accepter une certaine dĂ©finition parmi les diverses dĂ©finitions possibles ? Bref, comment trouverions-nous la vraie dĂ©finition de la vĂ©ritĂ© ? Ce problĂšme a Ă©tĂ© posĂ© par Descartes dans une lettre bien connue adressĂ©e Ă  Mersenne le 16 octobre 1639. Descartes y affirme que la notion de vĂ©ritĂ© est si transcendantalement claire, qu’il est impossible de l’ignorer »1. Sa solution pour ce problĂšme consiste Ă  affirmer que nous avons une connaissance naturelle » de la notion de vĂ©ritĂ©, dĂ©finie nominalement par la conformitĂ© de la pensĂ©e avec l’objet. Pour lui, donc, le problĂšme de la vĂ©ritĂ© » renvoie essentiellement au problĂšme qui consiste Ă  trouver et Ă  fonder un critĂšre de vĂ©ritĂ©, le sens du terme vĂ©ritĂ© », quant Ă  lui, Ă©tant tout Ă  fait clair et naturellement donnĂ© Ă  l’esprit. 5On peut Ă©videmment accorder Ă  Descartes que si nous n’avions pas une comprĂ©hension naturelle du sens de la vĂ©ritĂ©, comprĂ©hension Ă  laquelle nous pouvons et devons faire appel pour nous guider dans notre investigation, nous resterions dans un vide conceptuel qui ne pourrait ĂȘtre rempli que par un choix arbitraire parmi les multiples dĂ©finitions possibles. NĂ©anmoins, on n’est pas forcĂ© de croire que cette connaissance naturelle soit aussi transcendantalement claire qu’elle semble l’ĂȘtre pour Descartes, ni non plus qu’elle Ă©puise le contenu du concept de vĂ©ritĂ©. On peut trĂšs bien soutenir que ce que nous connaissons naturellement de la vĂ©ritĂ© et que nous expliquons quid nominis, c’est-Ă -dire la dĂ©finition nominale de la vĂ©ritĂ©, ne porte que sur la propriĂ©tĂ© ou dĂ©nomination extrinsĂšque de l’idĂ©e vraie et que cette dĂ©finition, correspondant Ă  un niveau encore superficiel de la rĂ©flexion sur l’idĂ©e vraie, ne fournit que le point de dĂ©part pour une recherche plus approfondie sur la nature de la vĂ©ritĂ©. 6Tout se passe comme si cette dĂ©finition n’était qu’un instrument naturel premier, encore partiel et imparfait, Ă  l’aide duquel l’ñme, par un mouvement rĂ©flexif, pourrait progresser dans le sens d’un approfondissement de la comprĂ©hension de la forme de l’idĂ©e vraie. Or, cet effort rĂ©flexif, ce questionnement qui porte sur le concept mĂȘme de vĂ©ritĂ©, soit pour prĂ©ciser Ă  quoi il s’applique, soit pour en dĂ©gager d’autres dĂ©terminations que celle apportĂ©e par la dĂ©finition nominale, nous semble s’accorder avec la dĂ©marche effective de la pensĂ©e spinoziste. Tout au long de son Ɠuvre, du Court TraitĂ© et du TraitĂ© de la RĂ©forme de l’Entendement Ă  l’Éthique, Spinoza examine de façon critique la conception de la vĂ©ritĂ© comme correspondance, afin d’expliciter non seulement ses conditions de possibilitĂ©, mais aussi et surtout, de la complĂ©ter avec une propriĂ©tĂ© ou dĂ©nomination intrinsĂšque qui permette, d’une part, d’expliquer que nous puissions savoir avec certitude que nous avons des idĂ©es vraies, et, d’autre part, de fournir Ă  la perspective Ă©thique un principe explicatif de la supĂ©rioritĂ© interne du sage sur l’ignorant. 2 Cf. chap. XV, deuxiĂšme partie. GI/78 G » renverra toujours Ă  Spinoza Opera, Ă©d. Carl Gebhardt, 5 ... 7En effet, la simple correspondance entre la pensĂ©e et son objet n’est pas capable d’apporter une rĂ©ponse satisfaisante aux trois questions qui fournissent le fil conducteur de l’investigation spinoziste sur la vĂ©ritĂ©, et qui sont formulĂ©es de la façon suivante aussi bien dans le Court TraitĂ©2 que dans l’Éthique 3 Éthique II, Proposition XLIII, scolie. GII/124. Si une idĂ©e vraie, en tant qu’elle est dite seulement s’accorder avec ce dont elle est l’idĂ©e, se distingue d’une fausse, une idĂ©e vraie ne contient donc aucune rĂ©alitĂ© ou perfection de plus qu’une fausse puisqu’elles se distinguent seulement par une dĂ©nomination extrinsĂšque, et consĂ©quemment un homme qui a des idĂ©es vraies ne l’emporte en rien sur celui qui en a seulement des fausses ? Puis d’oĂč vient que les hommes ont des idĂ©es fausses ? Et enfin, d’oĂč quelqu’un peut-il savoir avec certitude qu’il a des idĂ©es qui conviennent avec leurs objets ?3 8Parmi ces trois questions, la premiĂšre, bien qu’étant sĂ»rement celle oĂč se manifeste la fin ultime qui dirige la pensĂ©e de Spinoza, ne nous concernera pas directement ici. Cela signifie que nous n’allons pas examiner les effets de l’exigence Ă©thique sur la dĂ©termination du concept de vĂ©ritĂ© chez Spinoza. Parmi les deux autres questions, c’est surtout celle concernant la possibilitĂ© de savoir avec certitude que nous avons des idĂ©es vraies qui doit retenir notre attention. En effet, celle-ci renvoie au problĂšme du critĂšre de vĂ©ritĂ© et c’est elle qui, dans un rapport de tension avec la dĂ©termination prĂ©alablement donnĂ©e de la nature de la vĂ©ritĂ©, met en marche l’approfondissement de la rĂ©flexion concernant la forme de l’idĂ©e vraie. 9La rĂ©ponse Ă  ces questions repose sur l’introduction de la dĂ©nomination intrinsĂšque de l’idĂ©e vraie, c’est-Ă -dire sur la notion spinoziste d’adaequatio. C’est cette notion qui permet d’expliquer que la vĂ©ritĂ© soit norme d’elle-mĂȘme et du faux, et qui exclut le recours Ă  une marque ou Ă  un signe extrinsĂšque qui serait nĂ©cessaire pour nous faire reconnaĂźtre cette vĂ©ritĂ© ; c’est elle qui fonde l’identification spinoziste entre l’idĂ©e vraie et la certitude et qui explique qu’une idĂ©e vraie ait plus de rĂ©alitĂ© qu’une fausse. 10L’investigation de Spinoza nous met ainsi devant deux aspects de l’idĂ©e vraie, l’un intrinsĂšque et l’autre extrinsĂšque. Tout le problĂšme consiste Ă  savoir si entre ces deux aspects il y a tension, contradiction ou complĂ©mentaritĂ© harmonieuse. Y a-t-il chez Spinoza deux thĂ©ories de la vĂ©ritĂ© qui s’opposent ou deux aspects qui se complĂštent dans une conception consistante de la vĂ©ritĂ© ? La rĂ©ponse Ă  ces questions partage les interprĂštes du spinozisme. 11Certains soutiennent qu’il y a dans l’Éthique une coexistence harmonieuse entre la conception de la vĂ©ritĂ© comme correspondance et celle de la vĂ©ritĂ© comme cohĂ©rence, liĂ©e Ă  la notion spinoziste d’adaequatio. Ainsi, R. Landim affirme 4 R. Landim, La notion de vĂ©ritĂ© dans l’Éthique de Spinoza », in Groupe de recherches spinozistes n ... Ces questions posĂ©es par la dĂ©finition de la vĂ©ritĂ© trouvent dans l’Éthique de Spinoza une rĂ©ponse aussi subtile qu’originale. Dans l’Éthique les deux thĂ©ories de la vĂ©ritĂ© coexistent. Si la vĂ©ritĂ© est en premier lieu correspondance, c’est par une sorte de cohĂ©rence que la vĂ©ritĂ© s’impose Ă  l’homme comme correspondance4. 12D’autres, comme F. AlquiĂ©, ont insistĂ© sur le caractĂšre conflictuel de cette coexistence. Il parle d’une certaine tension inhĂ©rente au concept spinoziste de la vĂ©ritĂ© », tension qui renvoie Ă  la difficultĂ© de concilier les trois affirmations suivantes 5 F. AlquiĂ©, Le Rationalisme de Spinoza, PUF, coll. ÉpimĂ©thĂ©e, Paris, 1981, p. 212. [1] La vĂ©ritĂ© est intĂ©rieure Ă  la pensĂ©e, et se dĂ©finit, non par son rapport avec la chose, mais par une dĂ©nomination intrinsĂšque ; [2] la vĂ©ritĂ© est sa propre marque, son propre signe, et celui qui possĂšde une idĂ©e vraie ne peut douter de sa vĂ©ritĂ© ; [3] la vĂ©ritĂ©, malgrĂ© les deux caractĂšres prĂ©cĂ©dents, est accord de l’idĂ©e et de la chose5. 6 Ce sont ceux, comme S. Hampshire ou H. Joachim, qui considĂšrent que Spinoza soutient exclusivement ... 7 Ce sont ceux, comme E. Curley ou J. Bennett, pour lesquels Spinoza adopte exclusivement la concepti ... 13D’autres encore, face Ă  cette tension et dĂ©sespĂ©rant de la rĂ©soudre, ont choisi de la supprimer en privilĂ©giant exclusivement soit les passages de Spinoza qui vont dans le sens de deux premiĂšres affirmations, interprĂ©tĂ©es comme exprimant une certaine version de la thĂ©orie de la vĂ©ritĂ© comme cohĂ©rence6, soit les passages qui vont dans le sens de la derniĂšre affirmation, assimilĂ©e Ă  la thĂ©orie de la vĂ©ritĂ© comme correspondance7. 14Bien entendu, le procĂ©dĂ© qui consiste Ă  supprimer la tension par l’élimination d’un de ses termes n’est pas lĂ©gitime ici. Il le serait si l’on pouvait montrer que ces affirmations renvoient Ă  des moments diffĂ©rents de la pensĂ©e de l’auteur, c’est-Ă -dire si l’on pouvait dissoudre la tension dans la considĂ©ration de l’évolution de la pensĂ©e de Spinoza. Mais tel n’est pas le cas puisque cette tension est prĂ©sente aussi bien dans le Court TraitĂ©, que dans le TraitĂ© de la rĂ©forme de l’entendement et dans l’Éthique. Ainsi, ou bien il est possible de rĂ©soudre conceptuellement cette tension, ou bien il faut avouer qu’elle renvoie Ă  une conception incohĂ©rente de la vĂ©ritĂ©. 8 En particulier, il n’est pas possible de dĂ©velopper ici l’analyse dĂ©taillĂ©e de la notion d’idĂ©e adĂ© ... 15Dans cette Ă©tude, mon objectif est de prĂ©senter quelques remarques qui permettent de soutenir la premiĂšre de ces deux options. Il me semble qu’il n’y a pas nĂ©cessairement d’exclusion mutuelle entre la thĂ©orie de la vĂ©ritĂ© comme cohĂ©rence et celle de la vĂ©ritĂ© comme correspondance, mais plutĂŽt un rapport de complĂ©mentaritĂ©. J’essaierai de montrer que l’originalitĂ© de Spinoza consiste prĂ©cisĂ©ment Ă  supprimer cette fausse opposition et Ă  faire de l’adaequatio et de la convenientia deux aspects complĂ©mentaires du concept de vĂ©ritĂ©. L’idĂ©e vraie, pour ĂȘtre pleinement vraie, doit satisfaire Ă  une double condition ĂȘtre adĂ©quate cohĂ©rente et s’accorder avec son objet. Sans pouvoir examiner ici la totalitĂ© des aspects enveloppĂ©s dans cette question8, je prĂ©tends seulement indiquer quelques Ă©lĂ©ments qui, permettant d’éliminer la tension signalĂ©e par F. AlquiĂ©, rendent possible cette complĂ©mentaritĂ© et illuminent l’originalitĂ© de la rĂ©flexion spinoziste sur la nature de la vĂ©ritĂ©. Qu’il y a un rapport de complĂ©mentaritĂ© entre adaequatio et convenientia 9 Éthique I, axiome VI. 16Il faut remarquer avant tout que Spinoza ne prĂ©sente pas dans l’Éthique, ni dans le TraitĂ© de la rĂ©forme de l’entendement, une dĂ©finition en bonne et due forme et explicite de la vĂ©ritĂ©. Dans l’Éthique, la traditionnelle dĂ©finition nominale de la vĂ©ritĂ© n’est pas prĂ©sentĂ©e sous forme de dĂ©finition, mais sous forme d’axiome l’idĂ©e vraie doit debet s’accorder convenire avec son idĂ©at »9. On ne doit pas penser que la substitution de l’énoncĂ© sous forme d’axiome Ă  l’énoncĂ© dĂ©finitionnel soit gratuite. En effet, les dĂ©finitions portent sur l’essence des choses et sur leurs affections, tandis que les axiomes concernent surtout les relations entre les choses. Ainsi, la mise en forme axiomatique de la dĂ©finition nominale vise Ă  indiquer que celle-ci ne porte que sur la relation extrinsĂšque de l’idĂ©e vraie Ă  l’objet, sans nous renseigner en quoi consiste l’idĂ©e vraie prise en elle-mĂȘme. 10 Je ne reconnais aucune diffĂ©rence entre l’idĂ©e vraie et l’idĂ©e adĂ©quate, sinon que le mot “vraie” ... 17C’est dans l’Éthique II, dĂ©finition IV, que Spinoza considĂšre l’idĂ©e vraie par sa propriĂ©tĂ© intrinsĂšque, c’est-Ă -dire par son adĂ©quation J’entends par idĂ©e adĂ©quate une idĂ©e qui, en tant qu’on la considĂšre en elle-mĂȘme, sans relation Ă  l’objet, a toutes les propriĂ©tĂ©s ou dĂ©nominations intrinsĂšques d’une idĂ©e vraie. Explication Je dis intrinsĂšques pour exclure celle qui est extrinsĂšque, Ă  savoir, l’accord de l’idĂ©e avec l’objet dont elle est l’idĂ©e ». Que l’adaequatio et la convenientia soient deux propriĂ©tĂ©s distinctes et complĂ©mentaires d’une seule et mĂȘme idĂ©e, c’est ce que Spinoza affirme clairement dans la lettre 60 Ă  Tchirnhaus10. IdĂ©e adĂ©quate » et idĂ©e vraie » sont deux dĂ©nominations distinctes pour dĂ©signer une seule et mĂȘme idĂ©e, selon que nous considĂ©rons cette idĂ©e unique soit dans sa nature, abstraction faite de son rapport Ă  l’objet, soit dans son rapport Ă  l’objet. Voyons donc ce qui rend possible cette complĂ©mentaritĂ©. 18Je prendrai comme fil conducteur de mon analyse le § 69 du TraitĂ© de la rĂ©forme de l’entendement Quant Ă  ce qui constitue la forme du vrai, il est certain que la pensĂ©e vraie ne se distingue pas seulement de la fausse par une dĂ©nomination extrinsĂšque, mais surtout par une dĂ©nomination intrinsĂšque. 19L’emploi de l’adverbe surtout » dans ce passage marque nettement la primautĂ© de la dĂ©nomination intrinsĂšque par rapport Ă  l’extrinsĂšque, mais l’affirmation de la subordination de cette derniĂšre Ă  la prĂ©cĂ©dente n’équivaut pas Ă  l’affirmation de son exclusion au profit de la premiĂšre. NĂ©anmoins, les exemples donnĂ©s ensuite par Spinoza semblent aller dans le sens d’une vĂ©ritable exclusion. En effet, il poursuit 11 GII/26. Si un ouvrier conçoit un ouvrage avec ordre, bien que cet ouvrage n’ait jamais existĂ© et mĂȘme ne doive jamais exister, sa pensĂ©e est nĂ©anmoins vraie que l’ouvrage existe ou non, cette pensĂ©e est la mĂȘme. Et au contraire, si quelqu’un dit, par exemple, que Pierre existe, sans savoir cependant que Pierre existe, sa pensĂ©e, par rapport Ă  lui, est fausse, ou, si l’on prĂ©fĂšre, n’est pas vraie, quoique Pierre existe effectivement. Et cette proposition Pierre existe, n’est vraie qu’en ce qui concerne celui qui sait avec certitude que Pierre existe11. 20Le deuxiĂšme exemple affirme clairement que le simple accord entre une affirmation et l’état de choses auquel elle renvoie n’est pas une condition suffisante pour qu’elle soit vraie, tandis que le premier exemple semble aller plus loin et affirmer qu’il n’est pas non plus une condition nĂ©cessaire de la vĂ©ritĂ©, puisque le plan conçu par l’ouvrier est dit vrai » indĂ©pendamment de l’existence de son objet. 12 Cf. Éthique I, Proposition VIII, scolie 2 ; Éthique II, Proposition VIII ; Éthique V, Proposition X ... 13 Selon Spinoza, le contraste entre l’existence Ă©ternelle et l’existence temporelle n’est pas un cont ... 14 Cf. les § 41, § 42, § 85, § 91 et § 99. 15 Cf. Éthique II, Propositions XXXII et XXXIV ; Proposition XLI, dĂ©monstration ; Proposition XLIII, d ... 21NĂ©anmoins, il est possible d’interprĂ©ter le premier exemple, Ă  la lumiĂšre de certaines thĂšses mĂ©taphysiques soutenues par Spinoza dans l’Éthique12, comme affirmant simplement que la vĂ©ritĂ© d’une pensĂ©e construite d’une façon ordonnĂ©e ne dĂ©pend pas de son accord avec quelque chose qui existe dans la durĂ©e, sans que cela signifie qu’elle ne s’accorde avec une essence Ă©ternelle contenue dans un attribut de Dieu. En effet, Ă©tant donnĂ© que le nĂ©cessitarisme de Spinoza entraĂźne que tout ce qui est concevable possĂšde un certain type d’actualitĂ© extra-mentale, il est lĂ©gitime d’affirmer qu’il n’y a pas d’idĂ©e vraie qui ne s’accorde avec un objet douĂ© d’actualitĂ©, que cette actualitĂ© soit l’existence temporelle de la chose ou l’existence Ă©ternelle de son essence13. Toute idĂ©e vraie a donc une portĂ©e existentielle et une dĂ©nomination extrinsĂšque. Cette lecture permet de maintenir la prĂ©sence constante de la dĂ©nomination extrinsĂšque de l’idĂ©e vraie indiquĂ©e au dĂ©but du § 69, affirmĂ©e dans d’autres paragraphes du TraitĂ© de la rĂ©forme de l’entendement14 et dans plusieurs passages de l’Éthique15. 16 Cf. ibid., Proposition XLIII, scolie. 22Parmi les deux dĂ©nominations de l’idĂ©e vraie, c’est surtout l’intrinsĂšque qui constitue la forme du vrai. C’est elle, en effet, qui permet de considĂ©rer l’idĂ©e vraie comme ayant plus de rĂ©alitĂ© ou de perfection interne qu’une idĂ©e fausse, et qui permet d’affirmer qu’il y a entre l’idĂ©e vraie et la fausse la mĂȘme relation qu’entre l’ĂȘtre et le non ĂȘtre16. C’est Ă  elle que le § 70 du TraitĂ© de la rĂ©forme de l’entendement se rĂ©fĂšre quand il affirme qu’il y a dans les idĂ©es quelque chose de rĂ©el par quoi les vraies se distinguent des fausses », ce quelque chose de rĂ©el » consistant dans la possession effective d’un savoir concernant ce qu’on affirme. Cela lie indissolublement, comme nous le verrons par la suite, le concept spinoziste de vĂ©ritĂ© au concept de savoir. Comment ce rapport de complĂ©mentaritĂ© est-il possible ? 17 Bien que la substitution de l’énoncĂ© dĂ©finitionnel par l’axiomatique ne soit pas dĂ©pourvue d’import ... 23Si la vĂ©ritĂ© de l’idĂ©e vraie Ă©tait rĂ©duite Ă  la dimension extrinsĂšque, il semble bien que nous serions contraints d’adopter l’interprĂ©tation rĂ©aliste de la dĂ©finition nominale de la vĂ©ritĂ©, selon laquelle une idĂ©e est vraie parce qu’elle s’accorde Ă  son Dans ce cas, c’est l’objet qui rend l’idĂ©e vraie, c’est la prĂ©sence d’une rĂ©alitĂ© extĂ©rieure qui est la norme de la vĂ©ritĂ© de l’idĂ©e. On voit bien que cela est tout Ă  fait contraire Ă  la thĂšse spinoziste selon laquelle la vĂ©ritĂ© est norme d’elle mĂȘme et du faux », et qu’ainsi, celle-ci ne pouvant pas ĂȘtre fondĂ©e sur la dĂ©nomination extrinsĂšque de l’idĂ©e vraie et la dĂ©finition de la vĂ©ritĂ© Ă  elle attachĂ©e, elle devra ĂȘtre fondĂ©e sur la dĂ©nomination intrinsĂšque de l’idĂ©e vraie. L’adaequatio devra fournir un aspect complĂ©mentaire Ă  la dĂ©finition de la vĂ©ritĂ© qui fonctionne aussi comme norme de la vĂ©ritĂ©. 24Si je dis aspect complĂ©mentaire », c’est pour souligner encore une fois que cela ne signifie pas qu’il faille exclure la dĂ©finition nominale de la vĂ©ritĂ©. Celle-ci affirme simplement que l’idĂ©e vraie s’accorde Ă  son objet. Elle ne prĂ©cise pas en quoi consiste cet accord ni non plus quel est, parmi les termes en rapport, celui qui rend l’idĂ©e vraie. L’interprĂ©tation rĂ©aliste de cette dĂ©finition va plus loin parce qu’elle affirme que c’est exclusivement Ă  l’objet qu’il appartient la fonction de rendre l’idĂ©e vraie. On peut nĂ©anmoins maintenir cette dĂ©finition tout en excluant l’interprĂ©tation rĂ©aliste. Dans ce cas, il faudra dire que l’idĂ©e vraie, Ă©tant intrinsĂšquement vraie adĂ©quate, doit s’accorder avec son objet, c’est-Ă -dire doit avoir aussi la dĂ©nomination extrinsĂšque. Seule l’exclusion de l’interprĂ©tation rĂ©aliste de la dĂ©finition nominale peut rendre compatible les deux aspects de l’idĂ©e vraie. 25Ces considĂ©rations permettent d’avancer dans la comprĂ©hension de l’emploi du mot debet » dans la formulation de l’axiome VI de l’Éthique I. D’aprĂšs ce qui a Ă©tĂ© dit, cet axiome doit ĂȘtre interprĂ©tĂ© comme l’équivalent de la formule suivante 261 Si une idĂ©e est vraie intrinsĂšquement vraie, adĂ©quate, alors elle s’accorde nĂ©cessairement avec son objet ». 27Et non comme l’équivalent de la formule suivante 282 Si une idĂ©e s’accorde avec son objet, alors elle est nĂ©cessairement vraie ». 18 TraitĂ© de la rĂ©forme de l’entendement, tr. A. KoyrĂ©, J. Vrin, Paris, 1984, note 69, p. 107. 29Cela veut dire que si une idĂ©e vraie s’accorde avec son objet, elle le fait, comme le dit A. KoyrĂ©, vi propria ; elle s’y accorde parce qu’elle est vraie et non inversement »18. Le mot debet » exprime le fait, pour la dĂ©nomination extrinsĂšque, d’ĂȘtre une consĂ©quence nĂ©cessaire de la puissance intrinsĂšque de la pensĂ©e vraie. Cela signifie que, dans le rapport de complĂ©mentaritĂ© entre convenientia et adaequatio, il y a subordination de la premiĂšre Ă  la seconde. 30Cette lecture, qui exclut le caractĂšre rĂ©aliste de la dĂ©finition nominale, peut ĂȘtre renforcĂ©e par l’analyse du deuxiĂšme exemple donnĂ© dans le § 69, qui concerne l’affirmation de l’existence de Pierre. Selon ce passage, la simple rencontre fortuite entre un Ă©tat de choses et l’affirmation qui le reprĂ©sente n’est pas une condition suffisante pour que cette affirmation puisse ĂȘtre qualifiĂ©e de vraie. La simple existence fortuite de l’état de choses affirmĂ© ne rend pas l’idĂ©e vraie. Par contre, cette mĂȘme affirmation, faite par celui qui sait avec certitude que Pierre existe », c’est-Ă -dire liĂ©e Ă  une idĂ©e adĂ©quate qui porte en soi la totalitĂ© des causes ou raisons de ce qu’on affirme, recevra lĂ©gitimement ce prĂ©dicat. Seule une affirmation connectĂ©e au systĂšme de raisons qui la justifient peut ĂȘtre vraie. 19 GII/124. 31Ainsi, pour Spinoza, il n’y a de proposition vraie sur une chose que si elle consiste dans un savoir certain sur cette chose. Dans la connaissance vraie, il y a un rapport indissociable entre ce qui est affirmĂ© et les raisons par lesquelles cela est affirmĂ©, ce qui conduit Spinoza Ă  soutenir, dans l’Éthique II, Proposition XLIII, scolie, qu’ avoir une idĂ©e vraie ne signifie rien, sinon connaĂźtre une chose parfaitement ou le mieux possible »19. 32 Parfaitement ou le mieux possible » dĂ©signe la forme par laquelle la chose est connue, le processus d’engendrement de la connaissance. Et dĂšs lors que ce processus ne reste pas Ă©tranger Ă  la vĂ©ritĂ© de l’affirmation Ă  laquelle il conduit, mais fait partie intĂ©grante de la signification mĂȘme de sa vĂ©ritĂ©, il n’est pas possible qu’une affirmation soit vraie si elle est dĂ©pourvue de cette forme, si donc elle n’est pas la connaissance parfaite de son objet. L’indissociabilitĂ© entre l’opĂ©ration rationnelle qui fonde et justifie une certaine affirmation et la vĂ©ritĂ© de cette affirmation, l’immanence du processus dĂ©monstratif Ă  la vĂ©ritĂ©, signifie que le rejet de l’interprĂ©tation rĂ©aliste de la dĂ©finition nominale s’accompagne, chez Spinoza, de l’exclusion consĂ©cutive de ce que M. Dummett a appelĂ© de principe de connaissance », selon lequel un Ă©noncĂ© peut ĂȘtre vrai mĂȘme si l’on ne peut pas connaĂźtre ce qui le rend vrai ». Spinoza soutient ainsi une certaine conception Ă©pistĂ©mique de la vĂ©ritĂ©. 20 Pour cette interprĂ©tation de M. Dummett, voir R. Landim A interpretação realista da definição n ... 33Le rĂ©alisme, selon Dummett, peut ĂȘtre caractĂ©risĂ© par la conjonction du principe de correspondance » si un Ă©noncĂ© est vrai il doit y avoir quelque chose en vertu de laquelle il est vrai » ; du principe de bivalence » tout Ă©noncĂ© est vrai ou faux d’une maniĂšre dĂ©terminĂ©e » ; et du principe de connaissance » si un Ă©noncĂ© est vrai, il doit ĂȘtre, en principe, possible de connaĂźtre qu’il est vrai ». Or, dans la mesure oĂč les limites de la connaissance humaine ne dĂ©terminent pas les limites de toute connaissance possible, ce principe peut ĂȘtre interprĂ©tĂ© comme affirmant que quelque chose peut rendre vrai un Ă©noncĂ© sans que nous puissions l’identifier. Il peut, par consĂ©quent, ĂȘtre reformulĂ© de la façon suivante les conditions de vĂ©ritĂ© d’un Ă©noncĂ© peuvent ĂȘtre remplies indĂ©pendamment de notre capacitĂ© de savoir si elles sont ou non remplies ». Le rĂ©alisme, ainsi caractĂ©risĂ©, Ă©tablit une nette sĂ©paration entre le fait pour un Ă©noncĂ© d’ĂȘtre vrai et les raisons qui permettent de le considĂ©rer comme tel, puisqu’il est possible qu’un Ă©noncĂ© soit vrai et qu’on ne puisse pas le dĂ©montrer20. Nous voyons ainsi que le rejet spinoziste de cette sĂ©paration, prĂ©sent dans le § 69 du TraitĂ© de la rĂ©forme de l’entendement, s’accorde bien avec son rejet de l’interprĂ©tation rĂ©aliste de la dĂ©finition nominale de la vĂ©ritĂ©. 21 Éthique II, Proposition III. 22 Ibid, Proposition VI, corollaire. 23 Cette inspiration est nettement prĂ©sente dans la thĂ©orie de la dĂ©finition gĂ©nĂ©tique formulĂ©e dans l ... 34Il faut nĂ©anmoins souligner que l’exclusion de l’interprĂ©tation rĂ©aliste de la dĂ©finition nominale de la vĂ©ritĂ© ne fait pas de Spinoza un idĂ©aliste. D’aprĂšs lui, jamais l’ĂȘtre des choses ne se rĂ©duit au fait pour elles d’ĂȘtre pensĂ©es. MĂȘme si tout ce qui existe est nĂ©cessairement l’objet d’une idĂ©e en Dieu21, ce n’est pas cela qui constitue l’ĂȘtre formel de l’objet, car Spinoza exclut catĂ©goriquement l’hypothĂšse d’un entendement crĂ©ateur22. Sa position pourrait ĂȘtre caractĂ©risĂ©e comme celle d’un rĂ©aliste mĂ©taphysique qui, en vertu de son inspiration constructiviste23, refuse le rĂ©alisme Ă©pistĂ©mologique. Cela signifie que tout en acceptant l’existence indĂ©pendante d’une rĂ©alitĂ© extĂ©rieure Ă  la pensĂ©e, Spinoza nie la fonction de cette rĂ©alitĂ© dans la production des idĂ©es ainsi que dans la dĂ©termination par soi seule de leur valeur de vĂ©ritĂ©. 24 Éthique II, Proposition XL, scolie 2. 35Le fameux exemple de la quatriĂšme proportionnelle, utilisĂ© par Spinoza pour illustrer aussi bien les diffĂ©rences entre les modes de perception du TraitĂ© de la rĂ©forme de l’entendement § 23 et 24 que les genres de connaissance de l’Éthique24, illustre bien ce lien indissociable entre ce qu’on affirme et les raisons qui prouvent ce qu’on affirme dans l’idĂ©e vraie. En effet, le mĂȘme rĂ©sultat peut ĂȘtre atteint par des procĂ©dĂ©s cognitifs qui divergent qualitativement, et cette divergence quant Ă  la maniĂšre de parvenir au rĂ©sultat permet de poser les uns et d’exclure les autres de la sphĂšre de la vĂ©ritĂ©. 36La simple application aveugle d’une rĂšgle qu’on a apprise par ouĂŻ-dire mais dont la raison nous Ă©chappe premier mode de perception, ou qui a Ă©tĂ© trouvĂ©e par des expĂ©riences particuliĂšres non guidĂ©es par la raison, et gĂ©nĂ©ralisĂ©e ensuite d’une façon abusive, sans que nous puissions comprendre la validitĂ© de la rĂšgle et la nĂ©cessitĂ© du rĂ©sultat obtenu second mode de perception, conduit Ă  des affirmations gratuites et incertaines qui ne peuvent pas ĂȘtre qualifiĂ©es de vraies. MĂȘme si l’application de la rĂšgle nous mĂšne au rĂ©sultat correct », la simple impossibilitĂ© de rendre compte du chemin qui y conduit l’exclut de la vĂ©ritĂ©. Ces modes de perception, qui font partie du premier genre de connaissance dans l’Éthique, sont inadĂ©quats et par consĂ©quent non-vrais. 25 Il est important de rapprocher cette distinction intrinsĂšque, du point de vue de la vĂ©ritĂ©, entre s ... 37Par contre, l’application de la rĂšgle comprise Ă  partir des propriĂ©tĂ©s communes des nombres proportionnels troisiĂšme mode de perception, second genre de connaissance, ou l’infĂ©rence directe de la quatriĂšme proportionnelle Ă  partir de l’intuition du rapport entre le premier et le second nombre quatriĂšme mode de perception, troisiĂšme genre de connaissance, Ă©tant de procĂ©dĂ©s qui peuvent rendre compte du chemin qui les mĂšne nĂ©cessairement au rĂ©sultat, appartiennent Ă  la sphĂšre de la vĂ©ritĂ©. Ainsi, il ne suffit pas de suivre aveuglĂ©ment une rĂšgle qui nous mĂšne au rĂ©sultat correct pour Ă©noncer des propositions vraies. Il faut aussi comprendre la nĂ©cessitĂ© de la rĂšgle, cette comprĂ©hension Ă©tant la condition mĂȘme pour la comprĂ©hension de la nĂ©cessitĂ© du rĂ©sultat25. Comparaison avec Descartes 38Pour mieux saisir l’originalitĂ© de la pensĂ©e de Spinoza, il est intĂ©ressant de rapprocher ce qu’il affirme dans le § 69 du TraitĂ© de la rĂ©forme de l’entendement de ce que Descartes soutient dans ses MĂ©ditations MĂ©taphysiques. 39Nous trouvons dans les MĂ©ditations deux passages qui illustrent la position de Descartes Ă  propos du principe de connaissance ». Le premier se trouve au dĂ©but de la TroisiĂšme MĂ©ditation 26 AT-VII-35 AT » renvoie aux Ɠuvres de Descartes, Ă©d. Charles Adam et Paul Tannery, Paris, LĂ©opold ... Mais il y avait encore une autre chose que j’assurais, et qu’à cause de l’habitude que j’avais Ă  la croire, je pensais apercevoir trĂšs clairement, quoique vĂ©ritablement je ne l’aperçusse point, Ă  savoir qu’il y avait des choses hors de moi, d’oĂč procĂ©dait ces idĂ©es, et auxquelles elles Ă©taient tout Ă  fait semblables. Et c’était en cela que je me trompais ; ou, si peut-ĂȘtre je jugeais selon la vĂ©ritĂ©, ce n’était aucune connaissance que j’eusse, qui fĂ»t cause de la vĂ©ritĂ© de mon jugement si verum judicabam, id non ex vi meae percepcionis contingebat26. 40Dans ce passage Descartes admet que si ce qu’il assurait s’accordait effectivement avec la rĂ©alitĂ©, son jugement serait vrai, malgrĂ© l’absence d’une perception claire et distincte de ce qu’il affirmait. Son jugement serait vrai non par la force ex vi de sa perception, mais, pourrait-on dire, grĂące Ă  une rencontre hasardeuse avec la rĂ©alitĂ©. Son hĂ©sitation c’était en cela que je me trompais ; ou, si peut-ĂȘtre je jugeais selon la vĂ©ritĂ©... » ne porte pas sur la lĂ©gitimitĂ© de considĂ©rer un jugement de ce type comme vrai, mais plutĂŽt sur la possibilitĂ© de reconnaĂźtre ou dĂ©terminer cette vĂ©ritĂ©. Le jugement serait, absolument parlant, vrai, mais l’absence de clartĂ© et de distinction l’empĂȘcherait de connaĂźtre sa vĂ©ritĂ©. 41Spinoza, quant Ă  lui, n’hĂ©site pas Ă  considĂ©rer un tel jugement, de par l’absence mĂȘme d’une perception adĂ©quate de ce qui est affirmĂ©, comme Ă©tant hors de la sphĂšre des jugements vrais. Et cela mĂȘme si ce qu’il affirme s’accorde avec la rĂ©alitĂ©. Pour lui, un jugement dont la vĂ©ritĂ© ne dĂ©pend en rien de la puissance explicative de la pensĂ©e ne peut pas ĂȘtre qualifiĂ© de vrai ». Sa seule hĂ©sitation, dont j’indiquerai ensuite le sens possible, porte sur la façon de dĂ©signer ce jugement, hĂ©sitant entre les prĂ©dicats faux » et non-vrai » sa pensĂ©e...est fausse ou, si l’on prĂ©fĂšre, n’est pas vraie, encore que Pierre existe effectivement. » 42Chez Descartes, l’absence de clartĂ© et de distinction, c’est-Ă -dire du critĂšre de vĂ©ritĂ©, empĂȘche la reconnaissance de la vĂ©ritĂ©, mais le jugement reste, malgrĂ© cela, vrai. Il y a dissociation entre ce qui identifie et ce qui rend un jugement vrai. Chez Spinoza, l’absence d’adĂ©quation, c’est-Ă -dire de la propriĂ©tĂ© intrinsĂšque de l’idĂ©e vraie, empĂȘche que le jugement puisse ĂȘtre, au sens pleinement spinoziste, vrai, et a fortiori qu’il puisse y avoir une reconnaissance quelconque de sa vĂ©ritĂ©. 43L’autre passage de Descartes se trouve dans la QuatriĂšme MĂ©ditation, dans le contexte d’une discussion Ă  propos du bon usage du libre arbitre 27 AT-IX-48. Or si je m’abstiens de donner mon jugement sur une chose, lorsque je ne la conçois pas avec assez de clartĂ© et de distinction, il est Ă©vident que j’en use fort bien, et que je ne suis point trompĂ© ; mais si je me dĂ©termine Ă  la nier, ou assurer, alors je ne me sers plus comme je dois de mon libre arbitre ; et si j’assure ce qui n’est pas vrai, il est Ă©vident que je me trompe ; mĂȘme aussi, encore que je juge selon la vĂ©ritĂ©, cela n’arrive que par hasard, et je ne laisse pas de faillir...27 44Ici Descartes affirme clairement qu’un jugement qui s’accorderait par hasard avec la rĂ©alitĂ© ne laisserait pas d’ĂȘtre un jugement vrai. S’il le rapproche d’un jugement faux, il ne va pas jusqu’à le qualifier de faux ou de non-vrai, comme le fait Spinoza. Ce rapprochement vise Ă  attirer l’attention sur le fait qu’un jugement qui par hasard se trouve ĂȘtre vrai renvoie, tout comme un jugement faux, Ă  un mauvais usage du libre arbitre. Mais ce jugement ne laisse pas d’ĂȘtre vrai, mĂȘme s’il trouve Ă  sa racine le mĂȘme mauvais usage du libre arbitre qui engendre la faussetĂ©. Nous voyons ainsi comment chez Descartes, contrairement Ă  ce qui se passe chez Spinoza, c’est bien la prĂ©sence de l’objet qui a la fonction de rendre le jugement vrai et comment l’absence d’évidence ne le rend pas faux mais seulement douteux. Cela montre que l’interprĂ©tation rĂ©aliste de la dĂ©finition nominale s’accompagne du principe de connaissance », et que l’exclusion de l’un entraĂźne celle de l’autre. Le refus du principe de bivalence » et le problĂšme de la valeur de vĂ©ritĂ© de l’imagination 45En consonance avec le refus de l’interprĂ©tation rĂ©aliste du principe de correspondance et du principe de connaissance, l’hĂ©sitation de Spinoza entre les prĂ©dicats faux » et non-vrai » dans le § 69 suggĂšre encore, au moins implicitement, une possible rupture avec le principe de bivalence, faisant basculer ainsi la dichotomie traditionnelle du vrai et du faux. En effet, dans ce paragraphe du TraitĂ© de la rĂ©forme de l’entendement, Spinoza suggĂšre une distinction entre trois valeurs de vĂ©ritĂ© le vrai, le non-vrai et le faux. Cette tripartition entraĂźne une asymĂ©trie dans les rapports entre adĂ©quation et vĂ©ritĂ©, d’une part, et inadĂ©quation et faussetĂ©, d’autre part. Si toute idĂ©e adĂ©quate est nĂ©cessairement vraie et vice-versa, cette rĂ©ciprocitĂ© n’arrive point dans le rapport entre inadĂ©quation et faussetĂ©. Bien que toute idĂ©e fausse soit nĂ©cessairement inadĂ©quate, toute idĂ©e inadĂ©quate n’est pas nĂ©cessairement fausse, sans que cela signifie que ces idĂ©es soient vraies. Dans ce cas, le fait pour une idĂ©e de ne pas ĂȘtre vraie n’implique pas qu’elle soit fausse. La ligne de partage essentielle se fait entre l’idĂ©e adĂ©quate et l’idĂ©e inadĂ©quate, celle-ci pouvant ĂȘtre fausse ou simplement non-vraie. 28 Cf. G. H. R. Parkinson, Truth Is Its Own Standard Aspects of Spinoza’s Theory of Truth », in Sh ... 29 Éthique II, Proposition XLI, dĂ©monstration, et Proposition XXVIII. 30 Ibid., Proposition XLI. 31 Éthique II, Proposition XVII, scolie et Proposition XLIX, scolie. 32 Éthique IV, Proposition I, dĂ©monstration et scolie. 46Certains interprĂštes ont signalĂ© la prĂ©sence de cette distinction dans le § 69, tout en affirmant ensuite qu’il n’y en a aucune trace dans l’Éthique28. NĂ©anmoins, je voudrais juste indiquer, pour finir, comment cette distinction entre l’idĂ©e inadĂ©quate non-vraie et l’idĂ©e inadĂ©quate fausse permet d’éclaircir d’une maniĂšre satisfaisante une ambiguĂŻtĂ© prĂ©sente dans les affirmations de l’Éthique concernant le rapport entre la faussetĂ© et la connaissance imaginative, connaissance qui est constituĂ©e exclusivement par des idĂ©es qui sont toujours inadĂ©quates et confuses29. En effet, Spinoza affirme, d’une part, que cette connaissance est l’unique cause de la faussetĂ©30. D’autre part, il affirme que les imaginations de l’Âme, considĂ©rĂ©es en elles-mĂȘmes, ne contiennent aucune erreur »31 ; ou encore, que la prĂ©sence d’une idĂ©e vraie peut supprimer l’erreur causĂ©e par une connaissance imaginative sans supprimer ce qu’il y a de positif dans cette mĂȘme connaissance32. Or, il est extrĂȘmement significatif que dans l’Éthique Spinoza ne qualifie jamais de vraie une idĂ©e imaginative. Dans ce dernier passage, mĂȘme s’il lui arrive de parler d’une positivitĂ© de l’idĂ©e imaginative qui n’est pas fausse, il ne va pas jusqu’à qualifier cette idĂ©e, dans son rapport Ă  l’ñme humaine, comme vraie, ce qu’il n’aurait pas pu faire s’il n’avait pas distinguĂ© entre l’idĂ©e inadĂ©quate non-vraie et l’idĂ©e inadĂ©quate fausse. 33 Pour la distinction entre l’objet directement reprĂ©sentĂ© et l’objet indirectement reprĂ©sentĂ© par l’ ... 34 Éthique II, Proposition XXVIII. 35 Bien entendu, ce n’est pas par l’idĂ©e inadĂ©quate que nous pouvons savoir qu’elle s’accorde avec l’a ... 36 Cette idĂ©e est l’équivalent Ă©pistĂ©mique de la passion joyeuse. Celle-ci naĂźt d’un accord entre des ... 47Si nous nous rappelons que les idĂ©es inadĂ©quates de l’imagination sont les idĂ©es des affections du corps humain causĂ©es par les corps extĂ©rieurs, et que ces idĂ©es, qui indiquent directement l’état du corps humain, nous permettent aussi de percevoir indirectement la cause extĂ©rieure de cet Ă©tat33, nous constaterons que l’idĂ©e inadĂ©quate non-vraie est celle qui, tout en s’accordant, grĂące au parallĂ©lisme, avec son corrĂ©lat physique, Ă  savoir l’affection du corps, ne l’indique que trĂšs confusĂ©ment. Bien qu’elle s’accorde avec l’affection, elle ne peut pas l’expliquer par ses causes. En effet, l’affection du corps est dĂ©terminĂ©e par une sĂ©rie infinie de causes finies. Dans la mesure oĂč l’ñme humaine n’est qu’une partie de l’entendement infini de Dieu, elle n’est pas capable de connaĂźtre la totalitĂ© infinie de cette sĂ©rie. Ainsi, l’idĂ©e d’affection, considĂ©rĂ©e exclusivement dans son rapport Ă  l’ñme humaine, est nĂ©cessairement comme une consĂ©quence dĂ©tachĂ©e de ses prĂ©misses », c’est-Ă -dire inadĂ©quate et confuse34. Son inadĂ©quation irrĂ©ductible est suffisante pour l’exclure de la vĂ©ritĂ©, tandis que son accord fortuit », c’est-Ă -dire non justifiĂ© par l’idĂ©e35, avec son corrĂ©lat physique, sans ĂȘtre suffisant pour la dĂ©terminer comme vraie, suffit pour l’exclure de la faussetĂ©36. L’idĂ©e inadĂ©quate fausse, pour sa part, est l’idĂ©e d’affection qui, outre son inadĂ©quation et confusion, ne s’accorde pas Ă  l’objet indirect auquel elle renvoie le corps extĂ©rieur qui est cause de l’affection. Si Spinoza soutenait exclusivement une thĂ©orie de la vĂ©ritĂ© comme correspondance, il devrait dĂ©signer le premier aspect des idĂ©es imaginatives comme vrai, ce qu’il ne fait pas. S’il soutenait exclusivement une certaine conception de la vĂ©ritĂ© comme cohĂ©rence, l’inadĂ©quation coĂŻnciderait avec la faussetĂ©, et il ne pourrait pas se rĂ©fĂ©rer Ă  la positivitĂ© des idĂ©es inadĂ©quates de l’imagination, ce qu’il fait pourtant. Mais, si la vĂ©ritĂ© naĂźt de la conjonction entre adĂ©quation et correspondance, conjonction rendue possible par l’exclusion de l’interprĂ©tation rĂ©aliste de la dĂ©finition nominale de la vĂ©ritĂ©, il est possible de considĂ©rer comme fausse l’idĂ©e inadĂ©quate qui ne s’accorde pas avec son objet indirect, et simplement comme non-vraie celle qui s’accorde avec son objet direct. 48Ainsi, nous pouvons conclure que c’est l’exclusion de l’interprĂ©tation rĂ©aliste de la dĂ©finition nominale de la vĂ©ritĂ© et, d’une maniĂšre plus gĂ©nĂ©rale, la tendance Ă  refuser les principes du rĂ©alisme Ă©pistĂ©mologique, qui permet Ă  la pensĂ©e spinoziste de dissoudre la tension signalĂ©e par F. AlquiĂ© et de rendre compatible les deux propriĂ©tĂ©s de l’idĂ©e vraie. Il reste toutefois que rendre compatibles ces deux propriĂ©tĂ©s n’est pas encore montrer la nĂ©cessitĂ© de leur liaison. Pour expliciter comment et pourquoi la convenientia est une propriĂ©tĂ© nĂ©cessairement liĂ©e Ă  l’adaequatio, il faudrait examiner la doctrine du parallĂ©lisme et la fonction exercĂ©e par la substance absolue comme fondement de la complĂ©mentaritĂ© entre les deux aspects de la vĂ©ritĂ©. Cette tĂąche, nĂ©anmoins, dĂ©passe largement les objectifs et limites de cet article. Landim, R., A interpretação realista da definição nominal da verdade », Manuscrito, volume VI, n° 2, abril 1983. Haut de page Bibliographie AlquiĂ©, F., Le Rationalisme de Spinoza, PUF, coll. ÉpimĂ©thĂ©e, Paris, 1981. Curley, E., Spinoza’s Metaphysics An Essay in interpretation, Harvard University Press, Cambridge, Mass., 1969. Curley, E., Spinoza on Truth », Australasian Journal of Philosophy, vol. 72, n° 1, March 1994. Descartes, R., ƒuvres Philosophiques, Ă©d. F. AlquiĂ©, 3 tomes, Garnier, Paris, 1973. Descartes, R., Ɠuvres de Descartes, Ă©d. Charles Adam et Paul Tannery, Paris, LĂ©opold Cerf, 1897-1909 ; rééd. Vrin-CNRS, 11 vol., 1964-1974. Dummett, M., Philosophie de la Logique, Éditions de Minuit, coll. Propositions, Paris, 1991. Gleizer, M. A., Verdade e certeza em Espinosa, ed. L & PM, Porto Alegre, 1999. Gleizer, M. A., Imaginação, Verdade e Falsidade na Ética de Espinosa ; dissertação de mestrado defendida no departamento de Filosofia da UFRJ, Rio de Janeiro, 1987 inĂ©dita. Landim, R., La notion de vĂ©ritĂ© dans l’Éthique de Spinoza », in Groupe de recherches spinozistes n° 2, Paris, 1989. Landim, R., Significado e verdade », SĂ­ntese, nÂș 32, dezembro 1984. Parkinson, G. H. R., Truth Is Its Own Standard Aspects of Spinoza’s Theory of Truth », in Shahan and Biro eds., Spinoza New Perspectives, University of Oklahoma Press, 1978. Della Rocca, M., Representation and the Mind-Body Problem in Spinoza ; Oxford University Press, 1996. Spinoza, B., Spinoza Opera, ed. Carl Gebhardt, 5 vol., Heidelberg, Carl Winters, 1924. Spinoza, B., Éthique, prĂ©sentĂ© et traduit par Bernard Pautrat, Éditions du Seuil, Paris, 1999. Spinoza, B., Éthique, Ă©dition bilingue, trad. et notes de Ch. Appuhn, J. Vrin, Paris, 1983. Spinoza, B., TraitĂ© de la RĂ©forme de l’Entendement, trad. de A. KoyrĂ©, J. Vrin, Paris, 1984. Haut de page Notes 1 Il [Cherbury] examine ce que c’est que la vĂ©ritĂ© ; et pour moi, je n’en ai jamais doutĂ©, me semblant que c’est une notion si transcendantalement claire, qu’il est impossible de l’ignorer en effet, on a bien des moyens pour examiner une balance avant que de s’en servir, mais on n’en aurait point pour apprendre ce que c’est que la vĂ©ritĂ©, si on ne la connaissait de nature. Car quelle raison aurions-nous de consentir Ă  ce qui nous l’apprendrait, si nous ne savions qu’il fĂ»t vrai, c’est-Ă -dire, si nous ne connaissions la vĂ©ritĂ© ? Ainsi on peut bien expliquer quid nominis Ă  ceux qui n’entendent pas la langue, et leur dire que ce mot vĂ©ritĂ©, en sa propre signification, dĂ©note la conformitĂ© de la pensĂ©e avec l’objet, mais lorsqu’on l’attribue aux choses qui sont hors de la pensĂ©e, il signifie seulement que ces choses peuvent servir d’objets Ă  des pensĂ©es vĂ©ritables, soit aux nĂŽtres, soit Ă  celles de Dieu; mais on ne peut donner aucune dĂ©finition de logique qui aide Ă  connaĂźtre sa nature » R. Descartes, ƒuvres Philosophiques, Ă©d. F. AlquiĂ©, Garnier, Paris, 1973, t. II, p. 144. 2 Cf. chap. XV, deuxiĂšme partie. GI/78 G » renverra toujours Ă  Spinoza Opera, Ă©d. Carl Gebhardt, 5 vol., Heidelberg, Carl Winters, 1924. 3 Éthique II, Proposition XLIII, scolie. GII/124. 4 R. Landim, La notion de vĂ©ritĂ© dans l’Éthique de Spinoza », in Groupe de recherches spinozistes n° 2, Paris, 1989, p. 123. Il faut remarquer que Landim semble distinguer dans son article entre ce qui constitue proprement la vĂ©ritĂ© la correspondance et ce qui nous permet de la reconnaĂźtre la cohĂ©rence, puisqu’il affirme que la cohĂ©rence est ce par quoi la vĂ©ritĂ© s’impose Ă  l’homme comme correspondance. Bref, au lieu d’une coexistence entre deux thĂ©ories de la vĂ©ritĂ©, il s’agit plutĂŽt d’une distinction entre la dĂ©finition et le critĂšre de vĂ©ritĂ©. Or, si l’on pose que la correspondance Ă©puise la dĂ©finition de la vĂ©ritĂ©, Ă©tant donnĂ©e l’impossibilitĂ© de comparer l’idĂ©e avec son objet pour vĂ©rifier la satisfaction de cet accord, il faudra chercher une propriĂ©tĂ© intrinsĂšque Ă  la pensĂ©e qui puisse lĂ©gitimement l’attester. Dans ce cas, nĂ©anmoins, cette propriĂ©tĂ© sera distincte de la propriĂ©tĂ© d’ĂȘtre vraie et il y aura dissociation entre ce qui rend et ce qui identifie une idĂ©e vraie. Nous sommes ainsi ramenĂ©s Ă  la position cartĂ©sienne du problĂšme de la vĂ©ritĂ©. La dĂ©finition de la vĂ©ritĂ© Ă©tant transcendentalement claire », le problĂšme consiste Ă  trouver un critĂšre ou signe de la vĂ©ritĂ© et Ă  prouver sa validitĂ©. Par contre, si, comme le fait Spinoza, la propriĂ©tĂ© intrinsĂšque de la pensĂ©e vraie est posĂ©e comme faisant partie de la dĂ©finition mĂȘme de la vĂ©ritĂ©, c’est-Ă -dire s’il n’y a pas de vĂ©ritĂ© sans justification rationnelle seule l’idĂ©e adĂ©quate qui porte en elle la complĂ©tude de ses causes ou raisons peut ĂȘtre vraie, alors on peut dire que cette propriĂ©tĂ© non seulement permet la reconnaissance de la vĂ©ritĂ© mais aussi qu’elle appartient Ă  la nature de l’idĂ©e vraie raison pour laquelle celle-ci n’a pas besoin d’un signe extrinsĂšque pour ĂȘtre reconnue. C’est pour cette raison qu’au lieu de parler de coexistence entre deux thĂ©ories de la vĂ©ritĂ©, je parlerai de complĂ©mentaritĂ© entre l’adaequatio cohĂ©rence et la convenientia correspondance dans la constitution du concept spinoziste de vĂ©ritĂ©. 5 F. AlquiĂ©, Le Rationalisme de Spinoza, PUF, coll. ÉpimĂ©thĂ©e, Paris, 1981, p. 212. 6 Ce sont ceux, comme S. Hampshire ou H. Joachim, qui considĂšrent que Spinoza soutient exclusivement la conception de la vĂ©ritĂ© comme cohĂ©rence. 7 Ce sont ceux, comme E. Curley ou J. Bennett, pour lesquels Spinoza adopte exclusivement la conception de la vĂ©ritĂ© comme correspondance. Cette position, adoptĂ©e par Curley dans son livre Spinoza’s Metaphysics p. 56, p. 122‑126, a Ă©tĂ© revue dans son article Spinoza on Truth », in Australasian Journal of Philosophy, vol. 72, no 1, March 1994. Dans cet article, il soutient l’existence dans la pensĂ©e de Spinoza de tendances en conflit » entre la thĂ©orie de la vĂ©ritĂ© comme correspondance et une certaine version de la thĂ©orie de la vĂ©ritĂ© comme cohĂ©rence. 8 En particulier, il n’est pas possible de dĂ©velopper ici l’analyse dĂ©taillĂ©e de la notion d’idĂ©e adĂ©quate Ă©laborĂ©e par Spinoza dans le TraitĂ© de la rĂ©forme de l’entendement et dans l’Éthique, ni de justifier l’interprĂ©tation adoptĂ©e de cette notion comme renvoyant Ă  une affirmation connectĂ©e au systĂšme de raisons qui la prouvent et, par lĂ , Ă  une certaine version de la thĂ©orie de la vĂ©ritĂ© comme cohĂ©rence. Pour ces analyses et cette justification je renvoie au deuxiĂšme chapitre de mon livre Verdade e Certeza em Espinosa Ed. L & PM, Porto Alegre, 1999. 9 Éthique I, axiome VI. 10 Je ne reconnais aucune diffĂ©rence entre l’idĂ©e vraie et l’idĂ©e adĂ©quate, sinon que le mot “vraie” se rapporte seulement Ă  l’accord de l’idĂ©e avec son objet, tandis que le mot “adĂ©quate” se rapporte Ă  la nature de l’idĂ©e mĂȘme » GIV/270. 11 GII/26. 12 Cf. Éthique I, Proposition VIII, scolie 2 ; Éthique II, Proposition VIII ; Éthique V, Proposition XXIX, scolie. 13 Selon Spinoza, le contraste entre l’existence Ă©ternelle et l’existence temporelle n’est pas un contraste entre l’existence possible et l’existence actuelle, mais entre deux types d’existence actuelle. L’actualitĂ© Ă©ternelle de l’essence d’un mode fini qui n’existe pas dans le temps n’est que la propriĂ©tĂ© actuelle qui appartient Ă  l’attribut divin de produire nĂ©cessairement ce mode quand les conditions sont remplies. Cette propriĂ©tĂ© est une combinaison particuliĂšre des lois de la nature. 14 Cf. les § 41, § 42, § 85, § 91 et § 99. 15 Cf. Éthique II, Propositions XXXII et XXXIV ; Proposition XLI, dĂ©monstration ; Proposition XLIII, dĂ©monstration. 16 Cf. ibid., Proposition XLIII, scolie. 17 Bien que la substitution de l’énoncĂ© dĂ©finitionnel par l’axiomatique ne soit pas dĂ©pourvue d’importance, elle ne signifie pas la suppression de la correspondance comme l’un des Ă©lĂ©ments constitutifs de la conception spinoziste de la vĂ©ritĂ©. Pour cette raison, et pour faciliter l’exposition, j’ai pris la libertĂ© de maintenir la dĂ©signation traditionnelle de dĂ©finition nominale pour renvoyer Ă  cet Ă©lĂ©ment. 18 TraitĂ© de la rĂ©forme de l’entendement, tr. A. KoyrĂ©, J. Vrin, Paris, 1984, note 69, p. 107. 19 GII/124. 20 Pour cette interprĂ©tation de M. Dummett, voir R. Landim A interpretação realista da definição nominal da verdade », Manuscrito, n° 2, avril 1983 ; et Significado e verdade », SĂ­ntese, n° 32, dĂ©cembre 1984. 21 Éthique II, Proposition III. 22 Ibid, Proposition VI, corollaire. 23 Cette inspiration est nettement prĂ©sente dans la thĂ©orie de la dĂ©finition gĂ©nĂ©tique formulĂ©e dans le TraitĂ© de la rĂ©forme de l’entendement. 24 Éthique II, Proposition XL, scolie 2. 25 Il est important de rapprocher cette distinction intrinsĂšque, du point de vue de la vĂ©ritĂ©, entre suivre une rĂšgle en connaissant ou en ignorant sa nĂ©cessitĂ©, de ce que Spinoza soutient Ă  propos de la distinction intrinsĂšque, du point de vue Ă©thique, entre la conduite du sage et celle de l’ignorant par rapport aux principes Ă©thiques. Le sage et l’ignorant peuvent avoir une mĂȘme conduite, accomplir une mĂȘme action d’un point de vue extĂ©rieur tout en Ă©tant radicalement distincts du point de vue de la dĂ©termination intĂ©rieure. Ainsi, l’un interprĂšte une rĂšgle de vie comme une loi morale et est dĂ©terminĂ© Ă  l’obĂ©ir par la peur du chĂątiment et l’espoir d’une rĂ©compense ; l’autre est au-dessus de la loi, c’est-Ă -dire qu’il est dĂ©terminĂ© Ă  suivre cette rĂšgle de vie par la comprĂ©hension de la nĂ©cessitĂ© par laquelle elle est liĂ©e Ă  ses effets immanents, et par la comprĂ©hension de son utilitĂ© comme moyen pour parvenir Ă  la libertĂ© et au bonheur voir lettre XIX Ă  Blyenbergh et Éthique IV, Propositions LIX et LXIII. Le premier est esclave des passions tristes engendrĂ©es par sa connaissance inadĂ©quate, l’autre est un homme libre qui agit dĂ©terminĂ© par sa connaissance adĂ©quate et par les affects actifs qui en dĂ©coulent joie et amour intellectuel. De mĂȘme qu’il ne suffit pas de parvenir Ă  une conclusion correcte en suivant une rĂšgle dont on ignore la nĂ©cessitĂ© pour ĂȘtre dans la sphĂšre de la vĂ©ritĂ©, de mĂȘme il ne suffit pas de conformer notre conduite Ă  une loi dont on ignore la nĂ©cessitĂ© et l’utilitĂ© pour ĂȘtre dans la sphĂšre de l’activitĂ© Ă©thique et de la libertĂ©. La simple conformitĂ©, Ă  l’objet ou Ă  la rĂšgle, dĂ©tachĂ©e des raisons qui la justifient, est Ă©galement insuffisante dans les deux cas. Ce rapprochement indique – sans que nous puissions l’approfondir ici – l’extrĂȘme importance qui sera accordĂ©e Ă  la propriĂ©tĂ© intrinsĂšque de l’idĂ©e vraie adaequatio pour fonder la supĂ©rioritĂ© Ă©thique du sage face Ă  l’ignorant. 26 AT-VII-35 AT » renvoie aux Ɠuvres de Descartes, Ă©d. Charles Adam et Paul Tannery, Paris, LĂ©opold Cerf, 1897‑1909 ; réédition Vrin-CNRS, 11 vol., 1964‑1974. 27 AT-IX-48. 28 Cf. G. H. R. Parkinson, Truth Is Its Own Standard Aspects of Spinoza’s Theory of Truth », in Shahan and Biro eds., Spinoza New Perspectives, University of Oklahoma Press, 1978, p. 44, et M. Della Rocca, Representation and the Mind-Body Problem in Spinoza, Oxford University Press, 1996, p. 109. 29 Éthique II, Proposition XLI, dĂ©monstration, et Proposition XXVIII. 30 Ibid., Proposition XLI. 31 Éthique II, Proposition XVII, scolie et Proposition XLIX, scolie. 32 Éthique IV, Proposition I, dĂ©monstration et scolie. 33 Pour la distinction entre l’objet directement reprĂ©sentĂ© et l’objet indirectement reprĂ©sentĂ© par l’idĂ©e d’affection, voir Éthique II, Proposition XVI, et ses deux corollaires. 34 Éthique II, Proposition XXVIII. 35 Bien entendu, ce n’est pas par l’idĂ©e inadĂ©quate que nous pouvons savoir qu’elle s’accorde avec l’affection, c’est-Ă -dire qu’elle indique effectivement la maniĂšre dont nous sommes affectĂ©s par les choses extĂ©rieures, mais par notre connaissance adĂ©quate de l’origine et de la nature de la connaissance imaginative. 36 Cette idĂ©e est l’équivalent Ă©pistĂ©mique de la passion joyeuse. Celle-ci naĂźt d’un accord entre des individus qui se rencontrent, cet accord entre leurs natures Ă©tant cause de joie, c’est-Ă -dire d’une augmentation positive de puissance. NĂ©anmoins, cet accord et cette positivitĂ© ne sont pas suffisants pour caractĂ©riser ces individus comme des individus actifs, de mĂȘme que la positivitĂ© de l’idĂ©e inadĂ©quate et son accord fortuit » avec l’affection du corps ne sont pas suffisants pour la caractĂ©riser comme vraie. Haut de page Pour citer cet article RĂ©fĂ©rence papier Marcos AndrĂ© GLEIZER, Remarques sur le problĂšme de la vĂ©ritĂ© chez Spinoza », Philonsorbonne, 5 2011, 119-135. RĂ©fĂ©rence Ă©lectronique Marcos AndrĂ© GLEIZER, Remarques sur le problĂšme de la vĂ©ritĂ© chez Spinoza », Philonsorbonne [En ligne], 5 2011, mis en ligne le 03 fĂ©vrier 2013, consultĂ© le 17 aoĂ»t 2022. URL ; DOI de page Droits d’auteur Tous droits rĂ©servĂ©sHaut de page
ï»żLavĂ©ritĂ© est une valeur de la connaissance, relevant du domaine de la science ; la notion de devoir est une valeur de l’existence, relevant du domaine de la morale ou de l’éthique. Donc l’idĂ©e d’un devoir de chercher la vĂ©ritĂ© peut paraĂźtre Ă©trange, d’autant qu’on recherche la vĂ©ritĂ© en science et ailleurs. Il y a un dĂ©sir de vĂ©ritĂ©, un devoir
ï»żEpreuve corrigĂ©e du BAC S 2012 de philosophie dissertation Avons-nous le devoir de chercher la vĂ©ritĂ© ? Au prĂ©alable, il convient d’interroger les notions, les termes de ce sujet. Par devoir, il faut entendre obligation morale », Ă  l’échelle d’un individu comme obligation qu’on se donne Ă  soi-mĂȘme comme aiguillon dans l’existence ou Ă  celle du genre humain. Cette obligation donne sens Ă  notre vie direction et signification. On peut aussi concevoir le devoir en question comme une nĂ©cessitĂ© en vue d’obtenir autre chose que la vĂ©ritĂ© elle-mĂȘme. L’obtention de celle-ci serait la condition sine qua non du bonheur, de la sagesse. Une voie obligĂ©e, escarpĂ©e mais bĂ©nĂ©fique vers quelque chose de supĂ©rieur. La vĂ©ritĂ© est une valeur suprĂȘme. Platon place le Vrai sur le mĂȘme plan que le Beau ou le Bien. Ses Ă©quivalents et contraires seront intĂ©ressants Ă  interroger la vĂ©ritĂ© est-elle synonyme de rĂ©alitĂ© ? L’erreur, l’illusion semblent ses contraires. Les domaines Ă  Ă©tudier ne seront pas uniquement Ă©thiques ou mĂ©taphysiques mais bien sĂ»r aussi scientifiques et pourquoi pas politiques. La troisiĂšme notion clĂ© dans cet intitulĂ© rĂ©side dans le verbe chercher. Il faut lui opposer trouver ». Le sujet nous interroge sur la quĂȘte de la vĂ©ritĂ©, comme dynamique. L’enjeu principal n’est donc pas l’obtention de la vĂ©ritĂ© mais le cheminement qui mĂšne Ă  elle avec tout ce que cela peut supposer le chemin peut ĂȘtre douloureux, mais Ă©galement vain. Trouve-t-on un jour la vĂ©ritĂ© ? Qui peut prĂ©tendre la dĂ©couvrir ? La vĂ©ritĂ© est-elle pĂ©renne Ă  l’échelle de l’humanitĂ© ? Que se passe-t-il si nous ne nous soumettons pas Ă  ce devoir ? Sommes- nous encore Ă  la hauteur des attentes de notre condition ? Sommes-nous dignes d’ĂȘtre humains ? Renoncer Ă  cet effort, fĂ»t-il vain, n’est-ce pas se complaire dans l’illusion ? Bien sĂ»r, nous risquons l’erreur Ă  chercher ainsi mais l’erreur serait moins prĂ©judiciable Ă  notre condition que l’illusion, facile, dont nous serions complices. L’erreur n’est donc pas Ă  craindre. Elle constitue souvent une Ă©tape sur le chemin de la vĂ©ritĂ©. Cette quĂȘte de la vĂ©ritĂ© est un exercice difficile, douloureux et qui peut ne pas ĂȘtre couronnĂ© de succĂšs. On peut chercher assidument la vĂ©ritĂ© et ne jamais la trouver. Mais c’est sans doute plus honorable de continuer de la chercher que d’abandonner ce projet et de se contenter d’un ersatz de vĂ©ritĂ©, ce qui d’ailleurs n’aurait pas de sens. Certes et c’est tout le paradoxe, nous serions plus heureux dans l’illusion. C’est un Ă©tat fini, qui singe le bonheur, la plĂ©nitude. Les hommes de la caverne platonicienne croient ce qu’ils voient sur le mur. Ils prennent ces ombres pour la rĂ©alitĂ©, pour le vrai. Or il faut un sage pour guider tout un groupe vers la VĂ©ritĂ©, hors de la caverne, aux rayons du soleil. Une fois la VĂ©ritĂ© rĂ©vĂ©lĂ©e, les illusions semblent bien fades. Reste un cas de figure une vĂ©ritĂ© qu’il ne serait pas bon ou pas agrĂ©able de dĂ©couvrir. Faut-il s’obstiner Ă  la chercher ? Sans doute pas, pas Ă  tout prix mais cette quĂȘte est souvent un exercice intellectuel insĂ©parable des dĂ©couvertes elles-mĂȘmes. L’esprit humain est ainsi fait qu’il est passionnĂ© par la recherche et ne saurait que difficilement s’imposer, en la matiĂšre, de limites. Vous cherchez un cour de philosophie ? Proposition de plan I- La quĂȘte de la vĂ©ritĂ© est un exercice difficile 1- Un exercice qui exige des qualitĂ©s nombreuses patience, discipline, honnĂȘteté  Ref. possible Descartes, Discours de la mĂ©thode, la dĂ©marche scientifique dans son ensemble ; la dĂ©marche maĂŻeutique de Socrate dans les discours platoniciens 2- Le spectre de l’erreur fausse menace, finalement, mais Ă©tape nĂ©cessaire vers l’obtention de qqc Ref. possible Popper, Conjectures et rĂ©futations, le concept de falsifiabilitĂ© de la science 3- Une vĂ©ritĂ© inaccessible ? Une vĂ©ritĂ© une a-t-elle un sens ? Ref. possible thĂ©orie de la relativitĂ© puis de la relativitĂ© restreinte, aujourd’hui mise Ă  mal par des recherches nouvelles. II- Une obligation morale inhĂ©rente Ă  la condition humaine 1- Les hommes sont les seuls ĂȘtres vivants Ă  pouvoir prĂ©tendre Ă  cette dynamique 2- L’homme ne peut se contenter de l’illusion bien que cette derniĂšre soit apparemment confortable Ref. possible Platon, La RĂ©publique, le mythe de la Caverne 3- La quĂȘte de la vĂ©ritĂ© est la route vers la sagesse, vers la connaissance voire vers le bonheur. 4- Une quĂȘte en toutes circonstances ? Limites morales de la recherche de la vĂ©ritĂ©/ goĂ»t pour l’exercice intellectuel qu’elle constitue. M7t9.
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